30 septembre 2016

Coranisme, impérialisme et Hadith

Un courrier de CHARYBDE:

Je me permets de réagir à votre article sur quelques Hadith à propos de la Femme.  Tout cela est en effet très beau et si les Hadith reflétaient effectivement l'esprit du Coran, il n'y aurait aucun problème.
Or, les Hadith sont la source même du Problème. Voyez quelques explications plus bas que j'ai déjà données à des correspondants et que je vous laisse méditer. Si certains Hadith sont acceptables (parce qu'en harmonie avec la lettre du Coran, comme ceux que vous citez), la grande majorité d'entre eux sont des "On-dit", des racontars et constituent en fait la plus grande conspiration contre le Coran lui-même depuis mille ans.
En effet, pendant les trois premiers siècles, le monde musulman a vécu heureux, sans schizophrénie, parce que les compilations et la diffusion des Hadith étaient interdites conformément aux recommandations du Coran lui-même, de Muhammad en personne et de certains califes qui ont été choqués de constater la pratique.

28 septembre 2016

Facebook et Israël co-censeurs du web

Pour protester contre l'accord de censure entre Facebook et Israël, silence pour une semaine (et peut être plus...) sur la page Facebook du blog. J'invite tous les facebookers à protester chacun à sa façon. Reprise ci-dessous d'un article d'ARRET SUR INFO.

Suite à la controverse soulevée par la censure sur Facebook d’une photo mondialement célèbre de la guerre du Vietnam, Facebook a accepté de « travailler ensemble » avec le gouvernement d’Israël pour censurer des contenus jugés inappropriés par les responsables israéliens.

Quelle place pour la foi dans la société ? Par Roger Garaudy



Fresques San Antonio de la Florida.
Détail. Goya.1798. Saint Antoine
de Padoue
Nous devons […] éviter maints écueils :
     La conception dite libérale, où l'État n'intervient pas dans la
religion, ses rites et ses dogmes. Cette privatisation de la religion
porte sur les croyances et non sur la foi. Or la croyance
est une manière de pensée, la foi une manière d'agir. La tolérance
sera donc totale en ce qui concerne la croyance, mais il
est interdit à la foi d'agir sur les structures concrètes du
monde, selon les intérêts des individus et des groupes.
« Assistez à la messe » comme à une commémoration, « écoutez
la lecture de la Thora » par votre rabbin, « prosternez-vous », derrière
votre imam, mais, à la sortie, insérez-vous docilement
dans le système.
Ayez toutes les idoles intellectuelles que vous voulez pourvu
que vous n'interveniez pas, au sortir du temple, pour changer
l'ordre établi par le libre jeu du monothéisme du marché, régissant,
dans la pratique, toutes les relations humaines.
     A l'inverse, le totalitarisme prétend régner à la fois sur les
esprits et sur les corps, sur la foi et les actions qu'elle commande,
soit en érigeant l'Etat en une religion, soit en faisant
d'une religion particulière une religion d'État qui établira un
nécessaire dualisme politique et social. Qu'il s'agisse d'un
État juif, d'un État chrétien, ou d'un État islamique, celui qui
n'appartient pas à la religion officielle est un citoyen de seconde
classe.
De ce point de vue la prétention chrétienne d'être la religion
universelle est une forme typique de colonialisme spirituel,
inséparable du colonialisme tout court.

27 septembre 2016

Le Hadith et la Femme

© Droits réservés. Reproduction interdite sans autorisation

Du Hadith ( Parole du Prophète Mohamed)
Allah est Beau et  Il aime la beauté

De la femme

- Les femmes sont les sœurs des hommes, ne trompez pas vos sœurs !

- Mes  préférences sont trois : le parfum, les femmes et la prière, prunelle de mon œil.

- Le mariage est protection.

- La meilleure des jeunes filles pour le prétendant est celle qui a la   beauté et celle qui  a la richesse   et celle qui a la  piété.  Choisis celle  qui a la piété,  dans la difficulté   elle   sera ton soutien.

- Nul ne peut contraindre  une femme au mariage, son  consentement est de droit divin.

- La femme est une côte si tu la redresses, elle se brise.

- Les femmes sont des bouteilles de parfums,  prenez donc  soins des bouteilles de parfums!

- Le Paradis est sous les pieds des mamans.

- Le plus réprouvé des droits,  c'est le divorce.

- Vos femmes sont un champ pour vous, prenez-les comme  il vous est autorisé de le faire  et  avec les préliminaires d'usage.

- La femme est responsable de ses enfants, de ses obligations maritales et doit respect à sa belle famille, au possible,  le reste est commun au couple.

- Le hidjab est l'habit de la décence.

-Etc...

