23 janvier 2015

La Question palestinienne et la Responsabilité Internationale (1983)



Groupe d'Etude sur le Moyen-Orient
Genève, août 1983

La Question palestinienne et la Responsabilité Internationale

" On porterait gravement atteinte aux principes élémentaires de l'équité en n'accordant pas à ces innocentes victimes * du conflit le droit de retourner chez elles alors que, par ailleurs, les immigrants juifs pénétreraient  en grand nombre en Palestine et pourraient même menacer de prendre définitivement la place des réfugiés arabes dont les familles sont installées dans le pays depuis des siècles. "
Comte Bernadotte (1948)
* les Palestiniens.

Cher lecteur,
A la veille de la Conférence internationale sur la Palestine, débutant à Genève le 29. 8. 83, nous avons cru utile de vous faire part de ce document.
Celui-ci n'est aucunement destiné à une quelconque propagande.
Il essaye de jeter quelques rayons de lumière sur des réalités afférentes à la cause palestinienne, oubliées ou méconnues.
Dès lors, on s'est borné, pour l'essentiel, à la citation de certains textes des résolutions de l' O.N.U. et à des déclarations, notamment, des différents dirigeants et responsables israéliens.

Le Groupe d'Etude sur le Moyen-Orient, Genève.
____________________________________________________________________________

L'O.N.U., Israël et les Palestiniens

Dans sa résolution ES/7/7 du 19 août 1982, l'Assemblée générale des
Nations Unies avait décidé de convoquer à une conférence internationale sur la
question de Palestine en vue de rechercher des moyens efficaces pour permettre
au peuple palestinien d’obtenir et d'exercer ses droits.
Il apparaît, après plus de 30 années de conflit, que, si le peuple palestinien
n'a pas encore obtenu ses droits, cela tient au fait que l'Etat sioniste d'Israël,
fondé sur le racisme, l'expansionnisme et la terreur, ne se conforme pas au droit
international et ne tient pas compte des résolutions de l'Organisation des Nations
Unies. En un mot, c'est "parce que Israël n'est pas une Etat comme les autres" !
Toute ébauche de solution pour la question de la Palestine passe nécessairement
par une démystification tant des principes selon lesquels l'Etat sioniste
d'Israël a été créé que des principes selon lesquels s'exerce sa politique.
Cette démystification permettra, non seulement de mesurer l'injustice faite au
peuple palestinien, mais aussi de montrer la mesure du danger que la paix et la
sécurité mondiale encourent. Avec les développements que connaît le Proche-
Orient à l'heure actuelle, une telle analyse devient de plus en plus urgente.


Création de l'Etat d'Israël

La Déclaration Balfour
Dans son livre L'Affaire Israël, le Sionisme Politique (1) , Roger Garaudy dit:
"avec la Déclaration Balfour commençait la série des grands mensonges qui jalonnent
l'histoire de l' Etat d'Israël et de ses dirigeants". L'auteur de cette déclaration,
parue le 2 novembre 1917, reconnaît que le principe de l'auto-détermination
était refusé à la population de la Palestine. En effet, Arthur James Balfour
écrira à Loyd George le 19 février 1919 : " le point  faible de notre position c'est
évidemment que, dans le cas de la Palestine, nous avons refusé le principe de
l'autodétermination. Si les habitants actuels étaient consultés, ils  rendraient
indiscutablement un verdict contre l   implantation juive ".
En effet, le rapport de la Commission King-Crane, envoyée par le Président
Wilson en 1919, confirmera le refus opposé par la population palestinienne à
rencontre de l'implantation juive. Cette commission proposait alors le rejet du
programme sioniste maximal et le maintien de l'unité de la Syrie-Palestine sous
un mandat britannique ou américain garantissant la présence du foyer national
juif limité (2).
En outre, la Déclaration Balfour stipulait que les droits civils et religieux des
communautés non-juives seraient respectés. Or ces droits furent constamment
bafoués, et l'idée d'un foyer national juif qui, selon le Livre Blanc Britannique de
1922, devait consister à créer, en Palestine, un centre de rayonnement de la culture
et de la religion juives, était devenue pour les dirigeants sionistes un paravent
derrière lequel se cachaient leurs intentions de créer un Etat sioniste. Cet état
d'esprit devait se confirmer par la suite avec le partage de la Palestine et la création
de l'Etat d'Israël.

La Résolution de partage de la Palestine
Une étape décisive fut franchie le 29 novembre 1947 lorsque l'Assemblée
Générale des Nations Unies adopta la résolution 181 dite de partage de la Palestine.
 
Les Juifs, qui constituaient à cette date 32 % de la population et ne possédaient
que 6,5 % des terres, reçoivent des Nations Unies 56 %du territoire avec
les terres les plus fertiles.
Dès lors se posera l'épineux problème de la compétence de l'Assemblée Générale
des Nations Unies à prendre une telle décision.
En effet, comme l'explique Monsieur Chambour (3) , l'organisation des Nations
Unies avait expressément renoncé, en 1946, à ses fonctions de contrôle exercées
auparavant par la Société des Nations en matière de mandat sur la Palestine.
A cet effet, les dispositions légale des obligations de la puissance mandataire
sont nettement exprimées par l'article 2 du pacte du mandat. Ce dernier stipule
que :
" La garantie de l'intégrité territoriale de la Palestine est assurée par la puissance
mandataire, ainsi que sa protection contre toute perte ou prise à bail de
tout ou partie de son territoire et contre l'établissement de toute autre puissance
étrangère. "
Cette question de compétence fut reprise en 1947 par l'Assemblée générale,
sous la forte pression qu'exercèrent les délégations sionistes sous plusieurs formes,
dont la plus commode fut le chantage à l'antisémitisme. Les excès sionistes furent
tels qu'ils faillirent compromettre les objectifs mêmes des Juifs. Le Dr Chaïm
Weizmann dut minimiser, devant l'émotion de Truman, l'ampleur de cette campagne
en l'attribuant à des éléments "incontrôlés" : "Il est courant de prétendre
à Washington que nos frères Israélites ont exercé des pressions déplacées et
excessives sur certaines délégations et ont ainsi dépassé la mesure. Je ne peux
répondre des personnalités sans mandat . . . "
Dans ses Mémoires, l'ancien président des Etats-Unis, H. Truman, écrivit ce
passage déplorable : "En réalité, non seulement les Nations Unies étaient soumises
à des pressions telles qu'elles n'en avaient jamais connues, mais la Maison Blanche,
elle aussi, subissait un véritable tir de barrage. Je ne crois pas avoir jamais été
l'obje t d'une campagne de propagande aussi virulente. L'acharnement de quelques-
uns des dirigeants sionistes parmi les plus extrémistes, poussés d'ailleurs par
des motifs politiques et maniant la menace politique, me gênait. Certains d'entre-
eux suggéraient que nous fassions usage de notre influence pour amener des
nations  souveraine s à voter favorablement à l'Assemblée générale. "
L'Assemblée générale avait présenté à la Cour internationale de justice une
demande d'interprétation de l'article 10 de la Charte de l' O.N.U., concernant
son pouvoir de contrôle et sa compétence en la matière. La Cour avait admis la
demande et prononça sa résolution (No 141-III), qui fut confirmée par la résolution
No 227-HI du 21 novembre 1948 et la résolution 337 du 6 décembre 1949.
La Cour internationale de justice a admis cette position malgré le fait que
l'Assemblée générale avait expressément déclaré renoncer à ses fonctions de contrôle
découlant de l'article 10 de la Charte et donna l'interprétation suivante :
"... La Cour a estimé que l'Assemblée générale des Nations Unies avait, aux
termes de l'article 10 de la Charte, le droit de reprendre les fonctions de contrôle
exercées auparavant par la S.D.N. La compétence de l'Assemblée générale des
Nations Unies, pour exercer un tel contrôle et pour recevoir et examiner des
rapports, ressort des termes généraux de l'article10 de la Charte qui autorise
l'Assemblée générale à discuter toutes questions ou affaires entrant dans le cadre
de la Charte et à  formuler sur ces questions ou affaires des recommandations aux
membres des Nations Unies."

