[Un lecteur du blog décortique un des livres les plus "anti-évangéliques" de la Bible. Merci à lui. AR]
Selon l'école critico-historique, aucune information vérifiable du récit ne trouve confirmation dans les données disponibles
(6)Bible Segond livre de Daniel ch.1 :"La
troisième année du règne de Jojakim, roi
de Juda, Nebudcadnetsar, roi de Babylone, marcha contre Jérusalem et
l'assiégea. Le Seigneur livra entre ses mains Jojakim, roi de Juda.....Le roi
donna ordre à Aschpenaz, chef de ses eunuques, d'amener quelques uns des
enfants d'Israël de race royale ou de famille noble, de jeunes garçons sans
défaut corporel, beaux de figure, doués de sagesse, d'intelligence, et
d'instruction, capables de servir dans le palais du roi et à qui l'on
enseignerait les lettres et la langue de Chaldéens"
© Droits réservés. Reproduction interdite sans autorisation de l'auteur
Dans le Canon juif le livre
d'Esther fait partie des Hagiographes. C'est un des cinq Meguilloth ou rouleaux
des jours de fête. Il est même appelé quelquefois la Meguilla, le rouleau par
excellence; car, à cause de son contenu, il jouit d'une très grande
considération chez les Juifs, dont il flatte l'orgueil national. Ils ne se sont
pas lassés de le copier, et quand, dans un musée, on voit un beau manuscrit
hébreu, on peut immédiatement supposer que c'est une paraphrase (targoum)
d'Esther. Maïmonides, au XIIe siècle, disait qu'à l'avènement du Messie tous
les livres saints seraient abolis, sauf la Loi et Esther qui, avec la
Tradition, demeureraient impérissable
Ce livre nous raconte l'histoire
d'un roi, Assuérus, qui régnait sur l'empire perse. De caractère colérique,
versatile, à la suite d'un épisode que l'on pourrait qualifier de « scène
de ménage », il renvoie la reine en titre et se met en recherche d'une
nouvelle reine. Ce sera Esther, d'origine juive qui sera choisie. Le grand
vizir de la cour, Haman, vexé dans son orgueil par l'attitude de l'oncle
d'Esther, Mardochée, qui refuse de se courber devant lui, décide et obtient du
roi, un décret d'anéantissement de la communauté juive dans l'ensemble du
royaume qui comprenait 127 provinces. La reine intervient et usant de son
charme, réussit à empêcher l'accomplissement de l'ordre de génocide. Bien plus,
c'est la communauté juive qui massacre tous ses ennemis (75 800 morts, dont
le grand vizir et ses dix fils, tous
pendus au gibet). Cet événement a donné lieu à une fête, dite des Pourim, un
genre de carnaval, encore fêtée aujourd'hui par la communauté juive.
Marc
Le caractère historique du livre d'Esther a été assez
vivement contesté
Il n'est pas difficile, il est
vrai, d'identifier le roi Assuérus (Ahaschvérosch) avec l'un des souverains les
plus connus de la Perse, c'est-à-dire avec Xerxès premier, et non pas, comme le
voulaient les Septante, avec Artaxerxès Longuemain. Il faut reconnaître également
que les mœurs de l'Orient sont très fidèlement reproduites. Ce monarque absolu
qui ne connaît d'autre règle que son caprice et qui, cependant, se trouve lié
par l'édit qu'il a rendu, qui fait en un instant passer son favori de la toute
puissance au gibet, pour le remplacer par un autre favori auquel il témoigne
d'emblée une confiance illimitée, c'est bien le roi de Perse. L'histoire
profane rapporte de Xerxès maints traits analogues. Cependant notre récit
présente plusieurs difficultés historiques. Nous allons énumérer quelques-unes
des objections qui ont été faites. On ne trouve chez les historiens profanes
nulle mention d'Esther. La favorite Amestris d'Hérodote (IX.108) ne peut être
identifiée avec elle. Nulle trace non plus de Mardochée. En outre, on
s'explique difficilement la douleur de la ville de Suse lors de la publication
du premier édit, et surtout sa joie lors de l'élévation de Mardochée . On se
demande aussi comment les Juifs, prévenus onze mois à l'avance qu'ils devaient
être massacrés, n'ont pas songé à fuir. Enfin, si en général on admire la
finesse et le délié de la narration, plusieurs interprètes trouvent suspecte la
manière même en laquelle, dans ces dix chapitres, tout s'enchaîne, s'adapte
exactement, arrive à point nommé, les plus noirs nuages se dissipant comme par
enchantement à l'heure favorable. De pareilles péripéties, dit-on, s'inventent
et ne se présentent guère dans la pratique.
