Jean Lhomme
Revue économique, volume 10, n°5, 1959.
pp. 803-804
Garaudy (Roger) – « Humanisme
marxiste. Cinq essais polémiques ». Paris , Editions
sociales, 1957
« Pourquoi je
suis marxiste » est la question laquelle répond une brève introduction de
l’auteur. Itinéraire intellectuel qu’il est instructif de connaître plus un
titre. « Le chemin de la liberté passait par la dictature du prolétariat.
Et mon adhésion au parti de la classe ouvrière était le commencement de ma
liberté » (p 13). Ainsi s’explique que, délibérément, les cinq essais
qui nous sont présentés soient qualifiés par leur auteur de
« polémiques ». Polémique en effet contre le R.P Bigo dans le premier
essai consacré aliénation ; contre
le R.P Calvez dans le deuxième consacré la dialectique de la nature et au
matérialisme (R.G est visiblement fort
agacé - cf pp 106 et suiv- de voir tellement de religieux écrire et publier sur
le marxisme et dans un sens qui bien entendu ne lui agrée pas toujours) ;
contre J.-P Sartre dans le troisième essai sur la dialectique et la liberté. C’est
dans ce dernier texte que nous semble apparaître, par delà des controverses
souvent circonstancielles, l’effort constructif le plus original, celui qui est
relatif la conception bourgeoise de la liberté : les pages 205 à 212
précisent très exactement les critiques que le marxisme oppose à une pareille
conception. Les pages qui suivent (212 sqq.) retracent dans le même esprit
évolution du libéralisme jusqu’à notre époque. Et sans adhérer le moins du
monde au marxisme on peut bien reconnaître combien l’ambivalence des termes
liberté, libéraux, libéralisme a servi des desseins fort peu désintéressés.
L’essai intitulé « Des
Intellectuels » étudie successivement la situation de ces derniers (classification
en trois groupes pp 238-239), puis les problèmes qui se posent eux. On ne peut
manquer d’évoquer ici les pages que Schumpeter consacrées à ces mêmes
intellectuels : décidément que on soit marxiste ou schumpeterien les
intellectuels ne sont pas faciles interpréter !
R.G résume ainsi p 282 leur attitude : « La position de parti n’est
qu’un autre nom de leur volonté d’enraciner leurs créations dans les deux
grandes forces avenir de notre époque : la classe ouvrière en lutte pour
le socialisme et la méthode scientifique du matérialisme historique toute-
puissante parce elle est vraie ».
Quant au dernier essai efforce définir un « parti ouvrier révolutionnaire ».
De tous c’est le plus politique, celui qui souligne le mieux la relation entre
classe (sociale) et parti (politique).
Ouvrage au total instructif une évidente
sincérité et que on rangera parmi ceux qui précisent avec le plus de netteté
les attitudes actuelles du marxisme sur plusieurs problèmes Importants.
Jean LHOMME