Traduction Djouher Khater

26 septembre 2016

Soudan 1993. L'interprétation ("ijtyhad") en question

Lors de son séjour au Soudan en 1993, Roger GARAUDY rencontra de nombreux responsables politiques et religieux, notamment Hassan Al Tourabi.
Il lui posa alors avec force la question fondamentale de ce que l'on peut entendre par "shari'a".

Voici des extraits de cet entretien: 
 Il y a quelques années j'ai refusé de venir au
SOUDAN au moment où le gouvernement voulait célébrer avec éclat ce qu'il appelait " l'application de la shari'a" car je ne voulais à aucun degré cautionner une interprétation de la shari'a qui consistait à appliquer aveuglément, sans aucune réflexion critique, sans aucun " yjtihad " , tous les versets du Coran , sans tenir le moindre compte des conditions historiques dans lesquelles les différents versets sont descendus , c'est à dire en refusant de comprendre la " pédagogie divine " qui a envoyé à chaque époque et à chaque société des messagers différents dans le langage de chaque peuple et au niveau de compréhension de chacun , sans chercher à abolir d'un seul coup les lois et les moeurs existantes afin que le message essentiel puisse être entendu.
Or , une telle attitude, en donnant , par exemple , les mains coupées du voleur comme caractéristique de 1'application de la shari'a, ne pouvait , à 1' intérieur du SOUDAN , que contribuer à la perpétuation de la guerre et à la méfiance des non-musulmans ( animistes ou chrétiens ) et , a 1' extérieur à nourrir la propagande de ceux qui veulent discréditer 1' ISLAM et en donner une image repoussante .
Je me souviens qu' à cette époque la télévision française a passé avec joie les images de la télévision soudanaise présentant des jeunes gens aux mains coupées et approuvant eux-mêmes la sanction qui leur avait été infligée. Rien ne pouvait en effet mieux servir la propagande contre 1' ISLAM .
 [ ...]

Tels versets concernant les femmes tels que " Tu possède légalement tes épouses et tes esclaves "
qui est répété 5 fois dans le CORAN : (33, 5 ) : " Ceux qui n' ont de rapports qu' avec leurs épouses et les esclaves qu'ils possèdent ne sont pas blâmables " ( (70,30 ). Sont interdits les femmes mariées " sauf si elles sont esclaves en toute propriété ." ( 4 , 24 ). ( même thème en 4,3 e t 33 , 52 ) .
Quelle que soit la forme d' application de telles formules à notre temps il s'agissait bien d'une légalisation du viol. De même que lorsqu'il est dit que le vainqueur peut disposer des captives
[...]

 Sous sa forme la plus claire voici ma question :
- Est-ce que l a " Shari'a " est, comme le dit le CORAN ( 42 , 13) la loi divine que DIEU recommande à tous les prophètes : ABRAHAM , MOÏSE , JESUS , MOHAMMED ?
- Ou bien comporte-t-elle 1' intégralité des prescriptions législatives contenues dans le CORAN ?



ROGER GARAUDY
Archives personnelles de RG
A lire en entier ici: http://fr.calameo.com/read/0010437626ccdd1ca9e14
Je peux vous envoyer le texte entier de R.G. en PDF (m'en faire la demande par le formulaire de contact, colonne de gauche du blog)

25 septembre 2016

Ne pas lire la Bible ou le Coran avec les yeux des morts

Les dernières lignes d'un texte écrit en 1985 par Roger GARAUDY pour un Colloque sur "AL-GHAZALI et IBN MAIMOUN, trait d'union entre l'orient et l'Ocident" organisé à AGADIR dans le cadre de la session  1985 de l'ACADEMIE DU ROYAUME DU MAROC



Réapprendre à lire la Bible et le Coran, non pas avec les yeux des morts, à travers une sédimentation millénaire de théologies et de commentaires portant tous la marque des siècles où ils furent conçus, mais à les lire comme une interpellation vivante à des hommes d'aujourd'hui, nous permettant, à la lumière du message éternel, de déchiffrer les "signes des temps" et de répondre aux défis de notre époque.
Pour y parvenir, nous serons obligés de renoncer aux littéralismes desséchants qui tuent l'intériorité de la foi et qui perpétuent les dominations par cette "religion pour le peuple"y comme disait Voltaire au temps des régimes "de droit divin", par cet "opium du peuple", comme disait Marx dans l'Europe de la Sainte Alliance. Alors nous retrouverons la voie royale, jalonnée par les grandes oeuvres de Ghazali donnant, grâce à l'expérience de la foi vécue des soufis authentiques, les principes de l'interpellation symbolique, et de Maimonide formulant les lois de la lecture allégorique des textes sacrés pour y trouver une réponse de l'Eternel aux problèmes toujours nouveaux de notre histoire.
Ainsi nous retrouverons le sens premier et dernier de la foi divine, de la shari'a, c'est à dire d'une législation ne faisant pas abstraction de la dimension transcendante de l'homme, et de ses valeurs absolues, pour sortir de la jungle des sociétés occidentales désacralisées, en finir avec des législations héritées du colonialisme, pour rompre avec les modèles purement quantitatifs et déshumanisés des sociétés dites de croissance, comme avec leurs "équilibres de la terreur", sans pour autant céder aux nostalgies d'un
passé dépassé, et aux repliements sur un littéralisme mortel.
Alors la shari'a, dont l'étymologie même signifie le "chemin vers la source", sera non pas un retour au passé, mais une redécouverte du jaillissement des sources: la shari'a ce n'est pas couper des mains, comme si la défense de la propriété était une valeur islamique plus sacrée que la justice sociale.
La shari'a, pour les individus comme pour les Etats, c'est vivre vingt quatre heures par jour dans la transparence de Dieu.