Voilà pourquoi plusieurs ont
admis que la légende a pénétré dans notre livre et que, tel que nous le
possédons, il n'est pas exempt des exagérations et des erreurs qui se mêlent
volontiers à la tradition orale.
Le caractère moral du livre a été plus contesté encore
que son caractère historique.
Que ce livre soit éminemment
juif; qu'il nous montre d'une manière frappante, d'une part, la souplesse du
juif Mardochée, qui sait s'insinuer jusque dans la cour du palais royal, qui
découvre une conspiration, qui cache sa nationalité; d'autre part,
l'inébranlable fermeté de ce même Juif, son intransigeance, son refus
absolu de courber la tête devant le favori, dût-il lui en coûter la vie, il n'y
a rien là qui puisse scandaliser. De même, que ce peuple soit récompensé par le
ciel de sa fidélité, qu'il passe subitement de l'extrême angoisse à la jubilation
du triomphe; que ses ennemis soient atteints par un sévère châtiment au jour
même qui avait été désigné pour leur victoire, cela n'est point pour nous
surprendre, puisque toute l'histoire est là pour prouver que les antisémites ne
peuvent jamais compter que sur des succès momentanés. Mais ce qui étonne à
première vue, c'est d'abord l'égorgement de 75 000 personnes par les Juifs et,
plus encore, la persistance avec laquelle Esther poursuit dans la capitale les
ennemis de son peuple, demandant un second jour de massacre qui coûte encore la
vie à 300 personnes, en plus des 500 du premier jour..
Voilà pourquoi, de tout temps,
des voix très autorisées se sont élevées contre la présence dans le Canon d'un
livre qui, au surplus, n'est jamais cité dans le Nouveau Testament. L'Église
d'Orient (Méliton de Sardes, Athanase, Grégoire de Naziance) a exprimé très
anciennement des scrupules à cet égard. En pleine Réformation, Luther a
déclaré que ce livre méritait plus que tout autre d'être retranché du Canon et rangé
parmi les Apocryphes. (1)
Un récit qui
interpelle le lecteur
Malgré les événements dramatiques et le danger
de génocide qui menace la communauté juive de l'Empire perse, nulle part
dans le cours de ce récit, mention du dieu d'Israël, Yahwe, ni de prière
collective ou individuelle, ni non plus d'actions de grâce au dieu libérateur. Et
pourtant, que d'occasions pour appeler à l'aide Yahwe ! On dirait que le
dieu d'Israël n'existe pas, que la communauté juive de tout l'empire perse l'a
oublié, on pourrait presque ajouter « déjà » quelques dizaines
d'années seulement d'exil. Deux questions viennent tout de suite à
l'esprit : Oubli volontaire, ou négligence des narrateurs ? Et si
oubli volontaire, pourquoi ?
Deux questions difficiles, dont
seuls les compilateurs pourraient nous fournir la réponse. D'emblée cependant,
il y unanimité pour reconnaître que l'oubli est volontaire. Comment croire en
effet qu'un récit qui a été composé, ensuite mis en forme, sans doute
retravaillé, par un groupe de narrateurs, et avant sa validation définitive,
examiné sous tous ses aspects par les docteurs de la loi, puisse avoir omis
volontairement le dieu du peuple juif. C'est tout simplement impensable. Mais
alors si l'oubli est volontaire, nous nous trouvons devant une question
insoluble. Aucun écrit des narrateurs n'existe pour nous donner la plus infime
piste. Avant d'explorer les réponses que les théologiens et les chercheurs ont
essayé de présenter, et de fournir une piste nouvelle, nous allons analyser ce
récit.