Compétence de l'Assemblée générale
Il ressort de l'interprétation de la C.I.J. que l'Assemblée générale de l’O.N.U.
peut se prévaloir de ses droits auxquels elle avait expressément renoncé auparavant,
dans le cadre des fonctions de contrôle que la S.D.N. exerçait en matière
des mandats et de celles déterminées dans la Charte de l'O.N.U. Ces compétences
sont :
1. Recevoir et examiner les rapports de la puissance mandataire ;
2. Recevoir et examiner les pétitions ;
3. Emettre des recommandations aux membres des Nations Unies ;
4. Discuter toutes questions ou affaires dans le cadre de la Charte.

L'illégalité des décisions de l ' O . N . U.
C'est dans l'exercice de ses fonctions précitées que l'Assemblée générale de
l'O.N.U. s'était heurtée à nombre de difficultés d'ordre politique et juridique.
Questions politiques :
Les très fortes pressions qu'exercèrent les congressistes sionistes sur nombre
d' Etats membres de l'O.N.U., les instances de la délégation des Etats-Unis auprès
de l'Assemblée générale, afin de prendre une attitude favorable à la cause des
Juifs et, enfin, les instructions données par le Président Harry Truman au Département
politique d' Etat pour qu'il accorde l'appui de l'Amérique au plan de
partage, lequel ordre est cité par M. H. Truman lui-même dans ses Mémoires, tous
ces facteurs politiques d'influence eurent assurément de graves conséquences sur
la conduite des décisions prises par l'Assemblée générale concernant l'affaire
palestinienne.
Questions juridiques : La succession de la S.D.N.
Cette succession est affirmée par la Cour internationale de justice, en ce qui
concerne le mandat. Certains auteurs ont contesté cette succession relative au
mandat A qui a pris fin par l'indépendance des pays du Proche-Orient. Cependant,
le régime de la tutelle internationale entre dans le cadre de la succession de
l'O.N.U. à la S.D.N.
Mais l'interprétation de la C.I.J., en ce qui concerne la compétence de l'Assemblée
générale de l'O.N.U., assure le maintien intégral des dispositions juridiques
et politiques du mandat A. La Palestine, qui n'avait pas reçu son indépendance
encore, conservera les droits attachés à son unité territoriale et politique.
La Cour affirme à cet égard que les obligations résultant des mandats et leur
objectif primitif demeurent maintenus par la succession de la S.D.N. L'Assemblée
devait respecter sa compétence limitée par la Cour et l'article 10 de la Charte.
Or, l'Assemblée générale, prenant en considération la demande de la puissance
mandataire sur la Palestine, en date du 18 février 1947, annonçait la cessation du
mandat britannique sur la Palestine.
Le problème palestinien s'est trouvé dès 1947 soumis à l'Organisation des
Nations Unies. Celle-ci devait se conformer d'une part au Pacte de la S.D.N.,
voire à l'article 22 portant sur la législation fondamentale du mandat A appliqué
sur la Palestine comme il a été appliqué aux pays du Proche-Orient sous mandat ;
d'autre part, elle devait faire face au problème essentiel du conflit israélo-arabe,
concernant le sort légitime de la Palestine en tant qu' Etat indépendant, avec un
Foyer juif, nettement stipulé par le pacte du mandat britannique.
Le 15 mai 1947, l'Assemblée générale a pris deux résolutions (4), l'une portant
sur la création d'une Commission spéciale, ayant pouvoir très étendu pour enquêter
sur toutes les questions et tous les problèmes relatifs à l'affaire palestinienne;
l'autre, sous forme d'appel aux gouvernements et peuples était ainsi
libellée :
"L'Assemblée invite, par la résolution No 107, tous les gouvernements et tous
les peuples et particulièrement les habitants de la Palestine à s'abstenir du recours
à la force ou à la menace ainsi qu'à toute forme d'action qui serait de nature à
créer une atmosphère pouvant compromettre une solution rapide de la question
palestinienne . "

