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[Marc continue à décortiquer la Bible dans une perspective très "garaudienne"]
Yahwe,
le dieu d'Israël, ordonne le premier génocide de l'histoire
Le XX ème siècle a connu plusieurs génocides,
celui des Arméniens en 1915, celui du Cambodge dans les années 75-80 et celui
du Rwanda en 1994, pour ne citer que les plus connus, et bien entendu
l'extermination des juifs pendant la seconde guerre mondiale. Mais sait-on que
le génocide, c'est à dire l'anéantissement et la destruction de toute une
population d'un pays ou d'une région, est déjà rapporté dans la Bible, et même
ordonné par Yahwe, le dieu d'Israël ?
Roger Garaudy écrit dans « Vers une guerre
de religion ? » (1) :
« Accomplir un génocide s'appelle dans
la Torah( les cinq premiers livres de la Bible, que les chrétiens appellent le
Pentateuque) : « vouer à l'interdit » : « Le
Seigneur(2) notre Dieu a livré Og et tout son peuple(....), nous les avons
voués à l'interdit(....), les hommes, les femmes, les enfants » (Dt
3,3-6)(3) »
Aussitôt après avoir proclamé dans le
Décalogue : « Tu ne commettras pas de meurtre(Dt 5,17) »,
il(Moïse)
définit ainsi « le rôle d'Israël face aux
nations » : « Écoute, Israël ! Tu vas aujourd'hui
passer le Jourdain pour déposséder des nations plus grandes que toi...C'est le
Seigneur ton Dieu qui passe le Jourdain avant toi comme un fleuve dévorant, c'est Lui qui les exterminera.Tu
les déposséderas et tu les feras disparaître aussitôt »(Dt 9,1-4).Le
successeur de Moïse, Josué, poursuit cette politique de génocide avec le même
zèle religieux. Le livre de Josué est par excellence le livre des massacres qui
commencent à Jéricho, dès la traversée du Jourdain : « Ils
vouèrent à l'interdit tout ce qui se trouvait dans la ville, aussi bien l'homme
que la femme, le jeune homme que le vieillard... les passant tous au fil de
l'épée »(Josué 6,21)(2)
Mais avant même le génocide des populations
occupant le pays de Canaan, c'est à dire la Palestine actuelle, Yahwe ordonne
la destruction de toute une tribu, celle des Madianites, qui nomadait dans le
désert du Sinaï. Il vaut la peine d'examiner les textes bibliques qui
rapportent ce génocide. Voici ce que nous lisons :
« Le
Seigneur donna cet ordre à Moïse : « Va punir les Madianites pour le mal qu'ils ont fait aux
Israélites. C'est après cela que tu quitteras ce monde. » Alors Moïse
dit au peuple : « Il faut que certains d'entre vous prennent leurs
armes et aillent attaquer les Madianites, afin de leur infliger la punition
décidée par le Seigneur. Désignez à cet effet mille combattants dans chaque
tribu. » (Nb31,1-2)
D'abord qui sont ces Madianites:
Ce sont les descendants d'Abraham, selon ce que nous en dit la Bible:
Après le décès de Sara, âgée de 127 années:
« Abraham prit encore une femme nommée
Qetoura. Elle lui donna des fils..Ziprân, Yoqchân, Medân, Madian,
Yichbaq et Chouac, .....Abraham donna tout ce qui lui appartenait à
Isaac. Quant aux fils de ses concubines, il leur fit des dons et, de son
vivant, il les envoya loin de son fils Isaac. » (Genèse 25.1à 6).