D'emblée, le
narrateur nous présente « le roi Asssuérus qui régnait depuis l'Inde
jusqu'en Ethiopie sur cent vingt-sept provinces ; son trône royal se
trouvait à Suse dans la capitale. La troisième année de son règne,il fit un
festin à tous ses princes, à ses serviteurs : les commandants de l'armée
des Perses et des Mèdes, les grands et les chefs des provinces furent réunis en
sa présence. Il montra la splendide richesse de son royaume et l'éclatante
magnificence de sa grandeur pendant nombre de jours, pendant cent quatre-vingt
jours.... »(2). Le récit continue par la description du banquet et la
fastueuse libéralité du roi qui invite toute la population de la capitale à un
festin royal qui va se prolonger pendant sept jours. Tout irait pour le mieux
si le roi, l'esprit embrumé par le vin, n'avait soudain décidé de convoquer la
reine pour la présenter à tout le peuple, un peu comme on exhibe un trophée, car, précise le
narrateur, « elle était belle de figure ». Il fallait
vraiment que le roi fut plongé dans les vapeurs de l'ivresse pour avoir
pareille idée. Car non seulement il faisait un affront à la reine, mais il se
ridiculisait lui-même. Dans la culture proche-orientale, encore aujourd'hui,
les femmes font preuve de retenue, et jamais un homme ne présenterait sa femme
à d'autres hommes pour
faire admirer sa beauté. Si la reine avait déféré à l'ordre du roi, elle lui
aurait rendu un très mauvais service, car le déshonneur serait retombé sur lui,
et sans doute, son ivresse passée, il se serait rendu compte de la folie de son
geste. De crainte devant la colère du roi, les sages qui avaient la
connaissance des lois, au lieu
d'expliquer au roi les raisons de l'attitude de la reine, vont flatter son
orgueil en lui proposant de répudier la reine et d'en faire connaître les
raisons dans tout son empire. Le récit précise : « Cet avis
fut approuvé du roi et des princes, et le roi agit d'après la parole de
Memucan( l'un des princes qui occupaient la première rang dans le
royaume). Il envoya des lettres à toutes les provinces du royaume, à
chaque province selon son écriture et à chaque peuple selon sa langue : elles
portaient que tout homme devait être le maître dans sa maison et qu'il
parlerait la langue de son peuple » ?! (2) Décret d'une rare
stupidité, qui d'ailleurs a bien dû faire rire aux dépens du roi, bafoué dans
son propre palais, et obligé de révéler à tous ses sujets ses déboires
conjugaux. Aujourd'hui les épouses, ou compagnes évincées se vengent en
écrivant des livres assassins (« Merci pour ce moment » de
Valérie Trierweiller, la maîtresse renvoyée du Président Hollande).
Par la suite, le
roi, revenu à la raison, décide de remplacer la reine déchue et organise le
premier concours de miss, puisqu'il fait rassembler dans la capitale un grand
nombre de belles jeunes filles.
Le choix du roi
se porte sur Esther, une jeune orpheline juive qui vivait avec son oncle
Mardochée. Ensuite le récit nous rapporte le conflit entre le grand vizir,
dénommé Haman, et Mardochée qui refuse de s'incliner devant lui. Haman, dans sa
rage, décide de se venger et obtient du roi un décret d'extermination de toute
la communauté juive de l'empire. Après intervention de la reine, le roi, très
versatile, fait mettre à mort Haman et autorise les juifs à se défendre contre leurs
ennemis. L'histoire se termine par le massacre des ennemis des juifs, la
victoire de Mardochée qui remplace le grand vizir à la cour et bien entendu la
prospérité de la communauté juive. L'histoire ne dit pas si la reine fut
heureuse et si elle eut beaucoup d'enfants....Le récit est plein de
rebondissements, le scénario est bien agencé, les personnages bien saisis dans
leur rôle, ou jeu de rôle, respectifs. L'attention du lecteur est
continuellement tenu en haleine par des rebondissements inattendus. Finalement,
le complot est déjoué et la morale est sauve, puisque le bien gagne la partie.
Mais il y a
quelque chose qui cloche : d'abord, c'est l'absence de toute référence
au dieu des Juifs et toute allusion à la notion de prière. Ensuite, le
récit en lui même est plein d'incohérences et d'erreurs. Enfin, ce récit
n'apporte aucun enseignement moral, bien au contraire. Il est d'ailleurs
révélateur combien les théologiens, dans leurs efforts pour défendre ce récit
et son inclusion dans le canon des saintes écritures, ont dû se livrer à
des « contorsions théologiques » souvent ubuesques. Nous allons
étudier ces différents aspects, pour dans une conclusion, émettre une hypothèse
concernant la finalité de ce récit.