Roger GARAUDY
Novembre 1985


Extrait de: Religion et politique chez Ghazali et Maïmonide http://fr.calameo.com/read/0010437622294ba1c72fc (document interne de l'Académie du Royaume du Maroc)



24 septembre 2016

A l'aube d'une troisième ère de l'humanité

Si l'on rejette comme opérations mercantiles subalternes les spéculations millénaristes sur le « troisième millénaire », et si l'on examine l'histoire à vol d'aigle non par numération des batailles et des dominations, mais par les grands moments créateurs de l'avenir, il apparaît que nous sommes, si nous savons mener ce combat, à l'aube d'une troisième ère de l'humanité .
Depuis la naissance de l'homme et pour assurer matériellement sa survie se sont succédées deux formes fondamentales de civilisation . Lorsque les hommes cessèrent de vivre comme les autres animaux de ce que leur donnait spontanément la nature par la cueillette la chasse ou la pêche, ces nomades devenaient sédentaires, d'abord là où les grands fleuves donnaient à la terre les meilleures conditions de vie pour l'agriculture et la pêche. Le berceau des premières civilisations ce fut les grands fleuves.
La Mésopotamie (son nom même l'indique), c'est « le pays d'entre les fleuves »: le Tigre et l’Euphrate. La Chine a son berceau dans le delta du Fleuve Jaune; l'Inde de Mohendjo Daro et d'Harappa, sur les rives de l’Indus, l'Égypte sur celle du Nil.
Les grandes voies fluviales permirent aussi des liaisons et des échanges avec les autres îlots de culture, et, le long des mers, naquit, et se développa un deuxième âge de l'homme : les civilisations de la mer dans les régions côtières, qu'il s'agisse, en Occident, de l'Empire romain dans ce qu'ils appelaient « notre mer »: la Méditerranée, ou de l’Empire chinois qui exerça son influence sur toute l'Asie baignée par l’Océan. Il fallut des siècles pour passer de « l'économie fluviale » à « l'économie côtière ».
Aujourd'hui subsiste une terrible dualité entre la terre et la mer: à l'exception de l'Europe, 60% de la population mondiale habite aujourd'hui dans les régions côtières considérées comme développées et prospères alors qu'elles ne représentent que 19% de la superficie du globe. C'est un facteur important de sa « cassure » avec les grandes poches désertiques ou sous-peuplées et enclavées de l'Afrique, l'Asie, et des forêts vierges de l'Amérique du Sud.
Longtemps les spécialistes de la « géopolitique » spéculèrent sur les moyens de domination de la  terre ou de la mer qu'il s'agisse de Mackinder au moment de l’hégémonie coloniale de l’Angleterre et de sa maîtrise des mers, ou de Hausofer pour le rêve impérial allemand d’hégémonie territoriale des grandes masses terrestres.
Ces projets de partage ou de domination du monde subsistent encore en arrière fond du thème du « choc des civilisations » d'Huntington sous le masque d'oppositions religieuses entre la « civilisation judéo-chrétienne et les collusions islamo-confucéennes ».
En face de ses spéculations millénaires sur la « cassure » et les affrontements du monde et de la rivalité de ses hégémonies, il s'agit aujourd'hui de passer à une troisième ère de la civilisation du monde, par le développement solidaire d'une humanité mettant fin à ses cassures millénaires. Les étapes du « progrès » de l'humanité ne se comptent pas par millénaires, mais par étapes de la crise de conscience de son développement et la mise en oeuvre de son unité ainsi que par les créations décisives des hommes pour l'orientation de leur destin.. Il s'agit aujourd’hui, après la faillite de la « mondialisation », nom nouveau de la domination impériale du monde par les grands monopoles de l'Amérique et de ses vassaux, d'un remodelage global du monde par un « développement solidaire » de toutes ses cultures.
Au moment où les « millénaristes » intéressés tentent de nous forcer de croire – par des prétextes dignes de Nostradamus ou de Paco Rabanne – qu'une ère nouvelle allait naître, les maîtres criminels du statu quo (de Bill Gates à Soros et à leurs marionnettes Clinton ou Chiraquo-jospiniennes) nous prédiraient ce que serait – par simple extrapolation technologique des jours heureux du même millénaire, je n'étais pas loin de partager l'opinion d’Egdar Morin définissant le « changement véritable » par un acte humain; mais avec cette différence: je crois que le troisième millénaire a commencé à Seattle – et sans se faire d'illusion sur ses effets pratiques immédiats - un véritable « événement » s'était produit: le projet des dirigeants américains et de leurs vassaux étaient mis en échec par une mobilisation planétaire qui refusait la conception impériale de la « mondialisation » permettant aux plus riches de devenir de plus en plus riches et de moins en moins nombreux et aux plus pauvres d'être de plus en plus pauvres et de plus en plus nombreux.
Il serait en bien des cas difficiles aujourd’hui de classer automatiquement tel pays asiatique comme capitaliste ou socialiste. Il est vrai que plusieurs d'entre eux, parmi les moins importants, sont devenus des appendices subordonnés de grands pays capitalistes d'Europe ou des Etats-Unis, mais pour ceux dont l'étendue territoriale ou la puissance créatrice a permis d'avoir, malgré des années de présence des colonialistes, une évolution relativement autonome, l'analyse doit être plus prudente: en particulier pour la Chine, l'Iran, le Japon, l'Inde, la Malaisie, et quelques-uns autres à une autre échelle de grandeur.