Ouvrons une parenthèse:
On ne manquera pas
d'être étonné, et même émerveillé, de la vigueur retrouvée d'Abraham qui non
content de prendre une nouvelle femme, Qetoura, va encore y ajouter des
concubines, et engendrer de nombreux fils, à l'âge de 137 ans, ce qui est quand
même remarquable. Et quelque peu contradictoire avec l'image que donne de lui
l'apôtre Paul, lorsqu'il écrit que « sans faiblir dans la
foi,il(Abraham) considéra son corps presque mourant, puisqu'il avait
près de 100 ans » (Lettre aux Romains 4,19)
Les Madianites étaient donc des descendants
d'Abraham. C'étaient les descendants légitimes d'Abraham au même titre
qu'Isaac, puisque fils de l'épouse d'Abraham, Qetoura, avec qui le patriarche
s'était remarié après le décès de sa première femme Sara. Les fils de Qetoura
bénéficiaient donc des mêmes droits que le fils de Sara, à l'exception du droit
d'aînesse dévolu au premier né. En cela, ils se distinguaient des descendants
d'Agar. Cette dernière était une esclave et donnée comme femme à Abraham par
Sara. Elle était donc de ce fait devenu sa concubine, mais sans jamais pouvoir
prétendre au statut de femme légitime. La tribu de Madian s'était établie dans
le désert du Sinaï. C'étaient des nomades, vivant de leurs troupeaux de moutons
et de chèvres et nomadisant dans cette région désertique à la recherche de
points d'eau et de rares pâturages pour leurs troupeaux. Aujourd'hui encore,
dans le Sinaï, vivent des bédouins avec leurs tentes et leurs troupeaux.
La première question que nous devons nous poser:
Quel
mal, quel crime avaient donc commis ces Madianites envers le peuple
d'Israël pour mériter une pareille punition , à savoir leur anéantissement
total ?
Nous allons d'abord examiner un certain nombre de textes qui nous
apportent quelques informations intéressantes sur cette tribu.
« Un jour Moïse, devenu adulte, alla voir
ses frères de race. Il fut témoin des corvées qui leur étaient imposées.
Soudain il aperçut un Égyptien en train de frapper un de ses frères hébreux.
Moïse regarda tout autour de lui et ne vit personne ; alors il tua
l'Égyptien et enfouit le corps dans le sable. Il revint le lendemain et trouva
deux Hébreux en train de se battre. Il demanda à celui qui avait tort :
« Pourquoi frappes-tu ton compatriote ? » — « Qui t'a nommé
chef pour juger nos querelles ? répliqua l'homme. As-tu l'intention de me
tuer comme tu as tué l'Égyptien ? » Voyant que l'affaire était
connue, Moïse eut peur. Le Pharaon lui-même en entendit parler et chercha à le
faire mourir. Alors Moïse s'enfuit et alla se réfugier dans le pays de
Madian. Là, il s'assit près d'un puits.
Le prêtre de Madian,
Jéthro, avait sept filles.
Elles vinrent puiser de l'eau et remplir les abreuvoirs pour donner à boire aux
moutons et aux chèvres de leur père. Mais des bergers arrivèrent et chassèrent
les jeunes filles. Alors Moïse prit leur défense et donna à boire à leur
troupeau. Elles retournèrent chez leur père, qui leur demanda :
« Pourquoi rentrez-vous si tôt aujourd'hui ? » — « Un
Égyptien nous a protégées contre les bergers, répondirent-elles, et il a même
puisé l'eau pour donner à boire à notre troupeau. » — « Où est donc
cet homme ? leur demanda le père. Pourquoi ne l'avez-vous pas amené
ici ? Allez le chercher pour qu'il mange avec nous. »
Moïse accepta de
s'installer chez cet homme. Jéthro lui donna pour épouse sa fille Séfora. Celle-ci mit au monde un fils ; alors Moïse déclara :
« Puisque je suis devenu un réfugié dans un pays étranger, je lui
donne le nom de Guerchom — “Réfugié-là” —. » ( Exode 2.11 à 22)
Le texte est clair: Moïse, en fuite, va se
réfugier dans le désert au pays de Madian. Il est accueilli avec fraternité par
un chef de clan, Jéthro, prêtre dans sa tribu, qui lui offre la nourriture et
le gîte, avant même d'avoir fait sa connaissance, et par la suite, lui donne
pour épouse l'une de ses filles. Comme accueil et amitié, il est difficile de
faire mieux. Continuons nos recherches:
« Moïse
s'occupait des moutons et des chèvres de Jéthro, son beau-père, le prêtre de
Madian. Un jour,
après avoir conduit le troupeau au-delà du désert, il arriva à l'Horeb, la montagne de
Dieu. 2C'est
là que l'ange du Seigneur lui apparut dans une flamme, au milieu d'un
buisson. » (Exode 3.1 à 2)
Ainsi donc pendant son séjour dans
la tribu de Jéthro, Moïse va s'occuper du troupeau de son beau-père, et cela
pendant de longues années.
