Les dernières lignes d'un texte écrit en 1985 par Roger GARAUDY pour un Colloque sur "AL-GHAZALI et IBN MAIMOUN, trait d'union entre l'orient et l'Ocident" organisé à AGADIR dans le cadre de la session 1985 de l'ACADEMIE DU ROYAUME DU MAROC
Extrait de: Religion et politique chez Ghazali et Maïmonide http://fr.calameo.com/read/0010437622294ba1c72fc (document interne de l'Académie du Royaume du Maroc)
Réapprendre à lire la Bible et le Coran, non
pas avec les yeux des morts, à travers une sédimentation millénaire de
théologies et de commentaires portant tous la marque des siècles où ils furent
conçus, mais à les lire comme une interpellation vivante à des hommes
d'aujourd'hui, nous permettant, à la lumière du message éternel, de déchiffrer
les "signes des temps" et de répondre aux défis de notre époque.
Pour y parvenir, nous serons obligés de
renoncer aux littéralismes desséchants qui tuent l'intériorité de la foi et qui
perpétuent les dominations par cette "religion pour le peuple"y comme disait Voltaire au
temps des régimes "de droit divin", par cet "opium du
peuple", comme disait Marx dans l'Europe de la Sainte Alliance. Alors nous
retrouverons la voie royale, jalonnée par les grandes oeuvres de Ghazali
donnant, grâce à l'expérience de la foi vécue des soufis authentiques, les
principes de l'interpellation symbolique, et de Maimonide formulant les lois de
la lecture allégorique des textes sacrés pour y trouver une réponse de
l'Eternel aux problèmes toujours nouveaux de notre histoire.
Ainsi nous retrouverons le sens premier et
dernier de la foi divine, de la shari'a, c'est à dire d'une législation ne
faisant pas abstraction de la dimension transcendante de l'homme, et de ses
valeurs absolues, pour sortir de la jungle des sociétés occidentales
désacralisées, en finir avec des législations héritées du colonialisme, pour
rompre avec les modèles purement quantitatifs et déshumanisés des sociétés
dites de croissance, comme avec leurs "équilibres de la terreur",
sans pour autant céder aux nostalgies d'un
passé dépassé, et aux repliements sur un
littéralisme mortel.
Alors la shari'a, dont l'étymologie même
signifie le "chemin vers la source", sera non pas un retour au passé,
mais une redécouverte du jaillissement des sources: la shari'a ce n'est pas
couper des mains, comme si la défense de la propriété était une valeur
islamique plus sacrée que la justice sociale.
La shari'a, pour les individus comme pour les
Etats, c'est vivre vingt quatre heures par jour dans la transparence de Dieu.
Roger GARAUDY
Novembre 1985
Novembre 1985
Extrait de: Religion et politique chez Ghazali et Maïmonide http://fr.calameo.com/read/0010437622294ba1c72fc (document interne de l'Académie du Royaume du Maroc)