Absence de toute référence au dieu du peuple d'Israël
et à la prière
A plusieurs
reprises dans le cours du récit, des événements auraient dû susciter un appel à
leur dieu par le peuple juifs
« Mardochée
ayant appris tout ce qui se passait, déchira ses vêtements, s'enveloppa d'un
sac et se couvrit de cendre. Puis il alla au milieu de la ville, en poussant
des cris amers...Dans chaque province, partout où arrivait l'ordre du roi et
son édit (décret d'extermination des juifs), il y eut une grande
désolation parmi les Juifs ; ils jeûnaient, pleuraient et se lamentaient,
et beaucoup se couchaient sur le sac et la cendre »
Nous avons
réécrit le texte , comme il semblerait logique :
« Mardochée,
ayant appris tout ce qui se passait, déchira ses vêtements, s'enveloppa d'un
sac, se couvrit de cendre et adressa des PRIERES ferventes à l’Éternel, dieu du
ciel.....Les Juifs jeûnaient, pleuraient, se lamentaient, et CRIAIENT à
l'Eternel, dieu du ciel.. »
Autre
épisode : la reine, sollicité par son oncle, décide, au péril de sa vie,
de se rendre chez le roi pour implorer sa clémence : « Esther
envoya dire à Mardochée : Va, rassemble tous les Juifs qui se trouvent à
Suse, et jeûnez pour moi, sans manger ni boire pendant trois jours, ni la
nuit ni le jour. Moi aussi, je jeûnerai
de même avec mes servantes, puis j'entrerai chez le roi, malgré la loi ;
et si je dois périr, je périrai. »
Là encore,
réécrivons le texte : « Va, rassemble tous les Juifs, jeûnez et
PRIEZ pour moi....Moi aussi, je jeûnerais, et je PRIERAIS de même.... »
Et enfin lorsque la situation se
retourne en faveur des juifs, aucune prière de reconnaissance !
« Ces choses arrivèrent
le treizième jour du mois d'Adar. Les juifs se reposèrent le quatorzième, et ils
en firent un jour de festin et de joie » Il est frappant que les
seules manifestations des Juifs sont pour se livrer à des festins, des fêtes,
des manifestations d'allégresse, certes compréhensibles, mais là aussi,
pourquoi ne pas accompagner ces signes d'allégresse, de manifestations de joie
et de reconnaissance à l’Éternel ?
Bien plus étonnant, le peuple
juif s'attribue à LUI MEME la réussite et sa délivrance. « Mardochée
leur prescrivit de célébrer chaque année le quatorzième jour et le quinzième
jour du mois d'Adar comme les jours où ILS avaient obtenu du repos en SE
délivrant de leur ennemis, de célébrer le mois où leur tristesse avait été
changée en joie et leur désolation en jour de fête, de faire de ces jours des
jours de festin et de joie, où l'on s'envoie des portions les uns aux autres.... » .
Cette notice est très importante et fera l'objet d'une analyse lorsque nous
réfléchirons au véritable contenu de ce récit.
Les explications des théologiens
A ce égard le livre de Daniel
Arnold(« Esther, survivre dans un monde hostile », Éditeur: Editions
Emmaüs, CH-St Légier,2000) est emblématique. Piégés par son inclusion dans le
canon, liés par le dogme de l'inerrance(absence d'erreur) des écrits bibliques,
obligés de défendre leur inspiration
divine, les théologiens comme Daniel Arnold, vont nous présenter des
explications pour le moins contestables. Voici en quels termes un commentateur présente ce livre :
Cet
ouvrage est un commentaire évangélique du livre d'Esther. …. Malgré l'absence
apparente de Dieu dans ce livre, il est partout visible par sa Providence. Il
contrôle et règle tout, à chaque détail près, afin que ses desseins
s'accomplissent en faveur de son peuple. Esther aborde aussi les grandes
questions qui agitent la société moderne: sexisme, féminisme, racisme,
génocides, soif de puissance, légitime défense, sanctions, peine capitale, etc.