La question juridique du plan de partage
La Commission spéciale, n'ayant pas réussi à se prononcer à l'unanimité sur
une solution unique, présenta à l'Assemblée deux plans différents. Le plan de la
majorité recommande le partage de la Palestine en deux Etats, arabe et juif liés
par une union économique, et le plan de la minorité, préconisant la constitution
d'un Etat fédéral avec Jérusalem pour capitale.
Une commission ad hoc est instituée par l'Assemblée générale chargée plus
spécialement de l'étude des trois points suivants :
1. la proposition britannique,
2. la proposition arabe de cessation du mandat et de reconnaissance de l'indépendance
de la Palestine,
3. le rapport de la Commission spéciale.
L'élaboration d'une décision était déjà préparée à l'avance pour admettre le
plan de partage, qui fut adopté par 25 voix contre 13,17 abstentions et 2 absences.
C'est ainsi que la Belgique, la France, Haïti, le Libéria, le Luxembourg, les
Pays-Bas, le Paraguay et les Philippines ont dû réviser leur vote au moment de la
séance plénière.
Cette décision est contraire aux prescriptions de l'article 22 du Pacte de la
S.D.N. qui déclare l'entité politique territoriale de la Palestine. Elle l'est aussi par
le fait de l'incompétence de l'O.N.U. de modifier les dispositions du mandat A
qui reconnaissent l'indépendance de tous les pays qui s'étaient détachés de
l'Empire ottoman. Le partage est contraire à l'intégrité territoriale de la Palestine
prévue par l'article 22 précité. Que le Foyer juif se transforme par des décisions
illégales de l'O.N.U., en un Etat. ; c'est une violation du droit des peuples de disposer
d'eux-mêmes. L'Etat d'Israël n'étant pas en bonne et due forme nationale
pour pouvoir recevoir un fin juridique.
Que l'O.N.U. soit amenée à prendre la résolution 107 précitée, c'est qu'elle
a été avertie des soulèvements en Palestine de l'opinion publique contre la
décision du partage ; cela nécessitait une mesure à prendre contre les pressions
sionistes, et les mettre devant la situation exacte qui ne pouvait être que le choix
entre deux solutions juridiques équitables :
1. La détermination d'un lieu pour le Foyer juif, conformément aux dispositions
du Pacte de la S.D.N. et du mandat A au sein d'une Palestine indépendante
arabe.
2. La mise en application d'un mandat, sous le contrôle de l'O.N.U., de l'administration
autonome du Foyer juif, pour une période déterminée pour connaître
la conduite des Juifs, et les conditions de leur établissement dans un canton.
Cette décision aurait été conforme auxles articles 1 et 2 de la Charte, qui
recommandent le respect de la paix, des droits et libertés de l'homme, et avec les
articles 10 et 14 de la Charte.
Mais cela n'était pas la pensée de l' O.N.U. Elle est et elle demeurera responsable
du conflit actuel.
Le professeur I. Browlie écrit à propos : " Plusieurs considérations donnent à
douter de la capacité des Nations Unies pour conférer un titre sur un territoire,
entre autres parce que les Nations Unies ne peuvent assumer le rôle de souverain
territorial . "
" Ainsi la résolution de 1947, comportant un plan de partage de la Palestine,
était probablement prise en dehors de la compétence des Nations Unies, et même
s'il n'en est pas ainsi, elle n'avait aucun caractère obligatoire pour les Etats
membres. "
Dans son rapport intérimaire présenté au Secrétaire général de l'O.N.U. le
16 septembre 1948, le médiateur de l'O.N.U., le comte Folke Bernadotte, releva
les points essentiels du problème palestinien : le partage, l' Etat juif, l'immigration
et les réfugiés palestiniens. Car il estimait que la question qui se posait
n'était pas de savoir s'il était souhaitable de reprendre et de reviser la résolution
du 29 novembre 1947 ; celle-ci est déjà dépassée et irrévocablement revisée par
les faits qui se sont produits au cours de l'histoire récente de la Palestine.
Décrivant l'attitude des Etats arabes, le comte Bernadotte estimait : "qu'il est
extrêmement difficile d'accepter seulement le fait de l'existence d'un Etat juif
en Palestine, tout en reconnaissant le droit à de nombreux Juifs actuellement en
Palestine, disait-il , de s'y trouver et d'y demeurer en tant que citoyens d'un Etat
palestinien. Ils repoussent avec indignation les aspirations nationalistes des Juifs
à un Etat séparé. "
"Selon moi, conclut-il, et sans excuser en aucune façon l'intervention armée
des Etats arabes, la solution du problème serait facilitée si la communauté
international e et les Juifs d'Israël voulaient bien manifester plus de compréhension à
l'égard du point de vue arabe."
Le lendemain de ses rencontres avec les représentants arabes et juifs, le
Comte Bernadotte adressa son rapport au Secrétaire général de l' O.N.U. Le surlendemain,
soit avant même que son rapport ne fût parvenu au Secrétaire général,
le Comte Bernadotte fut assassiné.
"Ce serait se laisser aller à une dangereuse illusion que de vouloir instituer
d’un jour à l 'autre un Etat "d'Israël" sans tenir compte de la raison d'Etat , telle
que l'entend la politique moderne des nations."
Les Nations Unies ont omis le devoir impérieux d'applique r sur cet Etat le
régime du mandat international pour déterminer le système fonctionnel de
l'Etat et pour mesurer la compétence de son pouvoir public et sa conduite dans
la société étatique.
Le problème qui subsiste est de savoir comment les Nations Unies voudront
sortir de l'impasse difficile dans laquelle se trouve la Palestine, sa population
dispersée et sa terre spoliée.
Dans le rapport qu'il a présenté au Conseil de Sécurité le 16 mai 1967, le
Secrétaire général de VO.N.U n'a pas caché l'extrême difficulté de la situation
de l ' O.N.U , depuis dix-huit ans, pour le maintien d'une paix au Proche-Orient.
" Dans cette tâche, disait - il, l 'Organisation s'est heurtée à un grand nombre
d'échecs, de déceptions, de crises, de conflits et même à la guerre. Mais l'effort
se poursuit sans relâche; nous faisons maintenant face à une situation nouvelle
et menaçante; mais je reste convaincu qu'avec la coopération de toutes les parties
intéressées, l ' O.N.U  , et en particulier le Conseil de Sécurité, doivent continuer
 à chercher et finalement trouver des solution  raisonnables , pacifiques et
justes. "
Décidément l'autorité internationale s'est déclarée aujourd'hui plus que jamais
en état de crise, de défaillance morale.
L'ultime assaut semble donné à l'édifice de l'autorité et de la justice internationale.
Israël en profite pour abuser des décisions de l'O.N.U. La gloire et la
splendeur de la victoire, d'être assis parmi les nations lui semblent suffisantes
pour étendre son autorité en Palestine ainsi qu'en territoire occupé.
Il lui importe peu de se voir considéré comme n'étant pas associé aux résolutions
de la communauté internationale, ou d'être blâmé par elle. Le but à attendre
est le seul souci qui lui cause des embarras.
Qualifié de pacifiste lors de son admission à l'O-N.U., peu de temps après
Israël s'est vu condamné par des actes graves d'accusation pour agressions violentes.

Admission d'Israël à l'O.N.U.
La première résolution des Nations Unies fut donc la Résolution de partage
de la Palestine. Mais, entre cette Résolution et celle du 11 mai 1949, par laquelle
l'Etat d'Israël fut admis comme Etat membre de PO.N.U., les troupes sionistes
s'emparent de territoires de la zone attribuée aux Arabes. Le territoire qui était
accordé à l'Etat d'Israël par la Résolution de partage (57 %) s'élargit à près de
80 % de la Palestine sans compter que 770 000 Palestiniens en furent chassés.
Ce que l'Etat d'Israël contrôle actuellement fut conquis durant les autres guerres
(1956, 1967, 1973, 1982). Pour atteindre ses objectifs, l'Etat sioniste instituera
un véritable terrorisme d'Etat que nous développerons ultérieurement.
L'ironie du sort a voulu qu'Israël fut admis comme Etat membre de l'O.N.U.
alors qu'il avait déjà violé les clauses stipulées comme conditions de cette admission.
En effet, la Résolution 273 (III) de l'Assemblée générale, fait unique dans
les annales des Nations Unies, précise ce qui suit :
Ayant reçu le rapport du Conseil de sécurité relatif à la demande d'admission
d'Israël à l'Organisation des Nations Unies,
Notant que, de l'avis du Conseil de sécurité, Israël est un Etat pacifique,
capable de remplir les obligations de la Charte et disposé à le faire,
Notant que le Conseil de sécurité a recommandé à l'Assemblée générale
d'admettre Israël à l'Organisation des Nations Unies,
Prenant acte, enoutre.de la déclaration par laquelle l'Etat d'Israël "accepte
sans réserve aucune les obligations découlant de la Charte des Nations Unies
et s'engage à les observer du jour où il deviendra Membre des Nations Unies,
Rappelant ses Résolutions du 29 novembre 1947 et du 11 décembre 1948,
et prenant acte des déclarations faites et des explications fournies devant la
Commission politique spéciale par le représentant d'Israël en ce qui concerne
la mise en oeuvre des dites Résolutions,
L’Assemblée générale,
Remplissant les fonctions qui lui incombent aux termes de l'Article 4 de la
Charte et de l'Article 125 de son règlement intérieur,
1. Décide qu'Israël est un Etat pacifique qui accepte les obligations de la
Charte, qui est capable de remplir les dites obligations et disposé à le faire;
2. Décide d'admettre Israël à l'Organisation des Nations Unies.
Deux cent septième séance plénière,
le 11 mai 1949 .