Ils ont certes, rassemblé autour de leur entreprise de portée mondiale pour le sauvetage de l'avenir des hommes et de leur terre, mais il subsiste encore parmi les plus grands, des mutations incertaines des équilibres instables et dont il nous serait difficile, dès maintenant, de définir le choix final. En dehors de l'immense Russie dont personne aujourd'hui ne peut prédire avec certitude l'avenir, nous esquisserons quelques hypothèses de travail sur quelques pays asiatiques qui sont aujourd'hui en pleine mue. L’Occident qui s'était pendant des siècles approprié la maîtrise de leur avenir, qu'il s'agisse de la guerre de l'opium contre la Chine, du diktat du commodore Perry au Japon, ou de la colonisation directe de la France dans la presqu'île indochinoise ou de la Hollande dans l'archipel d'Indonésie et de la Malaisie, cherchent un avenir qui leur soit propre, c’est-à-dire à la fois sur le prolongement de leur histoire et de leurs cultures millénaires, et capables d'intégrer ce qui, dans les techniques de l'Occident, peut aider à l'épanouissement de l'homme et non à sa destruction.
Un retour pur et simple au passé, sous prétexte de maintenir intacte leur identité, est une entreprise absurde de quelques intégristes qui refusent systématiquement tout ce qui, dans les techniques de l'Occident a contribué à l’élargissement des possibilités de l'homme: il ne peut s'agir de revenir de l'éclairage électrique à la torche de résine, ou du camion à la charrette à bras. De même qu'est non seulement absurde mais criminelle la tendance inverse à confondre modernisation avec occidentalisation, et d'accepter les invasions du Coca-Cola ou des films de violence d’Hollywood au détriment des jus de fruits tropicaux, ou les gesticulations parfois sanglantes des Night Clubs, à la place des grandes épopées du Ramayana, des danses liturgiques de Bali ou des films de Kurosawa ou de Misoguchi.
D'immenses désillusions ont traumatisé le continent, qu'il s'agisse de l'implosion de l'espérance socialiste dans l'ancienne Union soviétique, ou de la faillite des aventures financières globalisantes des petits pays colonisés par les purulences de l'Occident américanisé.
Les hésitations actuelles et les alternances de domination politique, au Japon et en Inde par exemple, mais aussi en Malaisie, sont des crises d'orientation où se joue l'avenir du monde: selon que la balance penchera sans retour vers l'imitation des maladies de l'Occident américanisé ou que sera trouvé un point d'équilibre où les «valeurs asiatiques» fondamentales, les traditions brahmaniques, les valeurs chevaleresques du Japon ancien, ou la sagesse bouddhique sauront à la fois intégrer et maîtriser les puissances nouvelles de la technique et les mettre au service de tous.
La mise en question du «modèle occidental» dans lequel le «marché» joue le seul rôle régulateur des relations personnelles ou sociales est nécessaire: ce système, on l’a vu, fait en Asie, par la famine ou la malnutrition, l'équivalent de morts d’un Hiroshima tous les deux jours; le chômage et l'exclusion qui gagnent, en Europe même, montrent que les catastrophes des «dragons» asiatiques, survenues à partir de 1997, ne sont pas seulement une «crise asiatique» mais une crise du capitalisme mondial embrassant la planète entière, depuis l'Amérique où les accords de servitude et de misère de l’ALENA lient, en un marché unique, le Mexique aux Etats-Unis et au Canada, jusqu'à l'impossibilité de donner à l'Europe une unité autre que celle d'un marché aux concurrences sauvages, maintenu sous la tutelle du dollar grâce à son euro agonisant dans l'indifférence générale avant même sa naissance (s'il naît jamais!).
Le Japon a connu, après Hiroshima, la férule de Mac Arthur et la course à la croissance économique. L'Inde a vécu deux siècles siècles de domination économique, politique et militaire, avec ses famines et ses divisions entre musulmans et hindous savamment entretenues par l'occupant afin de diviser pour régner. Le Viêt-Nam a connu l'exportation éhontée du colonialisme français, puis le napalm américain, double visage de l'Occident en Asie, et l'aide empoisonnée par les exigences de deux alliés rivaux: l'URSS et la Chine.
L'exemple du Japon est caractéristique : il a tenté de maintenir ses «trois trésors» : l'emploi à vie, le salaire à l'ancienneté, et le syndicat d'entreprise, à travers 1e développement broyeur du dogme libéral de la «flexibilité», c’est-à-dire l'exigence de la «productivité» à l'américaine où l'ouvrier est un objet jetable comme un Kleenex ou rachetable à des conditions toujours plus précaires selon les aléas de l'entreprise.
Il est devenu de plus en plus clair qu'il ne s'agissait pas, en 1997, d'une crise «asiatique», frappant d'abord les implantations occidentales en Asie, et chavirant lorsque les investissements faiblissaient. Jusque-là, le FMI et la Banque mondiale pouvaient «boucher les trous», à coup de prêts provisoires gagés sur une obéissance politique rigoureuse, à la manière dont on avait procédé au Mexique lors de l'application stricte du «libre échange» entre partenaires inégaux, afin que les plus gros requins puissent "librement" dévorer les poissons plus faibles.
Les idéologies occidentales de la fin d’un monde se dissipent aujourd’hui, même dans les pays qui furent leur terreau mortel, comme les brumes des bas-fonds, se dissipent lorsque les premiers rayons du soleil illuminent les cimes : celles d’où l’on appelle l’homme, tous les hommes, à accomplir leur destin : celui de l’unité divine du monde.