« Moïse retourna vers Jéthro, son
beau-père, et lui dit : « Il faut que je retourne vers mes frères de
race en Égypte, pour voir s'ils sont encore en vie. » — « Va en
paix », répondit Jéthro.
Le Seigneur dit alors à Moïse, dans le pays de Madian : « Oui,
retourne en Égypte, car tous ceux qui en voulaient à ta vie sont morts. »
Moïse prit donc sa femme et ses fils, les installa sur son âne et partit pour
l'Égypte ; il tenait en main le bâton que Dieu lui avait dit de
prendre. »(Exode 4.18 à 20)
Quelques temps plus tard, après l'épisode des plaies d’Égypte, Moïse à
la tête du peuple d'Israël, revient dans le désert du Sinaï et sans doute campe
à proximité du clan de son beau-père. En tout cas, voici ce que nous en dit la
Bible.
« Jéthro,
prêtre de Madian et beau-père de Moïse, entendit parler de tout ce que le
Seigneur Dieu avait fait pour Moïse et pour Israël, son peuple ; il apprit
comment le Seigneur les avait fait sortir d'Égypte. Jéthro avait avec lui sa fille Séfora, femme de Moïse, que celui-ci lui avait renvoyée précédemment, ainsi que les deux
fils de Séfora. Moïse avait appelé l'aîné Guerchom — ce qui signifie
“Réfugié-là” — en déclarant : “Je suis devenu un réfugié dans un pays
étranger” ; quant au cadet, il l'avait nommé Éliézer — “Mon Dieu me
secourt” — en déclarant : “Le Dieu de mon père m'a secouru en me
protégeant des attaques du Pharaon.”
Jéthro partit avec les
fils et la femme de Moïse et alla rejoindre celui-ci dans le désert proche de
la montagne de Dieu, là où il avait installé son camp. Jéthro se fit annoncer à Moïse en ces termes : “Je suis ton
beau-père ; je viens te trouver, accompagné de ta femme et de ses deux
fils.” Moïse vint à sa rencontre, s'inclina profondément devant lui, puis
l'embrassa. Après avoir échangé des nouvelles de leur santé, ils se rendirent dans
la tente de Moïse. Moïse raconta à son beau-père comment le Seigneur avait
traité le Pharaon et les Égyptiens, à cause d'Israël, et comment il avait
délivré le peuple des difficultés rencontrées en chemin. Jéthro se réjouit
de tout le bien que le Seigneur(Yahwe) avait fait aux Israélites en les
libérant de la domination des Égyptiens, et il s'écria : « Il faut
remercier le Seigneur, qui vous a délivrés de la domination du Pharaon et
des Égyptiens. Je reconnais maintenant que le Seigneur est plus grand que
tous les autres dieux : il l'a montré lorsque les Égyptiens tyrannisaient les Israélites. »Jéthro offrit à Dieu un
sacrifice complet et des sacrifices de communion. Alors Aaron et tous les
anciens d'Israël vinrent prendre part au repas sacré, en compagnie du beau-père
de Moïse. (Exode18,1 - 12) »
Ce texte est suffisamment explicite. Que faut-il en retenir?
Il existe des liens forts de respect et
d'amitié entre Jéthro et Moïse. D'ailleurs les Madianites et les Israélites
étaient demi frères, et descendaient d'un ancêtre commun Abraham, tous deux issus d'épouses légitimes du
patriarche. Jéthro reconnaît la suprématie de Yahwe, qu'il proclame comme
supérieur à tous les autres dieux.
Les anciens
d'Israël, avec Aaron, prennent part au repas sacré, après l'offrande à YAHWE d'un sacrifice complet par Jéthro, ce
qui scelle une alliance entre eux.