Il ressort de cette Résolution qu'Israël remplit les deux conditions essentielles
à son admission comme membre de l'O.N.U., à savoir qu'il est un Etat pacifique
et qu'il s'engage à respecter la Charte des Nations Unies.
Or, certains faits le prouvent, Israël n'a jamais été un Etat pacifique et n'a
jamais observé la Charte des Nations Unies, ni avant ni après son admission.
Faudrait-il s'en étonner ! N'avons-nous pas évoqué les manoeuvres exercées
au sein de l'O.N.U. pour faire pression sur ses membres lors du vote de la Résolution
de partage ? Mais, ce qui est encore plus grave, c'est que paradoxalement
l'O.N.U. a violé sa propre Charte en refusant aux Arabes qui constituaient les
2/3 de la population le droit de décider de leur propre sort.
Beaucoup plus grave est le fait que l'Etat sioniste jouit d'une impunité totale
en raison des appuis internationaux, et se considère comme un Etat pas comme
les autres. L'analyse de cette réalité permettra de dégager le danger que constitue
cet Etat pour la paix et la sécurité mondiales.

Israël, un Etat pas comme les autres
"Un Etat pas comme les autres"; l'Etat sioniste d'Israël apparaît comme tel
quand on procède à une analyse systématique et approfondie de la politique
israélienne et de ses méthodes tant sur le plan intérieur qu'extérieur.

Politique intérieure : le racisme
L'auteur Roger Garaudy dit : " le racisme du sionisme politique est un système
parfaitement cohérent, qui inspire toute la législation et toute la pratique
de l'Etat d'Israël."
Il est inutile de s'attarder ici sur les méthodes de l'antisémitisme exercées par
les dirigeants sionistes depuis la naissance de ce mouvement avec Théodore Herzl
et dont le but était de créer chez les Juifs un sentiment de spécifité qui éloignerait
le grand "danger" d'assimilation des Juifs parmi les autres nations. Il s'agit
plutôt de démontrer comment le racisme du sionisme politique s'est exercé
depuis 1948 aux dépens du peuple palestinien dont il niait l'existence.
Les dirigeants sionistes cherchaient à former une majorité juive dans un pays
peuplé par une communauté arabe palestinienne autochtone. C'est pourquoi il
fallait chasser les Palestiniens et s'emparer de leurs terres. Deux séries de lois
pouvaient permettre la réalisation de cet objectif :
   celles qui dénient aux Palestiniens leur appartenance à cette terre,
   celles qui les spolient de cette terre.
Les lois qui visent à dénier aux Palestiniens leur appartenance à la terre de
Palestine sont, surtout, la loi du retour et la loi sur la nationalité.
Ben Gourion déclarait, le 5 juillet 1950, à propos de cette loi du retour que
l'Etat d'Israël " n 'est pas un Etat juif uniquement du fait que les Juifs en constituent
 la majorité, c'est un Etat pour les Juifs où qu'ils soient, et pour chaque
Juif qui le désire."(5)
Sur la loi du retour se greffe celle de la nationalité (loi 5 712 de 1952). Cette
loi précise que :
"tout individu qui, immédiatement avant la fondation de l'Etat était sujet
palestinien, et qui ne devient pas israélien en vertu de l'article 2 (celui qui
concerne les Juifs)... Ceux que désigne cette périphrase (et qui sont considérés
comme "n'ayant jamais eu de nationalité auparavant", c'est-à-dire
comme des apatrides par hérédité) doivent prouver (preuve documentaire très
souvent impossible parce que les papiers ont disparu dans la guerre et la
terreur qui ont accompagné l'instauration de l'Etat sioniste), qu'il habitait
cette terre de telle à telle époque. Sans quoi reste, pour devenir citoyen, la
voie de la "naturalisation", exigeant par exemple "une certaine connaissance
de la langue hébraïque". Après quoi, "s'il le juge utile" le ministre de l'Intérieur
accorde (ou refuse) la nationalité israélienne. En bref, en vertu de la loi
israélienne un Juif de Patagonie devient citoyen israélien à l'instant même où
il pose le pied à l'aéroport de Tel Aviv; un Palestinien, né en Palestine, de
parents palestiniens, peut être considéré comme apatride."
Ces lois, parmi tant d'autres (notamment la loi sur le droit de résidence ou le
mariage, favorisant une partie de la population devenue majoritaire par l'immigration
des Juifs et la terreur exercée contre la population autochtone, sont en
fait des lois discriminatoires.
Le sionisme politique nie aux Palestiniens non seulement leur existence et
leur appartenance à la terre de Palestine, mais aussi, par diverses manoeuvres, il
a dépossédé ces Palestiniens de leur terre, et ce en créant la légende de "la terre
sans peuple, pour un peuple sans terre".
Le 12 juin 1895 déjà, Théodore Herzl écrivait dans son journal : "... nous
devrions procéder doucement à l'expropriation de la propriété privée dans les
territoires qui nous sont assignés... "
Ce sera chose faite ! Mais, avant de rapporter le processus selon lequel cette
expropriation fut réalisée, il convient de rappeler que lors de la Déclaration de
Balfour les sionistes possédaient 2,5 % de la terre, lors de la Résolution de
partage 6,5 % et 93 % en 1982.