Ce livre est donc passionnant et actuel. Nous apprenons aussi à travers ce
livre que nous pouvons «survivre dans un monde hostile», question aussi
actuelle qu'au temps d'Esther. Le Dieu tout-puissant, saint et juste est aussi
un Dieu de grâce et de tendre sollicitude envers tous les siens. Un livre apprécié et contesté. Nous
apprenons que ce livre a subi à travers les âges passablement d'attaques quant
à sa canonicité, son historicité et sa valeur spirituelle et éthique - certains
rabbins, la traduction des Septante, qui a ajouté à peu près 50% de texte par
rapport à la version originale en hébreu, l'Eglise d'Orient, l'Eglise
d'Occident, même Luther à certains égards. Or, l'ouvrage de Daniel Arnold démontre
de façon magistrale combien le livre d'Esther est divinement inspiré, et
met en valeur les différentes facettes de ce livre divin qui pointent vers son
Auteur, comme par exemple, le rôle qu'y joue la Providence, sa
logique, sa structure, son harmonie,
son éthique( !) etc...
Relevons
simplement l'explication pour le moins simpliste de l'absence de Dieu dans le
récit : « ...cette absence ne serait qu'apparente, en
réalité, Dieu est partout visible par sa
Providence. Il contrôle et règle tout à chaque détail …. »
La Providence, écrit avec un P majuscule devient Dieu par procuration, on
peut s'interroger sur le libre choix de l'homme puisque la Providence contrôle
tout ?
Pourtant dans tous les récits
bibliques, la prière à Dieu est omniprésente.
Nous
donnerons l'exemple du livre de Néhémie ( Bible Segond, livre de Néhémie), en
citant quelques passages . Pour la compréhension, Néhémie est un juif
exilé à Babylone. Il reçoit des nouvelles de Jérusalem qui le plongent dans un
profond désarroi. « Lorsque j'entendis ces choses, je m'assis, je
pleurai, et je fus plusieurs jours dans la désolation. Je jeûnais et je
priais devant le Dieu des cieux et je dis..... ». Néhémie occupe
le poste d'échanson du roi de Babylone, poste de toute confiance. Le roi
s'étonne du visage préoccupé de son échanson et lui en demande la
raison. « Le roi me dit : Que demandes-tu? Je priai le
Dieu des cieux, et je répondis au roi.... » . Il constate
sur place que les murs de la ville sont en ruines. Avec le peuple, il commence
à rebâtir la muraille provoquant la colère des ennemis de juifs : « Nous
priâmes notre Dieu et nous établîmes une garde pour nous
défendre..... ». D'ailleurs la Bible dans de nombreux passages
n'invite-t-elle pas les croyants à adresser à Dieu des supplications et des
prières de reconnaissance ?
Selon l'école critico-historique, aucune information vérifiable du récit ne trouve confirmation dans les données disponibles
Vashti et Esther ne sont les noms d'aucune
reine connue, et l'épouse de Xerxès
s'appelait Amestris. Il en est de même du puissant premier ministre
Haman, agaguite ici, macédonien dans le texte grec. Les historiens ont relevé
une petite dizaine de traits qu'ils affirment être en contradiction avec les
connaissances acquises sur l'empire perse. Les documents sont muets quant à un
quelconque massacre de sujets du roi — par les Juifs ou autres — et ne révèlent
aucun décret royal autorisant de telles tueries. Tout au contraire, les
souverains perses veillèrent à maintenir la paix entre les divers peuples
qu'ils tenaient sous leur domination. On n'a pas d'exemple de décret statuant
sur un conflit privé comme la désobéissance d'une épouse, pas plus que de choix
de reine par un concours de beauté. On n'a pas non plus connaissance de règle
ou de loi qui rendrait une décision royale irrévocable. Le narrateur semble
ignorer que Suze n'était que la résidence hivernale de la cour royale, plaçant
son récit implicitement dans la continuité de neuf années. Enfin, l'idée
qu'un roi puisse épouser une parfaite inconnue heurte toutes les mœurs répertoriées
(les mariages royaux sont des arrangements entre familles princières) et
les connaissances historiques (selon Hérodote, le roi devait épouser une femme
issue de l'une des sept plus grandes familles nobles de Perse) (3).
À côté de cela, les observateurs
ont pointé une quinzaine de traits qu'ils frappent d'invraisemblance,
dont : l'anonymat de Mardochée, maintenu sur plusieurs années de
fréquentation du palais, dont le palais des femmes ; les gardes qui
complotent ouvertement contre le roi pour une simple irritation ; le désir
de Haman de massacrer tout un peuple pour l'affront subi en place de punir le
malotru ; l'obtention d'un décret royal pour exterminer les Juifs du
royaume sur la base d'une simple calomnie et d'une somme d'argent ;
l'ordonnance d'un pogrom un an à l'avance ; la promesse du roi d'accéder
par avance à la demande d'Esther ; l'insomnie royale qui établit
officiellement et opportunément la sollicitude de Mardochée envers le roi,
préparant ainsi la substitution avec Haman.