Roger Garaudy 
Extrait de  http://rogergaraudy.blogspot.fr/2012/09/qui-sera-ton-dieu-par-roger-garaudy_21.html

23 septembre 2016

L'odeur des cimetières, par Roger Garaudy


Goya. Scène d'Inquisition. 1808

Des cimetière des espérances. Des espérances mortes: celle du socialisme qui, depuis un siècle, donnait un visage aux rêves de ceux qui vivent sous le talon de fer des oppressions sociales et coloniales, perverti par ceux-là mêmes qui prétendaient le réaliser dans l’histoire et le maintenir en copiant les modèles de croissance de ses pires ennemis, et les prostitutions politiques de ceux qui ont vendu leur pays. Les fossoyeurs ont triomphé. Ceux qui, d’Adam Smith à Von Hayek, ont voulu exclure de l’histoire les volontés des hommes pour qu’ils s’abandonnent aux dérives du marché comme seules régulatrices de toutes les relations humaines, ont proclamé « la fin de l’histoire ». Ce monothéisme du marché, conduit à la mort de l’homme après celle de Dieu.
Alors ont pullulé sur les ruines, comme des champignons vénéneux, les maffias et leurs charognards. Les chômeurs, les exclus, les mendiants, par millions, ont erré dans les rues, comme dans tous les pays où le « libéralisme totalitaire », c’est-à-dire la « restauration du capitalisme », a conduit à accumuler la richesse à un pôle de la société et la misère à l’autre.
Une autre espérance, deux fois millénaire, celle du message libérateur de Jésus, illumina, il y a bientôt cinquante ans, le ciel des chrétiens, avec les ouvertures sur le monde du concile de Vatican II du grand pape Jean. Elle est aujourd’hui, elle aussi, une fleur des ruines, depuis la « restauration d’une théologie de la domination », celle du constantinisme et du paulinisme. Elle est marquée par l’acharnement de la Curie romaine (en connivence avec la C.I.A.) contre la théologie de la libération en Amérique latine, l’absolution donnée à l’Europe colonialiste, depuis les déclarations de Jean-Paul II, à Compostelle, puis à Saint-Domingue, appelant «évangélisation» de l’Amérique le génocide indien. Il résume cette régression dans son Catéchisme de 1992.
Enfin la grande tradition humaine de libération des esclaves du colonialisme, celle de Bartholomé de Las Casas, de Victor Schœlcher, de l’abbé Grégoire, de Gandhi, de Mandela, de dom Helder Camara, est reniée par une Église redevenue monarchique et plus « romaine » qu’ « universelle ». L’intégrisme fondamental et premier du colonialisme, visant à imposer au monde entier son économie, sa politique, ses armées, sa culture et sa religion, en niant et en s’efforçant de détruire toutes les autres, triomphe, en cette fin de siècle, dans les intégrismes et les nationalismes les plus fanatiques.
La foi d’Abraham, attestée par le sacrifice suprême, annonçait l’alliance de Dieu avec «toutes les familles de la terre». Elle est supplantée par un nationalisme sauvage remplaçant le Dieu d’Israël par l’Etat d’Israël, vouant celui-ci à la conquête de « l’espace vital », à la « purification ethnique », à la division du monde en « élus et exclus », au « choc des civilisations », devenant son destin.
La levée de Jésus, et son « option préférentielle pour les pauvres », est bafouée par l’intégrisme totalitaire d’une Église redevenue impériale et constantinienne, occultant, sous un moralisme obsessionnel de la sexualité, les problèmes majeurs de la misère et de la guerre.
L’universalisme du Coran, honorant tous les Prophètes, et contribuant, pendant cinq siècles, au brassage des cultures et des civilisations, s’enfermant dans les traditions du Proche Orient, dans un « islamisme » devenu une maladie de l’Islam, et dont le littéralisme aveugle débouche sur les aberrations des « talibans ».
L’Amérique latine devenue la proie de tous les protégés des Etats-Unis, de Pinochet au Brésil et à l’Argentine, et n’ayant pour cible que Cuba et les efforts des uns ou des autres pour reconquérir une souveraineté relative. L’Afrique, où les dictateurs les plus sanglants, avec l’aide des anciens colonialistes, auxquels se sont joints les Etats-Unis, est livrée au chaos, de l’Algérie au Rwanda et au Zaïre, boycottée du Soudan à la Libye, et partout menacée de famine et d’épidémies. Une Asie ravagée par les premiers éclatements de la « bulle spéculative », née dans les bourses de Wall Street ou de la City de Londres parmi ceux qui ont perpétré « les crimes contre l’humanité » d’Hiroshima à l’Indonésie et aux Philippines de leur protégé Marcos, et qui osent se présenter en « défenseurs des droits de l’homme » contre la Chine et l’Iran.
Une Europe vassale, celle de Maastricht et de l’euro, où les Etats-Unis exportent leur chômage et leur anti-culture par leurs films de violence et le monopole de l’information au nom de la «liberté du commerce», tandis qu’ils en excluent la «concurrence» par les lois de l’embargo d’Helms Burton ou d’Amato, lois internes américaines prétendant légiférer pour le reste du monde. 
Roger Garaudy 

22 septembre 2016

Elections américaines: rien de positif à en attendre

Un empire est essentialiste par nature, son seul changement possible, c'est l'effondrement.
En évoquant le changement aux États-Unis, qu'apporterait un élu, c'est comme si l'on posait la question absurde: est-ce que le masque que porte un homme déguisé au carnaval, change son visage voire sa personne? Il n'y a pas de place pour le changement dans un système sociétal qui a su endoctriner ses gouvernés institutionnellement et idéologiquement en leur ancrant idéellement et émotionnellement son essence et sa praxis, et qui n'en est pas moins fort par les structures économiques, politiques et militaires dont il s'est doté. Là, nous ne devons jamais oublier le moulage behaviouriste des mentalités rendues réflexes de reproduction du même, sauf exceptions rarissimes. Déjà, Obama a été appelé pour faire le pitre au nom du système. Il n'existe où il est que parce qu'il a été oint par le système pour être le figurant d'un changement d'aspect et de peau, en lui prêtant un masque nouveau. Nul individu ne peut, à moins d'être un vulgaire menteur messianiste, prétendre pouvoir incarner par sa seule présence à la figuration présidentielle, un changement substantiel aux modalités de gouvernance imposées par la classe du pouvoir.