Le processus d'expropriation
"Le point de départ de la grande opération (d'expropriation), dit Roger
Garaudy, c'est la création en 1901 du Fonds national   juif , qui présente ce caractère
original, même par rapport aux autres colonialismes : la terre acquise par
lui ne peut être revendue ni même louée à des non-juifs.
La politique agraire des dirigeants israéliens est celle d'une spoliation méthodique
de la paysannerie arabe.
L'ordonnance foncière de 1943, sur l'expropriation d'intérêt public, est un
héritage de la période du mandat anglais. Cette loi, en soi légitime, est détournée
de son sens lorsqu'elle est appliquée de façon discriminatoire, par exemple lorsqu'en
1962 sont expropriés 500 ha. à Deir El-arad, Nabel et Be'neh, "l'intérêt
public" consistant à créer la ville de Carmiel réservée aux seuls Juifs.
Autre procédure : l'utilisation des lois d'urgence, décrétées par les Anglais
contre les Juifs et les Arabes. La loi 124 donne au Gouverneur militaire, sous
prétexte, cette fois, de "sécurité", de suspendre tous les droits des citoyens, y
compris leurs déplacements: il suffit que l'armée déclare une zone interdite
"pour raison de sécurité d'Etat", pour qu'un Arabe ne puisse se rendre sur ses
terres sans autorisation du gouverneur militaire. Si cette autorisation est refusée,
la terre est alors déclarée inculte, et le ministère de l'Agriculture peut "prendre
possession de terres non cultivées afin d'en assurer la culture".
Lorsque les Anglais promulguèrent, en 1945, cette législation férocement
colonialiste pour lutter contre le terrorisme juif, le juriste Bernard (Dov) Joseph,
protestant contre ce système de "lettres de cachet", déclara : "Serons-nous
soumis à la terreur officielle ?... Aucun citoyen n'est à l'abri d'un emprisonnement
à vie sans procès... Les pouvoirs de l'administration d'exiler n'importe qui
n'importe quand sont illimités... Il n'est pas besoin de commettre une quelconque
infraction, une décision prise dans quelque bureau suffit..." Le même Bernard
(Dov) Joseph, devenu ministre de la justice en Israël, appliquera ces mêmes lois
contre les Arabes.
J. Shapira, à propos des mêmes lois, dans le même meeting de protestation
du 7 février 1946, à Tel-Aviv ( Hapraklit, février 1946, pp. 58-64), déclarait plus
fermement encore : "L'ordre établi par cette législation est sans précédent dans
les pays civilisés. Même en Allemagne nazie il n'existait pas de pareilles lois." Le
même J. Shapira, devenu Procureur général de l'Etat d'Israël, puis ministre de la
Justice, appliquera ces mêmes lois contre les Arabes. Car, pour justifier le maintien
de ces lois de terreur, l'état d'urgence n'a jamais été abrogé, depuis 1948,
dans l'Etat d'Israël.
Shimon Pérès écrivait, dans le journal Davar du 25 janvier 1972 : "L'utilisation
de la loi 125, sur laquelle le gouvernement militaire est fondé, est en continuation
directe de la lutte pour l'implantation juive et l'immigration juive."
L'ordonnance sur la culture des terres en friche, de 1948, amendée en 1949,
va dans le même sens, mais par une voie plus directe : sans même chercher le
prétexte de "l'utilité publique" ou de la "sécurité militaire", le ministre de
l'Agriculture peut réquisitionner toute terre abandonnée. Or l'exode massif des
populations arabes sous la terreur, du genre de Deir Yassin en 1948, de Kafr
Kassem le 29 octobre 1956, ou des "pogroms" de "l'unité 101", créée par
Moshé Dayan et longtemps commandée par Ariel Sharon, a ainsi "libéré" de
vastes territoires, vidés de leurs propriétaires ou travailleurs arabes, et donnés aux
occupants juifs.
Le mécanisme de la dépossession des fellahs est complété par l'ordonnance
du 30 juin 1948, l'arrêté d'urgence du 15 novembre 1948 sur les propriétés des
"absents", la loi relative aux terres des "absents" (14 mars 1950), la loi sur
l'acquisition des terres (13 mars 1953), et tout un arsenal de mesures tendant à
légaliser le vol en contraignant les Arabes à quitter leur terre pour y installer des
colonies juives, comme le montre Natham Weinstock dans son livre : Le sionisme
contre Israël.
Pour effacer jusqu'au souvenir de l'existence de la population agricole palestinienne,
et accréditer le mythe du "pays désert", les villages arabes furent détruits,
avec leurs maisons, leurs clôtures et même leurs cimetières et leurs tombes.
Le Professeur Israël Shalak a donné, en 1975, district par district, la liste de 385
villages arabes détruits, passés au bulldozer, sur 475 existants en 1948.
Les colonies israéliennes continent à s'implanter, avec un regain depuis 1979,
en Cisjordanie, et, toujours selon la plus classique tradition colonialiste, les colons
ont été armés.
Le résultat global est le suivant : après avoir chassé un million et demi de Palestiniens,
la "terre juive", comme disent les gens du Fonds national juif , 6,5 %en
1947, représente aujourd'hui plus de 93 % de la Palestine (dont 75 % à l'Etat et
14 % au Fonds national)." (6)
Devant cet état de fait, devant ce racisme d'Etat, Mme Shulamit Aloni, député
à la Knesset et dirigeant en Israël du Mouvement pour les Droits civiques, écrivait
le 25 juin 1978 dans le journal israélien Yediot Aharonot  "Tout se passe
comme si on cherchait à faire pénétrer dans l'esprit des Juifs d'Israël l'idée qu'il
existe une différence qualitative et normative entre les Juifs et les non-Juifs...
Tel est le principe qui inspire toutes les lois et réglementations de l'Etat en ce
qui concerne la politique intérieure, le statut des personnes et des familles, les
critères de citoyenneté... C'est ce principe qui dicte notre conduite à l'égard des
Israéliens arabes, des Bédouins et des habitants de la rive occidentale et de Gaza,
et notre façon de répondre à leurs aspirations..."
Si la politique de l'Etat sioniste d'Israël se caractérise par un racisme institutionnel,
la politique extérieure, quant à elle, se caractérise par un expansionnisme
perpétuel.