Les esprits critiques n'ont pas
manqué de signaler par ailleurs une dizaine de faits perçus comme absurdes,
tels que : le décret visant le rétablissement d'un ordre patriarcal
épargné par la déchéance de Vashti ; le fait qu'Haman ait besoin d'une
dénonciation pour se rendre compte que Mardochée refuse de s'agenouiller devant
lui ; la justification puérile (pour que les massacreurs soient prêts) donnée pour rendre
compte de la publicité faite au décret d'extermination ; la surprise du
roi devant la demande d'Esther, comme s'il donnait régulièrement son aval aux
exterminations ; la coexistence de deux décrets qui mettent en état de
guerre civile les autorités locales et les Juifs ; le soutien des
gouverneurs et fonctionnaires du roi apporté aux Juifs.
Les auteurs appartenant à
l'école historico-critique considèrent donc ce récit qui possède toutes les
apparences d'un conte, comme un roman historique dont la datation est
sujette à débat, certains optant pour une rédaction à l'époque de la domination
perse (jusqu'à 333 av. J.-C.), la plupart cependant la situant à l'époque
hellénistique voire macchabéenne.
(4)
Lecture allégorique
Cette lecture propose au
lecteur de se référer aux livre des chroniques des rois de Médie et de Perse
pour avoir les données historiques des événements. L'allégorie est manifeste à
chaque instant dans ce livre puisque Esther dont le livre tire son nom, veut
dire 'caché'. Le prénom du personnage Esther est Adassa. Elle a sans
doute changé son nom au moment de son élection pour garder son anonymat. Le nom
de Dieu n'est pas présent dans le texte, mais de nombreux exégèses donnent une
grille de lecture spéciale : lorsque le roi est nommé ("Roi
Assuérus") il s'agit du roi effectivement, mais lorsque le texte dit le
"Roi" tout court, il s'agit de Dieu. De nombreuses autres grilles de
lecture existent.
Même certains érudits juifs mettent en doute
l'historicité de ce récit
Le livre d'Esther pourrait être un conte, comme d'autres contes, qui sont des apocryphes (c'est à
dire rejetés, écartés de la Bible). Le judaïsme connaît d'innombrables contes,
tels que les "midrashim" (récits du Midrash). Il est su que ce sont
des inventions. Ils ont été imaginés pour illustrer une situation imaginaire, amener
à une conclusion, une idéologie, une pensée, la "pensée juive".
Le
livre d'Esther pourrait être un conte pour justifier d'une fête, celle de
Pourim.
Cette fête aurait été inventée
pour que les Juifs s'amusent aussi d'un carnaval, comme dans les carnavals
chrétiens.
Pour rappel : il n'y a qu'à
Pourim que l'on défile (comme au carnaval), il n'y a qu'à Pourim que l'on porte
le masque (comme au carnaval) et il n'y a qu'à Pourim que l'on se déguise
(comme au carnaval).
Pour plus de renseignements sur
cette question, se reporter aux explications détaillées sur le site d'Hervé
Taiëb (5)
Le livre d'Esther et les Evangiles
Le récit d'Esther, au delà des
incohérences et des erreurs ou impossibilités notés par les historiens, nous
interpelle par son opposition frontale aux enseignements de l'Evangile.
Mensonge, dissimulation,
vengeance, destruction, massacre, forment la trame de ce récit. Les juifs
massacrent PREVENTIVEMENT leurs ennemis. Même les dix fils d'Haman sont
exécutés. De quoi sont-ils coupables sinon d'être les enfants du grand vizir
qui avait ordonné le génocide de la communauté juive. Cette histoire exalte
les sentiments de puissance, de supériorité, d'orgueil et de mépris éprouvés
par les juifs pour les autres peuples ; cela ressort fort bien dans
deux passages : lorsque la femme d'Haman, Zéresch et ses conseillers
l'avertissent « Si Mardochée, devant lequel tu as commencé de
tomber, est de la race des juifs, tu ne pourras rien contre lui, mais
tu tomberas devant lui » et lorsque le narrateur croit utile,
d'ajouter : Et beaucoup de gens
se firent Juifs, car la crainte des Juifs les avait saisis »
Enfin, les valeurs de
l'Evangile et les paroles de Jésus sur l'amour du prochain, (« Vous
avez appris qu'il a été dit: «Tu aimeras ton prochain, et tu haïras ton
ennemi. Mais moi, je vous dis : Aimez vos ennemis, bénissez ceux qui vous maudissent ... »), le pardon, la
non violence, son exemple même par sa vie et ses actes, sont bafouées. En
vérité comment peut-on, sans dénaturer l'enseignement du Christ, prétendre que
ce récit est inspiré et l'inclure dans le canon des saintes écritures ?