Pour une lecture critique du Coran, par Roger Garaudy

Un devoir majeur exige des musulmans une lecture critique du Coran, c’est-à-dire une critique à la fois historique des conditions dans les quelles le verset est « descendu » et avec quel objectifs, afin de l’appliquer dans les conditions nouvelles utilisant une autre langage pour en réalises les fins éternelles, et une lecture allégorique, c’est-à-dire en n’oublient jamais la transcendance de Dieu, sans comme mesure avec l’homme, et ne lui parlant que par paraboles comme l’homme ne peut l’évoquer que par métaphores.
L’un des commentateurs les plus profonds du Coran, Zamakhshari, dans son exégèse du verset 35 de la Sourate XIII, où le Paradis est évoqué sous la forme d’un jardin avec des eaux vives, écrit qu’il s’agit d’une «parabole qui, au moyen de l’image de quelque chose que nous connaissons par expérience, désigne ce qui est au-delà de ce que nous pouvons atteindre par la perception. »
Zamakhshari énonce ainsi le principe fondamental de toute théologie et de toute exégèse : le divin ne peut ni se percevoir ni se concevoir, mais tout au plus se « désigner ».
1 ° - Toute renaissance à la fois politique et spirituelle de l’Islam exige une lecture nouvelle du Coran, libérée des commentaires desséchés et desséchants des ulémas officiels.
2° - Le problème de la « modernité « ne doit pas être abordé à partir d’une idéologie occidentale, dite « moderne «, excluant le problème des fins dernières de l’homme et réduisant la raison à la recherche des moyens techniques de la puissance et de la richesse, principe de son colonialisme, militaire, économique et culturel.
Un effort de renaissance de l’Islam a été tenté au cours du XIXe siècle et dans la première moitié du XXe.
Un grand mouvement de réforme commença avec El Afghani (1838-1897). Il n’empruntait rien à l’Occident, sauf sa technologie. Mais sur le plan spirituel, celui des finalités, son «retour aux sources» n’était pas un retour à la tradition, mais un retour au Coran, lu avec les yeux d’un homme du XIXème siècle. Cette nouvelle lecture du Coran ouvrait la possibilité d’une régénération : « Dieu, disait-i1 en citant le Coran (Sourate XIII, verset 1), ne modifie pas l’état d’un peuple tant que les individus (qui le composent) ne modifient pas ce qui est en eux-mêmes. » Cela le mit déjà aux prises avec les traditionalistes.
Il inspira toute une lignée de réformateurs dont le plus célèbre fut Mohammed Abdou, qui le rencontra en 1882 au Caire. et, devenu grand cheikh d’El Azhar, donna, sous son influence, dans sa Lettre sur l’unité (tawhid) une lecture à la fois fidèle et répondant à la situation historique du monde . Rashid Redha continua, en Égypte, son œuvre dans le journal Al Manar (le phare) à la tête duquel lui succéda Hassan El Banna (1906-1949) qui fonda «Les Frères Musulmans» en 1922. Homme d’action, il avait si parfaitement conscience de l’unité coranique du message divin qu’il exigea que des chrétiens siègent, à part entière, à la direction du mouvement des Frères Musulmans.