La politique extérieure de l'Etat sioniste d'Israël
Cet expansionnisme revêt deux formes : le grignotage progressif du territoire
arabe et la désintégration des Etats arabes voisins.
Il serait fastidieux d'énumérer, une fois de plus, les guerres menées par Israël
depuis 1947 et de répéter les circonstances de leur déclenchement. Il s'agit par
contre de démontrer comment toutes ces guerres découlent d'une logique interne
au sionisme politique, à savoir l'expansionnisme.
Deux textes, l'un de Ben Gourion, l'autre de Moshe Sharett, ancien premier
ministre d'Israël, nous éclairent parfaitement sur ce projet expansionniste.
A la date du 21 mai 1948, Ben Gourion, premier ministre, écrivait dans son
journal :
"Le talon d'Achille de la coalition arabe, c'est le Liban. La suprématie
musulmane dans ce pays est artificielle et peut aisément être renversée, un
Etat chrétien doit être instauré dans ce pays. Sa frontière sud serait la rivière
du Litani. Nous signerons un traité d'alliance avec cet Etat. Puis, lorsque nous
aurons brisé la force de la Légion arabe et bombardé Amman, nous balaierons
la TransJordanie, après quoi la Syrie tombera. Et si l'Egypte osait encore nous
faire la guerre, nous bombarderions Port-Saïd, Alexandrie et Le Caire... Nous
terminerions ainsi la guerre, et nous aurions vengé nos ancêtres contre l'Egypte,
l'Assyrie et la Chaldée."(7)
Le deuxième texte est tiré du journal de Moshé Sharett, ancien premier ministre
de l'Etat d'Israël à la date du 16 juin 1955 ; il se réfère à un projet établi par
Moshé Dayan sur la manière, pour l'Etat sioniste, d'entrer au Liban. D'après ce
projet :
"... la seule chose nécessaire était de trouver un officier, un commandant
suffirait. Ou bien nous parviendrons à le convaincre, ou bien nous l'achèterons
avec de l'argent, pour qu'il accepte de se déclarer le sauveur de la population
maronite (chrétienne). Alors l'armée israélienne entrera au Liban, occupera lé
territoire nécessaire, et créera un régime chrétien qui sera l'allié d'Israël. Le
territoire au sud du Litani sera totalement annexé à Israël."
Quelques jours plus tard, Sharett note :
"Le chef d'état-major approuve l'idée d'acheter un officier (libanais) qui
accepterait de nous servir de marionnette de manière à ce que l'armée israélienne
puisse apparaître comme répondant à un appel pour libérer le Liban de
ses oppresseurs musulmans."(8)
Les choses ne s'arrêtent pas à ce stade. Nous sommes en droit de nous interroger
jusqu'où ira l'expansionnisme d'Israël qui n'a pas, jusqu'à ce jour, fixé ses
frontières. A ce propos une question a été posée au premier ministre de l'époque,
le 7 juillet 1968 :
" Quel territoire considérez-vous nécessaire à votre sécurité ? "
Golda Meier avait répondu :
"- Si vous voulez dire que nous devrions tracer une ligne, cela nous ne l'avons
pas fait. Nous le ferons quand il le faudra . Mais l'un des points fondamentaux de
la politique d'Israël est que les frontières du 4 juin 1967 ne peuvent être rétablies
dans le traité de paix. Il doit y avoir des changements à la frontière, à toutes nos
frontières, pour notre sécurité. "(9 )
Les perspectives ne sont guère optimistes car, après l'invasion du Liban, Ariel
Sharon déclarera à la journaliste italienne Oriana Fallaci : "Nous n'avons fait
encore qu'une petite partie du travail."(1 0)
Ce qui confirme une phrase prononcée par le professeur Leibowitz dans une
conférence de presse tenue le 14 juin 1982 : " Le but de cette guerre est de
 préparer la suivante".
Mais il y a pire encore ! Le projet sioniste ne tient pas seulement au grignotage
progressif des territoires des Etats voisins. Il y a surtout le projet de déstabilisation
et de désintégration de ces Etats.
Le projet de désintégration des Etats voisins se trouve détaillé dans un article
de la revue Kivounim  publiée par l'Organisation Sioniste Mondiale . Il s'agit,
dans cet article, de la stratégie d'Israël pour les années quatre-vingt.
En voici les extraits les plus significatifs :
"La reconquête du Sinaï, avec ses ressources actuelles, est un objectif prioritaire,
que les accords de Camp David et les accords de paix empêchaient jusqu'ici
d'atteindre... Privés de pétrole et des revenus qui en découlent, condamnés
à d'énormes dépenses en ce domaine, il nous faut impérativement agir pour retrouver
la situation qui prévalait dans le Sinaï avant la visite de Sadate et le malheureux
accord signé avec lui en 1979.
La situation économique de l'Egypte, la nature de son régime, et sa politique
panarabe, vont déboucher sur une conjoncture telle qu'Israël devra intervenir...
L'Egypte, du fait de ses conflits internes, ne représente plus pour nous un
problème stratégique, et il serait possible, en moins de 24 heures, de la faire
revenir à l'état où elle se trouvait après la guerre de juin 1967. Le mythe de
l'Egypte "leader du monde arabe" est bien mort... et, face à Israël et au reste
du monde arabe, elle a perdu 50 % de sa puissance. A court terme, elle pourra
tirer avantage de la restitution du Sinaï, mais cela ne changera pas fondamenta-
lement le rapport de force. En tant que corps centralisé, l'Egypte est déjà un
cadavre, surtout si l'on tient compte de l'affrontement de plus en plus dur entre
Musulmans et Chrétiens. Sa division en provinces géographiques distinctes doit
être notre objectif politique pour les années 1990, sur le front occidental.
Une fois l'Egypte ainsi disloquée et privée de pouvoir central, des pays comme
la Libye, le Soudan et d'autres plus éloignés, connaîtront la même dissolution.
La formation d'un Etat copte en Haute-Egypte, et celle de petites entités régionales
de faible importance, est la clef d'un développement historique actuellement
retardé par l'accord de paix, mais inéluctable à long terme.
En dépit des apparences, le front Ouest présente moins de problèmes que
celui de l'Est. La partition du Liban en cinq provinces... préfigure ce qui se passera
dans l'ensemble du monde arabe. L'éclatement de la Syrie et de l'Irak en
régions déterminées sur la base de critères ethniques ou religieux, doit être, à
long terme, un but prioritaire pour Israël, la première étape étant la destruction
de la puissance militaire de ces Etats.
Les structures ethniques de la Syrie l'exposent à un démantèlement qui pourrait
aboutir à la création d'un Etat chiite le long de la côte, d'un Etat sunnite
dans la région d'Alep, d'un autre à Damas, et d'une entité druze qui pourrait
souhaiter constituer son propre Etat — peut-être sur notre Golan — en tout cas
avec l'Houran et le nord de la Jordanie... Un tel Etat serait, à long terme, une
garantie de paix et de sécurité pour la région. C'est un objectif qui est déjà à
notre portée.
Riche en pétrole et en proie à des luttes intestines, l'Irak est dans la ligne de
mire esraélienne. Sa dissolution serait pour nous plus importante que celle de la
Syrie, car c'est lui qui représente, à court terme, la plus sérieuse menace pour
Israël. Une guerre syro-irakienne favoriserait son effondrement de l'intérieur,
avant qu'il ne soit en mesure de se lancer dans un conflit d'envergure contre nous.
Toute forme de confrontation inter-arabe nous sera utile et hâtera l'heure de son
éclatement... Il est possible que la guerre actuelle contre l'Iran précipite ce phénomène
de polarisation.
La Péninsule arabique tout entière est vouée à une dissolution du même genre,
sous des pressions internes. C'est le cas en particulier de l'Arabie Saoudite :
l'aggravation des conflits intérieurs et la chute du régime sont dans la logique de
ses structures politiques actuelles.
La Jordanie est un objectif stratégique dans l'immédiat. A long terme, elle ne
constituera plus une menace pour nous après sa dissolution, la fin du règne de
Hussein, et le transfert du pouvoir aux mains de la majorité palestinienne. C'est
à quoi doit tendre la politique israélienne. Ce changement signifiera la solution
du problème de la rive Occidentale, à forte densité de population arabe. L'émigration
de ces Arabes à l'Est — dans des conditions pacifiques ou à la suite d'une
guerre - et le gel de leur croissance économique et démographique, sont des
garanties de transformations à venir. Nous devons tout faire pour hâter ce processus.
Il faut rejeter le plan d'autonomie et tout autre qui impliquerait un compromis
ou une participation des territoires, et ferait obstacle à la séparation des deux
nations ; conditions indispensables d'une véritable coexistence pacifique.
Les Arabes israéliens (sous-entendu : Palestiniens) doivent comprendre qu'ils
ne pourront avoir de patrie qu'en Jordanie... et ne connaîtront de sécurité qu'en
reconnaissant la souveraineté juive entre la mer et le Jourdain... Il n'est plus
possible, en cette entrée dans l'ère nucléaire, d'accepter que les trois quarts de la
population juive se trouve concentrée sur un littoral surpeuplé et naturellement
exposé, et la dispersion de cette population est un impératif majeur de notre
politique intérieure, La Judée, la Samarie et la Galilée sont les seules garanties de
notre survie nationale et, si nous ne devenons pas majoritaires dans les régions
montagneuses, nous risquons de connaître le sort des Croisés, qui ont perdu ce
pays.
Rééquilibrer la région sur le plan démographique, stratégique et économique,
doit être notre principale ambition ; ceci comporte le contrêle des ressources en
eau de la région qui va de Beer-Sheba à la Haute Galilée, et qui est pratiquement
vide de Juifs aujourd'hui." (1 1)
Quand Ariel Sharon déclare au journal israélien Yediat Aharonot du 26 juillet
1973 : "Israël est maintenant une super-puissance militaire. Toutes les forces
rassemblées des pays européens sont moins grandes que les nôtres. Israël pourrait
conquérir, en une semaine, la région qui va de Khartoum à Bagdad et à l’Algérie.",
il y a de quoi être inquiet.
Considération faite de la situation géopolitique de l'Etat sioniste d'Israël, de
ses alliances (notamment avec les Etats Unis et l'Afrique du Sud, avec tout ce que
cela comporte d'aide militaire et financière) et de la lutte d'influence des grandes
puissances, il est aisé de pressentir le danger que représente un tel projet pour la
paix et la sécurité mondiale. En effet, ce projet peut être le détonateur le plus
dangereux pour une troisième guerre mondiale avec cette différence d'avec les
précédentes guerres, à savoir que beaucoup de pays, dont Israël, détiennent
l'arme nucléaire.
Etat pas comme les autres, Israël ne l'est pas uniquement au niveau du racisme
de sa politique intérieure, ni de l'expansionnisme de sa politique extérieure, mais
également au niveau des méthodes de sa politique, en faisant du terrorisme le
cheville ouvrière de l'Etat.

