Rendre au capitalisme et à ses philosophies ce qui leur appartient
La désintégration des peuples, des économies et des cultures devenait ainsi le lot des pays «intégrés»... aux empires.
L'intégrisme islamique auquel le philosophe consacre la plus grande partie de son livre ne serait-il alors que la juste réponse de la bergère violée au tortionnaire arrogant et dominateur? Oui, si l'oppression tend toujours à nourrir en retour les réactions de défense et la recherche d'une tradition qui se figera d'autant que ses sources vivantes auront été taries et détruites. Non si, comme le montre aussi l'auteur, l'intégrisme islamique actuel trouve l'un de ses foyers les plus actifs en Arabie Saoudite, pays étroitement lié aux intérêts occidentaux et américains où l'usage le plus étroit et le plus dogmatique de quelques textes de l'islam, coupés de leur contexte, vient justifier à point la domination des plus riches. On coupe dans ce pays la main des voleurs misérables, mais les émirs et leur famille enfreignent en permanence la loi coranique dans leurs dilapidations financières et leur train de vie luxueux.
L'intégrisme islamique devenant alors, au-delà des apparences, l'un des instruments de domination de l'impérialisme sur les peuples... musulmans.
Réhabiliter le message de tolérance et de justice de l'islam
Reste que l'on peut s'interroger sur l'extension du concept d'intégrisme telle que la pratique l'auteur, notamment quand il l'applique au stalinisme. S'il est certainement pertinent de repérer dans certaines interprétations du marxisme les traces du positivisme et ses effets réducteurs, l'ampleur de la tragédie stalinienne ne peut se réduire à un «contresens philosophique». Plus qu'un intégrisme marxiste elle est un antimarxisme en actes, la systématisation d'une pratique fondée sur la négation de la démocratie.
Sur le fond, comment ne pas souscrire a cette conclusion: «L'on ne peut échapper à ces fausses réponses des intégrismes qu'en éveillant les hommes au sens des vraies questions.» Au titre de celles-ci, la construction d' un ordre social et économique permettant à chacun de déployer les richesses qu'il porte en lui, l'intégrisme exprimant selon Roger Garaudy «une frustration devant la solitude et le non sens d'un monde sans but».
Maurice Ulrich dans "l'Humanité"