D'ailleurs Jéthro
va être de bon conseil pour Moïse : nous le lisons dans la suite du chapitre 18 du livre de l'Exode.
« Le
lendemain, Moïse prit place pour juger les querelles du peuple. Du matin au
soir des gens attendirent de pouvoir se présenter devant lui. Lorsque son
beau-père vit tout ce qu'il avait à faire pour le peuple, il lui dit :
« Pourquoi procèdes-tu ainsi ? Pourquoi fais-tu ce travail tout seul,
en obligeant les gens à attendre debout, du matin au soir, le moment de se
présenter devant toi ? » — « C'est que ces gens viennent à moi
pour obtenir un jugement inspiré par Dieu, répondit Moïse. Lorsqu'ils ont une
dispute à régler, ils viennent me trouver : je tranche le cas qui les
oppose et je leur fais connaître les lois et les enseignements de Dieu. »
Son beau-père reprit : « Il n'est
pas judicieux de procéder de cette manière ! Vous allez tous vous épuiser
complètement, toi et ceux qui viennent te consulter. Cette tâche est vraiment
trop lourde pour toi, tu ne peux pas l'accomplir seul !
Écoute donc ce que je te conseille, et que
Dieu soit avec toi : Ton rôle consiste à représenter le peuple devant Dieu
pour lui présenter les affaires litigieuses ; tu dois aussi informer les
gens des lois et des enseignements de Dieu, leur indiquer la conduite à tenir
et leur dire ce qu'ils doivent faire. Pour le
reste, choisis parmi le peuple des hommes de valeur, pleins de respect pour
Dieu, aimant la vérité et incorruptibles ; tu les désigneras comme
responsables, à la tête de groupes de mille, de cent, de cinquante ou de dix
hommes. Ce sont eux qui siégeront chaque jour pour juger les querelles du
peuple ; ils te soumettront les affaires importantes, mais régleront eux-mêmes
les causes mineures. De cette manière tu pourras alléger ta tâche, puisqu'ils
en partageront la responsabilité avec toi. Si tu fais cela — et si c'est
bien ce que Dieu t'ordonne —, tu ne t'épuiseras pas ; et de leur côté
tous ces gens pourront rentrer chez eux réconciliés. » Moïse suivit les
conseils de son beau-père : il choisit parmi les Israélites des hommes de
valeur et les désigna comme responsables du peuple, à la tête de groupes de
mille, de cent, de cinquante ou de dix hommes. Ils devaient siéger chaque jour
pour juger les querelles du peuple ; ils soumettaient à Moïse les affaires
difficiles, mais réglaient eux-mêmes les causes mineures. Moïse prit congé de
son beau-père, qui s'en retourna dans son pays. » (Exode 18)
Et enfin un
dernier complément:
Moïse cherche un guide pour le voyage
« Moïse dit à
Hobab, fils de son beau-père madianite Réouel : « Nous partons pour
le pays que le Seigneur a promis de nous donner. Viens avec nous, nous
te ferons participer aux bienfaits que le Seigneur veut accorder à Israël. »
— « Non ! répondit Hobab. Je préfère retourner dans mon pays et ma
famille. » — « Je t'en prie, reprit Moïse, ne nous abandonne pas. Tu
connais les endroits du désert où nous pourrons installer notre camp ; tu
seras notre guide. Si tu nous accompagnes, nous te ferons participer aux
bienfaits que le Seigneur va nous accorder. ( Nombres 10,29- 32)
Nous voici bien perplexes:
Une tribu accueille un fugitif, recherché pour
meurtre, lui offre hospitalité et l'héberge pendant 40 années, pendant lesquels
se créent des liens familiaux forts.
Lorsque le peuple d'Israël fait son
apparition dans le Sinaï,les Madianites
ne leur cherchent pas querelle. Bien au contraire, une alliance de fait est
scellée par un sacrifice et un repas sacré. Ce sont ces mêmes Madianites que
Moïse invite à l'accompagner dans son périple pour lui servir de guide. Alors
quelles sont donc les raisons pour justifier la condamnation à l'extermination
par l'Eternel ?