Méthodes de la politique de l'Etat sioniste :
le Terrorisme d'Etat
Menahim Begin écrit dans son livre, La Révolte : Histoire de l'Irgoun :
« Il n'y aurait pas d'Etat d'Israël sans la victoire de Deir Yassin », et d'ajouter
un peu plus loin : "La hagana effectuait des attaques victorieuses sur d'autres
fronts... Pris de panique, les Arabes fuyaient en criant : Deir Yassin !" (1 2)
Mais que s'est-il donc passé à Deir Yassin ?
Le 9 avril 1948, les 254 habitants du petit village de Deir Yassin furent massacrés
par les troupes de l'Irgoun que dirigeait alors Menahim Begin, actuel premier
ministre.
Plus tard, le 17 septembre 1948, le Comte Folke Bernadotte et son assistant
français, le colonel Serot, furent assassinés dans la Jérusalem occupée par les
Sionistes. Le Comte Bernadotte, médiateur nommé par les Nations Unies, eut la
malchance d'écrire un rapport où il décrit "le pillage sioniste à grande échelle et
la destruction de villages sans nécessité militaire apparente". Il y dénonce également
l'influence des immigrants juifs en Palestine alors que la population autochtone
en est chassée.(13)
En juillet 1971, Baruch Nadel, l'un des dirigeants en 1948 du Groupe Stern,
revendique l'assassinat du Comte Bernadotte.
Une fois de plus, il serait fastidieux, dans le cadre de cette étude, d'énumérer
les actes terroristes commis sous la responsabilité directe de l'Etat d'Israël. Une
esquisse des portraits de trois dirigeants actuels de cet Etat illustrerait mieux
comment le terrorisme d'Etat est devenu la méthode courante de sa politique. Il
s'agit de :
- Menahim Begin, premier ministre,
- Ariel Sharon, ex-ministre de la Défense, ministre sans portefeuille actuellement,
- Itzhak Shamir, ministre des Affaires étrangères.
Ben Gourion, dans une lettre écrite à Haim Guri en 1963, définissait Menahim
Begin comme ' 'un véritable Hitlérien "( 1 4) . Albert Einstein, évoquant le massacre de
Deir Yassin avec un groupe de personnalités juives écrivait, le 4 décembre 1948,
au Directeur du New York Times •
"Il est inconcevable que ceux qui s'opposent au facisme dans le monde,
s'ils connaissaient exactement les perspectives politiques et les activités de
Mr. Begin, prêtent leurs noms au mouvement qu'il représente et le soutiennent...
(il est le leader) d'un parti politique très proche, par son organisation,
par ses méthodes, sa philosophie politique, et par les classes auxquelles il
s'adresse, des partis nazis et fascistes. Ses membres viennent de l'ancien Irgoun
Zvai Leumi , organisation terroriste nationaliste d'extrême droite en Palestine.
"... Le comportement de Begin et de ses partisans, dans le village arabe de
Deir Yassin, est un exemple affreux de cette politique... Le 9 avril 1948, des
terroristes ont attaqué ce village tranquille, qui ne constituait aucun objectif
militaire... Ils ont massacré la quasi totalité de la population... Il faut absolument
que la vérité au sujet de Mr. Begin et de son comportement soit connue
dans ce pays... Les soussignés, en conséquence, présentent publiquement
quelques faits significatifs, concernant Mr. Begin et son parti, et demandent
instamment, à toutes les personnes concernées, de ne pas soutenir cette dernière
manifestation du fascisme."
Menahim Begin, au gouvernement duquel se trouvait aussi A. Sharon et I. Shamir,
devait endosser la responsabilité des massacres de SABRA et CHATILA en
septembre 1982.
Ariel Sharon, ex-ministre de la Défense, n'en est pas moins une figure de
proue du terrorisme d'Etat. Il commandait en effet l'unité "101 ", responsable
du massacre de Qibaya, la nuit du 14 au 15 septembre 1954. Sharon est également
responsable des massacres de Khan Younis et de Bani Suheila, sur les
rives du Tibériade, et de l'exécution de centaines de soldats égyptiens en 1947
qu'il avait refusé, sur l'ordre de Moshé Dayan, de faire prisonniers. Enfin, c'est
le même Ariel Sharon qui déclarait au journal Yediot Aharopot, le 26 mai 1974 :
"Il faut frapper, frapper sans cesse ! Il faut frapper les terroristes partout :
en Israël, dans les pays arabes et au-delà. Je sais comment on fait, je l'ai fait
moi-même. Il ne faut pas agir seulement après leurs opérations, mais tous les
jours, et partout. Si on apprend que certains se trouvent dans tel pays arabe,
ou en Europe, il faut les atteindre là... Pas en plein jour. Brusquement quelqu'un
disparaît... Ou bien on le trouve mort... Ailleurs quelqu'un est poignardé
dans un night-club européen..."
Enfin, quant à Itshak Shamir, actuel ministre des Affaires étrangères, il était
l'un des trois dirigeants du "Groupe Stern" (Lehi ou Etzel). Cette organisation
proposait, en janvier 1941, un plan d'Alliance entre un éventuel Etat juif qui
rassemblerait tous les juifs expulsés d'Europe et d'Allemagne hitlérienne. Ce plan
est détaillé par l'historien allemand Klaux Polkhen, et se trouve cité par le professeur
Shahak, écrivain israélien, dans Za Haderech du 2 septembre 1981.
A signaler au passage qu'en plus de l'assassinat du Comte Bernadotte (Cf. supra),
le groupe Stem de Shamir est responsable également de l'assassinat de
Lord Moyne, ministre d'Etat anglais pour le Moyen-Orient, en novembre 1944.
Ce terrorisme n'est pas exclusif de l'équipe actuellement au pouvoir. Car
le terrorisme d'Etat est dans la logique du sionisme politique et ce que Sharon
ou Begin font ou disent, les travaillistes le font et le disent également.
"Résumant les résultats de l'enquête sur l'assassinat, à Rome, le 16 octobre
1972, de Waël Zu'aiter, représentant, en Italie, de l'O.L.P., la Cour d'Assises de
Rome, en novembre 1981, dans les considérants de son verdict, explique qu'elle
ne peut condamner un homme, car il s'agit d'une affaire politique qui n'est pas
de sa compétence : "Ce crime est le fait d'une politique préméditée... conduite
méthodiquement, et avec une efficacité toute militaire , par une organisation
appartenant à l’ Etat d'Israël. "
Rappelant que l'élimination physique de six Palestiniens, d'octobre 1972 à
juillet 1973, "... a été précédée de déclarations officielles et non officielles de
dirigeants israéliens déclarant une guerre sans merci contre la résistance palestinienne
 et ses représentants, partout, à tout moment, et par tous les moyens
possibles", le tribunal considère que ces crimes "doivent être imputés aux services
secrets israéliens, et en particulier à une section de ces services qui est mobilisée
et entretient des contacts à l'échelle mondiale. ..
Au moment de l'assassinat de Waél Zu'aiter, le Premier ministre "socialiste"
d'alors, Madame Golda Meier, tenait des propos semblables à ceux d'Ariel Sharon.
Lorsqu'on l'interpellait, à la Knesset, le 18 octobre, quarante huit heures après
le meurtre, elle répondait : « Tout ce que je sais, c'est que les balles ont vraiment
atteint leur cible“ .
Qui a fait les lois racistes sur le retour ? Qui a organisé la spoliation systématique
des terres ? Qui en a expulsé ceux qui les travaillaient ? Qui a fait l'agression
de Suez ? (préparée à Paris par Moshé Dayan et Shimon Pérès) Et l'agression
de 67 ? L'on retrouverait toujours les mêmes noms : Ben Gourion, Moshé Dayan,
Golda Meier, Shimon Pérès, tous les gens qui ont appartenu au parti de l'actuelle
"opposition". L'agression du Liban par Begin et sa bande n'est qu'un chapitre de
plus de la même histoire, obéissant à la même logique. Cela est si vrai que, lorsque,
lorsque Begin veut expliquer aux Américains son opération, il songe aussitôt,
pour cette mission, à Shimon Pérès.(1 5)
De ce qui précède, des circonstances de sa création et de la politique qu'il
mène, il s'avère que l'Etat sioniste d'Israël n'a aucune légitimité, ni historique, ni
juridique, ni surtout morale. Cet Etat n'a été imposé et ne s'est imposé que par
une série de faits accomplis. Dépouillé des mythes qui ont précédé sa création
et du terrorisme d'Etat, intellectuel et physique qu'il utilise, cet Etat devrait
entrer dans le droit commun des Etats, sans auréole et sans privilège. Ainsi toute
ébauche de solution de la question palestinienne devrait commencer à ce stade, à
savoir la "démystification" de ce fait pas comme les autres, de cet Etat pas
comme les autres qu'est l'Etat d'Israël.