Sa volonté d’unité du monde le conduisit, lui aussi, à une «option préférentielle pour les pauvres» : c’est parmi les paysans pauvres (les fellah) de la vallée du Nil, qu’il créa ses premières communautés de base, ses premières coopératives, se premières «banques islamiques», banques des pauvres, sans «intérêt», conformément à l’interdiction islamique du «riba» (l’argent gagné sans travail), cellules-mères d’une «civilisation nouvelle», échappant au «monothéisme du marché» à la fois par la reconnaissance de la dimension transcendante (divine) de l’homme et par le souci d’unité des principes de la «shari’a» (de la voie de Dieu) tels qu’ils sont définis dans le Coran, c’est-à-dire communs à toutes les religions révélées : Dieu seul possède, Dieu seul commande, Dieu seul sait, permettaient ainsi à la première génération des «frères musulmans» de relativiser la propriété (le propriétaire n’est que le gérant responsable); le pouvoir (le principe coranique de la «shura» (concertation excluant toute dictature d’un homme ou d’un parti) ; le savoir (le savoir de l’homme n’est toujours que relatif, provisoire, inachevé). C’était là le contrepoison de tout dogmatisme et de tout clergé se considérant comme fonctionnaire de l’absolu et dépositaire d’un savoir intangible.
Cette shari’a fondamentale inspira souvent des législations («fiqh») originales telles que des réformes agraires enlevant aux grands propriétaires terriens leur accaparement du sol pour le donner à ceux qui le travaillent, des systèmes fiscaux frappant les grosses fortunes héréditaires par un impôt direct, à l’inverse des impôts indirects sur la consommation qui frappent les démunis plus que les nantis ; des institutions participatives dans les entreprises pour éviter, comme le recommande le Coran, l’accumulation de la richesse à un pôle de la société et de la misère à l’autre.
Ce «retour aux sources» qui, pour Hassan El Banna, était un retour au Coran, fut parfois mal interprété par ses disciples qui en firent un «retour à la tradition», c’est à dire à des interprétations du Coran correspondant aux besoins de telle ou telle époque (ou aux` besoins de tel pouvoir.)
De telles «ouvertures» sur une civilisation nouvelle, échappant au «monothéisme du marché», comme «les communautés de base» et les théologies de la libération des chrétiens, furent en butte à l’hostilité des pouvoirs établis: Hassan El Banna fut assassiné en 1949, d’autres de ses disciples furent torturés ou pendus au nom d’une «orthodoxie» choyée par les pouvoirs.
Mais les perspectives d’une civilisation alternative, ne faisant pas abstraction de la dimension transcendante de l’homme, ni de l’option préférentielle pour les pauvres, reste, pour les chrétiens comme pour les musulmans, même si le développement en est entravé, «pierres vives», graines d’avenir pour la construction du futur.
En fait, malgré la distorsion des enseignements d’Hassan El Banna et l’étroitesse sectaire d’un grand nombre de dirigeants du mouvement qu’il avait fondé, la nécessaire relecture du Coran, momifié par une grande partie des «ulémas» officiels, l’esprit d’ouverture des réformateurs demeura vivante à travers le monde:par exemple, en Algérie de cheikh Ben Badis à Bennabi, au Pakistan avec Mohammed Iqbal, en Iran avec Ali Shariati, en Amérique même avec Fazlur Rahman.
Leurs grandes voix se sont tues avec leur mort, au milieu du XX ème siècle, mais la flamme qu’ils ont allumée ne doit pas s’éteindre pour permettre un réveil spirituel et politique de l’Islam vivant.
Roger GARAUDY