Le narrateur avance comme justificatif
l'affaire de Baal-Peor.
Nous lisons en effet dans Nombres 25.16 à 17:
« Le Seigneur dit à Moïse :
« Attaquez les Madianites et exterminez-les ! Ils ont été pour vous
des ennemis pleins de perfidie, dans l'affaire de Péor et dans celle de Kozbi,
la fille d'un de leurs princes, qui fut tuée lors du fléau de
Péor. » » (Nb 25,16-17)
Quel retournement de situation, une tribu
accueillante, qui n'avait jamais cherché noise aux Israélites après leur sortie
d'Egypte, contrairement à la tribu des Amalécites qui avait traîtreusement
attaqué l'arrière garde du peuple dans le désert, est vouée à l'extermination,
à cause de l'affaire de Peor et de celle de Kozbi, fille d'un chef de Madian,
sous prétexte qu ' « ils se seraient montrés pleins de
perfidie »
Une explication s'impose:
reprenons les deux affaires l'une après
l'autre :l'affaire de Baal Peor, et l'affaire de Kozbi
A ce
sujet nous lisons dans Nombres 25.1 à3
« Les Israélites
s'installèrent à Chittim. Là ils commencèrent à se livrer à la débauche
avec des femmes moabites. Elles les entraînèrent à offrir des sacrifices
à leurs dieux. Les Israélites partagèrent leurs repas sacrés et adorèrent leurs
dieux. Ils s'associèrent en particulier au culte du dieu Baal-Péor, ce qui
provoqua la colère du Seigneur contre eux. Le Seigneur dit à Moïse : « Prends
les chefs du peuple et fais-les pendre en ma présence, face au soleil ;
alors l'ardente colère que je ressens envers vous s'apaisera. » Moïse
donna cet ordre aux responsables israélites : « Que chacun de vous
tue ceux de ses hommes qui se livrent au culte du Baal de
Péor ! » »(Nb 25,1-3
Relevons deux notices importantes:
les Israélites s'installèrent à Chittim
ils se livrèrent à la débauche
avec les filles de Moab
Sittim, ou vallée des acacias
borde la vallée du Jourdain, vis à vis de Jéricho, dans le pays de Moab, et la
Bible nous rapporte largement le récit du roi de Moab, Balak, qui avait demandé
l'aide d'un devin, dont les oracles étaient réputés, Balam, pour maudire le peuple d'Israël dont
il craignait, à tort d'ailleurs, qu'il n'envahisse son royaume.
Le texte biblique précise bien que
ce sont des femmes moabites qui vont séduire le peuple d'Israël et l'amener à
sacrifier à leur dieu Baal-Peor. A aucun moment, il n'est fait allusion à des
femmes madianites, d'ailleurs les tribus madianites n'occupaient pas cette
région, puisqu'elles nomadisaient dans la région du Sinaï, beaucoup plus au sud
Donc, pour nous résumer, il y a bien:un campement prolongé et pacifique des
Israélites dans le pays de Moab, ce qui a
comme conséquence un rapprochement entre les populations. Par la suite,
sur le conseil du devin Balaam, une séduction des femmes moabites, à laquelle
les hommes israélites n'ont pas résisté, a dégénéré en orgies et sacrifices au
dieu local Baal-Peor. Aucune mention de femmes madianites. Cette situation
provoque la colère de Dieu. Une plaie va
décimer 24 000 hommes d'Israël.Dans le texte, nous lisons cette notice:
« A ce moment-là un Israélite arriva
parmi les siens, accompagné d'une Madianite. Moïse et toute la communauté
d'Israël, qui pleuraient à l'entrée de la tente de la rencontre, les virent. Le
prêtre Pinhas, fils d'Élazar et petit-fils d'Aaron, se leva alors du milieu de
la communauté et saisit une lance ; il pénétra derrière l'homme dans la
tente où il se rendait avec la Madianite et il les tua tous les deux d'un coup
en plein ventre. Aussitôt le fléau qui s'était abattu sur les Israélites prit