 
Est-ce trop demander à Israël ?
Sous les pressions sionistes dessus citées, l'O.N.U. a donc endossé
l'impardonnable responsabilité du sort jeté aux Palestiniens et de la
création de l'Etat d'Israël. Notons au passage que cet acte, la création
d'un Etat par les Nations Unies est unique en son genre depuis la fondation
de cette institution mondiale.
Paradoxalement, l'Etat juif n'est frappé d'aucune sanction, et ce
en dépit de ses violations continuelles des Principes et des Résolutions
de cet organisme même qui est à l'origine de sa création. Mieux encore,
Israël tire son arrogance de l'appui inconditionnel et déclaré des
U.S.A. et son intransigeance de sa supériorité militaire pour fouler aux
pieds les droits humanitaires les plus élémentaires, les massacres de
Deir Yassin, de Sabra et Chatila, pour ne citer que ces exactions, en
sont des témoignagnes indélébiles.
De nos jours, l'Etat hébreu refuse avec acharnement l'idée de l'établissement
d'un Etat palestinien, en dépit du consensus international
écrasant qui s'est manifesté en faveur de la requête palestinienne. Parallèlement
à ce consensus, Israël a marqué de plus en plus son intention
ferme de conserver son occupation de tout territoire acquis par les
armes. Récemment encore, l'Etat hébreu a continué d'arrêter et d'expulser
des Palestiniens, d'exproprier ou de confisquer des terres palestiniennes,
pour y établir des colonies de peuplement, tant civiles que
militaires, prétextant, comme pour chacune de ses agressions, des
raisons de sécurité.
C'est ainsi qu'au nom de la sécurité il bombarde Bagdad. Qu'il
considère le Liban comme une chasse gardée pour ses troupes et son
aviation. Qu'il garde son emprise sur la Cisjordanie et Gaza. Et qu'il
se révolte à la moindre réaction de ses amis, fût-elle douce, qui pourrait
le contrarier dans ses ambitions. Mieux encore, il voudrait rester
sans frontières limitées jusqu'au jour de la réalisation du Grand Israël
(voir carte, page précédente).

Le Professeur Arnold Tonynbee (historien anglais) a décrit en 1968
le sort palestinien dans les termes suivants ; la tragédie palestinienne
n'est pas seulement une tragédie locale. C'est une tragédie qui concerne
le monde entier parce que c'est une injustice qui menace la paix
mondiale.
Face à ce sort jeté, face à cette tragédie, les Palestiniens pourtant
ne demandent qu'à s'auto-déterminer librement, et avoir, enfin, une
patrie et un passeport.
Est-ce trop demander à Israël ?

Renvois bibliographiques
1. Roger GARAUDY, L'Affaire Israël, le Sionisme Politique, S.P.A.C.
Papyrus, Paris 1983.
2. Commission "King-Crane", édition de 1963.
3. Raafat CHAMBOUR, L a Responsabilité de l 'Occident devant le danger de
guerre, Ed. Méditerranéennes, Montreux, 1970.
4. Roger GARAUDY, op. cit., p. 112.
5. cité dans: Claude KLEIN, Le Caractère juif de l'Etat d'Israël, Ed. Cujas,
Paris, 1977,
6. Roger GARAUDY, op. cit., p. 129-132.
Cf. également le livre de Henri CATTAN, A qui donc appartient la Palestine ? Série des Monographies, No 8, Ed. The Institute for Palestine
Studies, Beirut, 1967.
7. cité par Michael BAR-ZOHAR dans Le Prophète armé, biographie de Ben
Gourion, p. 139.
8. Moshé SHARETT, Journal en date du 16 juin 1955, p. 996.
9. MAARIU, 7 juillet 1968.
10. Le Magazine EUROPEA de Milan, du 281 août 1982.
11. La revue KIVOUNIM, de Jérusalem, No 14, de février 1982.
12. Menahim BEGIN, La Révolte : Histoire de l'Irgoun, Ed. anglaise, p. 162 et
Ed. française, p. 200.
13. U.N.Document, A 648, du 16 septembre 1948.
14. citée dans ISRAELEFT, No 108, du 15 juin 1977.
15. Roger GARAUDY, op. cit., p. 191 et 192.