Il faut
bien, à la fin des fins, que les choses changent ! Raoul Vaneigem par
exemple nous y exhorte ; «L’exploitation
de l’homme par l’homme nous a rendu étrangers à notre propre existence»,
«Survivre nous a jusqu’à présent empêchés
de vivre», «La tradition des espoirs
abolis n’a que trop duré», «Nous
sommes habités par une pluralité de mondes possibles dont la porte du rêve
entrouverte ne nous dévoile qu’une brève lueur», « Ce n’est pas à un éternel retour que
j’aspire. C’est à un éternel commencement» ("De la Destinée").
Si l’on refuse, avec l’exploitation et l’aliénation de l’Homme sous le Capital, la destruction des communautés humaines, l’individualisme de jungle, le mode de croissance mortifère pour la planète et pour l’espèce, qui en résultent ; si l’on refuse de céder à ce que Vaneigem appelle «les pestes émotionnelles - nationalisme, fascisme, stalinisme, intégrismes » -, alors transcendance et politique révolutionnaire ont vocation à se rejoindre.
Si l’on refuse, avec l’exploitation et l’aliénation de l’Homme sous le Capital, la destruction des communautés humaines, l’individualisme de jungle, le mode de croissance mortifère pour la planète et pour l’espèce, qui en résultent ; si l’on refuse de céder à ce que Vaneigem appelle «les pestes émotionnelles - nationalisme, fascisme, stalinisme, intégrismes » -, alors transcendance et politique révolutionnaire ont vocation à se rejoindre.
Jean Picard le Doux, "Flore des Tropiques", tapisserie |
Quatre
principes peuvent
être énoncés pour illustrer cette rencontre où l’intime se mêle au collectif.
En finir
positivement avec la propriété privée des moyens de production et d’échange en
lui substituant une «association où le
libre épanouissement de chacun est la condition du libre épanouissement de tous» ("Le Manifeste").
Ce qui veut dire que le libre épanouissement des uns ne saurait être une
entrave, voire un empêchement, au libre épanouissement des autres et de tous,
d’où la nécessaire abolition de la propriété privée, dans laquelle trouvent sa
source l’exploitation du travail, l’aliénation des hommes et le pouvoir d’Etat
(au service de la classe propriétaire), c’est-à-dire les structures matérielles
et idéologiques causes du non-épanouissement du grand nombre. Les
révolutionnaires retrouvent la voie montrée par Marx aux
communistes : «Dans tous [les]
mouvements, ils [les communistes] mettent en avant la question de la propriété,
quel que soit le degré de développement qu’elle ait pu atteindre : c’est
la question fondamentale» . Premier principe.
Second
principe: se
dégager de la conception statistique, comptable, de la politique – les fameuses
«majorités» et «minorités» - pour chercher au contraire à créer dans la société
une «atmosphère d’unanimité, en quoi
finalement consiste l’ultime et fuyante essence de la Démocratie»
(Teilhard de Chardin).
A partir de
là, et compte tenu du fait historique que ni la propriété collective ni la
tension vers l’unanimité ne sont suffisantes bien que nécessaires pour
émanciper les hommes, chercher à créer les conditions d’une politique exercée à
partir de la base, par les «masses»,
c’est-à-dire dégagée des contraintes de la centralité du pouvoir. La centralité
du pouvoir est réification de toute révolution. Le prolétariat (la classe
ouvrière), organisé en parti - parti au sens historique du mot - a à prendre en
charge le contrôle des formes nouvelles du pouvoir politique, structuré de bas
en haut à partir des «conseils». Troisième principe.
Enfin, quatrième et dernier principe, qui n’a
rien de nouveau tout comme les trois premiers mais prend avec l’hyper-mondialisation
du Capital et la révolution cybernétique une importance à la fois symbolique et
pratique : agir en tout en intégrant la dimension planétaire des
problèmes, de leurs solutions, et des luttes pour faire gagner parmi ces
solutions les émancipatrices contre les régressives (les pestes dont parle
Vaneigem). Il n’y a pas plusieurs mondes dont l’un – le nôtre, le monde
occidental – devrait être «défendu» contre les autres. Contre les tenants du «choc des civilisations» (Huttington),
soutenir que le monde est un, que ce monde un est à transformer en un autre
monde, lui aussi un, et qu’on ne pourra agir qu’en se sentant partie de ce un,
partie de ce tout. Faire un avec le tout, comme nous y invite Roger Garaudy, inspiré par toutes les grandes sagesses.Alain Raynaud
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