21 septembre 2016

"L'espoir de l'homme est la chair de Dieu"

Ton Dieu n'est pas le juge qui condamne tes abandons et tes défaites. Ton Dieu n'est pas le sauveteur inespéré qui vient à ta rescousse lorsque tu fléchis sous la poussée des plus forts. Depuis Kant, il n'est plus un être mais un postulat.
Lorsque tu as fait abandon de tout, même de ce qui t'attachait le plus fort, il reste l'appel à résister encore.
« L'espoir de l'homme est la chair de Dieu », écrivait Barbusse, écrivain sans Dieu. Le véritable athéisme, c'est de ne pas se poser la question, c'est d'accepter que les choses soient ce qu'elles sont et aillent comme elles vont. Le plus grand des péchés, c'est le désespoir et le renoncement au combat. La foi c'est d'essayer de voir la fin et de lutter pour elle. Cette fin n'est pas écrite une fois pour toutes dans un avenir immuable.
La foi, c'est la responsabilité, à chaque instant et à tout risque, de fixer une cible à la flèche du temps. La foi, c'est  cette vision totale du monde, de son flot incessant, et, quelle que soit ma force, de participer à la réalisation du Royaume.
Chacun de nous peut parcourir cette route : un jour l'éboueur connaîtra la joie parce qu'il est en train de
balayer l'avenue du Royaume ; le chef politique saura qu'il n'a pas pour but de plaire à ses électeurs 
mais à participer à la véritable unité du monde : celle où chaque enfant qui porte en lui le génie de Mozart
pourra  devenir Mozart. Ce jour là nous porterons tous la bannière triomphante du Royaume.
Mais il faut pour cela désapprendre à regarder le petit monde à la manière de l'athéisme sous-humain, qui 
ne voit dans l'oiseau que son plumage, en l'homme que le complot qu'il médite ou le crime qu'il prépare, 
dans le ciel un nuage qui passe annonçant l'orage de l'hiver ou les touffeurs de l'été.
A la manière, elle aussi, sous-humaine, du «savant» qui a découpé la réalité en concepts, ou qui croit 
aujourd'hui que l'ordinateur est une «intelligence artificielle», capable de se substituer à l'exploration des
fins dernières, au lieu de nous donner parfois les moyens terrifiants de détruire.
A la manière du sous-humain, qui prétend nous enseigner le bien et le mal comme le lui ont appris ses
parents ou son curé, au lieu de chercher, à tâtons, à créer l'unité du monde, au moins du nôtre, et si petit 
soit-il. Il n'est pas besoin, pour éprouver ce tremblement de Terre et de ciel, d'aller dans la synagogue,
l'église, la mosquée, ou à Borobudur.
Le poète ourdou (à la fois hindouiste et musulman) Kabîr, au XVe siècle, écrivait :
« Homme de foi, où me cherches-tu ?
Je, suis tout près de toi.
Je ne suis ni dans le temple ni dans la mosquée.
Je ne suis ni dans vos rites et vos cérémonies...
Si vraiment tu me cherches
Tu m'as déjà trouvé »
Roger Garaudy