Nous avons constaté que les
théologiens sont obligés de se livrer à des suppositions hasardeuses, à ajouter
au texte des expressions qui n'y figurent pas, comme la prière( que les
théologiens déclarent être liée au jeûne).Mais ces mêmes théologiens n'ont
aucun explication sur l'absence de toute reconnaissance exprimée au dieu
d'Israël après la défaite d'Haman et de leurs ennemis. Ils n'ont aucune
explication pour le fait que les Juifs s'attribuent à eux même leur succès sur
leurs ennemis .
Alors que conclure ?
Le nom d'Esther provient d'une
origine à la fois perse ( Ester = l'étoile) et de l'hébreu( lehastir = cacher).
Nous avons ici peut-être un indice de compréhension de ce texte. Il a été
écrit par un juif à l'usage exclusif de la communauté juive de son temps et des temps à venir. Il contient un
message CACHE, dissimulé, que seuls les initiés comprendront. Il est
surprenant que cette dimension ait totalement échappé à la plupart des
commentateurs ! C'est intentionnellement que le narrateur omet le nom de
Dieu et la prière. Son intention apparaît clairement dans le texte, comme nous
l'avions relevé précédemment, lorsque le narrateur précise : «
Il(Mardochée) leur prescrivit de célébrer chaque année le quatorzième jour et
le quinzième jour du mois d'Adar, comme les jours où ILS avaient obtenu
du repos en SE délivrant de leurs ennemis..... ». Ce
message est d’ailleurs répété à deux reprise lorsque le narrateur
écrit : « Les autres juifs qui étaient dans les provinces du
roi se rassemblèrent et défendirent leur
vie : ILS SE procurèrent du repos en SE délivrant de leurs
ennemis, et ils en tuèrent soixante-quinze mille de ceux qui leur étaient
hostiles ». Le message est simple : le peuple juif est
dispersé,sans territoire, sans armée, livré au bon vouloir des peuples au
milieu desquels il est isolé, ou s'isole volontairement, par son mode de vie.
Le narrateur ne le cache pas lorsqu'il écrit, en mettant ce constat dans la
bouche de Haman : « Il y a dans toutes les provinces de ton
royaume, un peuple dispersé et à part parmi les peuples, ayant des lois
différentes de celles de tous les peuples et n'observant point les lois du
roi ». Il ne peut donc compter que sur lui même, sur sa ruse, sa
dissimulation pour survivre. Il lui faut impérativement s'assurer l'appui des
puissants, des rois et des dirigeants. Il lui faut disposer de relais, de
réseaux au sein même des cercles de pouvoir, de conseillers dans les antichambres
du pouvoir, si possible même dans la chambre à coucher du roi !
Le narrateur se moque
ouvertement des grands, le récit d'Esther montre bien comment le roi Assuérus à
la tête de 127 provinces, despote tout
puissant, est facilement d'abord ridiculisé dans son ménage, et ensuite
manipulé par ses conseillers, et bien entendu par la nouvelle reine. Ce message
a été parfaitement compris par les dirigeants de la communauté juive au cours
des siècles.
Un premier exemple de ce
processus, nous le trouvons dans le livre de Néhémie justement, que nous avions
évoqué précédemment concernant le recours à la prière ( livre précédant dans la
Bible le livre d'Esther). Néhémie faisait partie des Judéens exilés(6) à
Babylone après l'invasion de Nebucadnetsar et la prise de Jérusalem, il faisait
sans doute partie de l'élite juive, et il avait gagné la confiance du roi
Artaxerxès, puisqu'il avait été choisi pour le poste d'échanson, en charge de
présenter le vin au roi. Poste oh combien redoutable, car il était en fait
chargé de « goûter »le vin,
d'éviter toute tentative d'empoisonnement, et de veiller à la qualité du vin
servi. Mais fonction qui par ailleurs le mettait en relation quotidienne avec
le roi et la reine. Cette proximité, cette intimité presque, allait lui
permettre d'obtenir du roi la faveur de retourner à Jérusalem, muni de lettres
de recommandation selon ce que rapporte Néhémie lui-même : « Je
dis au roi : Si le roi le trouve bon, qu'on me donne des lettres pour les
gouverneurs de l'autre côté du fleuve afin qu'ils me laissent passer et entrer
en Juda, et une lettre pour Asaph, garde-forestier du roi, afin qu'il me
fournisse du bois de charpente pour les portes de la citadelle,près de la
maison, pour la muraille de la ville et pour la maison que j'occuperai. Le roi
me donna ces lettres... »
Au cours des siècles, les
dirigeants des communautés juives ont toujours su gagner la confiance des
puissants. Israël Shahak en apporte la démonstration dans son ouvrage de grande érudition sur
« Histoire juive – Religion juive »(7)
Enfin, l'histoire du projet
sioniste au cours du XXe siècle est à ce égard très révélatrice : ce sont des conseillers bien introduits dans les
cercles dirigeants anglais et-américains qui ont puissamment soutenu ce projet.
(8)
A cet égard, la notice dans le
livre d'Esther : « Et tous les chefs de province, les satrapes,
les gouverneurs, les fonctionnaires du roi, soutinrent les Juifs à cause de l'effroi que leur inspirait
Mardochée. » peut sembler excessive, mais aujourd'hui, au XXIème
siècle, nous constatons combien les autorités en France, et dans beaucoup
d'autres pays sont obligés de déférer aux instructions de certaines
institutions juives qui sont des relais puissants de l'Etat d'Israël. Observons simplement comment tout le
personnel politique et médiatique français accourt aux dîners organisés par le
CRIF (Conseil représentatif des Institutions Juives de France). La lecture de
l'ouvrage (9) de Pascal Boniface est instructive à cet égard.
Résumons l'ensemble de ces éléments
Le récit d'Esther est très
controversé, et suscite bien des commentaires mettant en doute d'abord son
historicité, ensuite le bien fondé même de son inclusion dans le canon des
Saintes Écritures. Il n'en ressort aucun enseignement moral, ni éthique, ni conforme
aux valeurs que proclame l’Évangile de Jésus Christ. Nous avons relevé tous les
indices qui montrent que ce récit est destiné aux Juifs, en leur enseignant
l'art et la manière de survivre dans un monde hostile. A cet égard, et vu sous
cet angle, on ne fera pas grief aux responsables de la communauté juive de
l'époque d'avoir anticipé les événements et les persécutions à venir, et
d'avoir, par le moyen d'une histoire en peu enjolivée et romancée, donné au
peuple juif des conseils précieux pour échapper à leurs ennemis. Notons
d'ailleurs que le peuple juif, ou tout au moins ses dirigeants, ont
parfaitement mis en œuvre au cours des siècles ces conseils. Mais de grâce, ne
cherchons pas dans ce récit une quelconque inspiration divine. Le narrateur lui-même s'est refusé à inclure son
dieu Yahwe dans les événements, respectons au moins son choix, il avait de
bonnes raisons de le faire. Nous éviterons ainsi de tordre le sens de ce récit
et de lui faire dire ce qu'il n'a jamais voulu être. C'est un message politique
destiné aux seuls juifs dont le sens leur est parfaitement compréhensible, tout
au moins dans les cercles dirigeants. Il n'y a aucun autre enseignement, et
surtout pas d'ordre spirituel ou pour édifier les chrétiens, dans ce récit.
Marc © Droits réservés. Reproduction interdite sans autorisation de l'auteur
(1)http://www.levangile.com/Annotee/Introduction-Esther.php
(2) Bible Segond livre d'Esther chap.1.21-22 ainsi que l'ensemble
des autres extraits du récit d'Esther
Acheter le livre numérique |
(7) » Histoire juive – Religion juive – Le poids de 3
millénaires » par Israël Shahak ; 1996 Editions la Vieille Taupe
(8) « La Controverse de Sion » par Douglas Reed .
(9) « Est-il permis de critiquer Israël » par
Pascal Boniface .Editions Robert Laffont 2003