fin. Le nombre des victimes s'élevait déjà à vingt-quatre mille morts. Le
Seigneur dit à Moïse : « Le prêtre Pinhas, fils d'Éléazar et
petit-fils d'Aaron, a détourné ma colère des Israélites en se montrant aussi intransigeant
que moi à leur égard. C'est pourquoi, bien que j'exige d'être leur seul Dieu,
je ne les ai pas exterminés. Maintenant, déclare-lui que je conclus avec lui
une alliance qui sera source de paix ; cette alliance, valable pour lui et
pour ses descendants, fait d'eux des prêtres pour toujours. Il a en effet
montré son attachement exclusif pour moi, son Dieu, et il a obtenu ainsi le
pardon en faveur des Israélites. » L'Israélite tué en même temps que la
Madianite s'appelait Zimri, fils de Salou ; il était un des dirigeants de
la tribu de Siméon. Quant à la Madianite, elle s'appelait Kozbi ; son
père, nommé Sour, était chef de plusieurs clans d'une tribu madianite. « Le
Seigneur dit à Moïse : « Attaquez les Madianites et
exterminez-les ! Ils ont été pour vous des ennemis pleins de perfidie,
dans l'affaire de Péor et dans celle de Kozbi, la fille d'un de leurs princes,
qui fut tuée lors du fléau de Péor. » »(Nb 25,6-15)
Cet incident, l'arrivée d'un homme israélite
en compagnie d'une femme madianite, semble anodin à première vue, et sans
relation avec l’idolâtrie du peuple et le culte de Baal Péor. En quoi, les
Madianites ont-ils été des « ennemis pleins de perfidie » dans l'affaire
de Peor, puisque nous avons vu que ce sont des femmes moabites et non
madianites qui entraînèrent le peuple à sacrifier à leur dieu. La relation sexuelle entre Zimri et une femme madianite n'avait rien de perfide,puisqu'il y avait, nous l'avons évoqué
précédemment, des relations pacifiques entre Madian et Israël. Et d'ailleurs
Moïse lui-même n'avait-il pas pris une femme madianite sans que cela n'ait
suscité la colère de l'Eternel. Pour
finir, le texte nous rapporte que Pinhas, fils d'Eléazar, fils du sacrificateur
Aaron, tua l'homme et la femme d'un coup de lance et que la plaie s'arrêta. On
pouvait penser que justice avait été faite, après la mort de 24 000 hommes
israélites et celle de Zimri et de sa compagne madianite Cozbi. Les
coupables avaient été châtiés. Pourtant le texte nous dit
« Le Seigneur dit à Moïse : « Attaquez les Madianites et
exterminez-les ! «
Dans le livre des Nombres, tout un chapitre, le chapitre 31 va nous
conter par le menu le génocide des Madianites . « Le Seigneur donna cet ordre à Moïse : « Va punir les Madianites pour le mal qu'ils ont fait aux
Israélites. C'est après cela que tu quitteras ce monde. » Alors Moïse dit
au peuple : « Il faut que certains d'entre vous prennent leurs armes
et aillent attaquer les Madianites, afin de leur infliger la punition
décidée par le Seigneur. Désignez à cet effet mille combattants dans chaque
tribu. On choisit dans les troupes d'Israël mille hommes par tribu, soit
un total de douze mille soldats. Moïse les envoya tous au combat, accompagnés
du prêtre Pinhas, fils d'Élazar. Celui-ci emportait les objets sacrés, ainsi
que les trompettes pour donner le signal du cri de guerre. Ils attaquèrent le
pays de Madian, comme le Seigneur en avait donné l'ordre par l'intermédiaire de
Moïse, et y massacrèrent tous les hommes. Ils tuèrent aussi les cinq
rois de Madian : Évi, Réquem, Sour, Hour et Réba, de même que Balaam, fils
de Béor. Ils firent prisonniers les femmes et les enfants des Madianites,
et s'approprièrent leurs bêtes de somme, leurs troupeaux et tous leurs biens.
Ils incendièrent leurs villes et leurs campements, puis s'en allèrent avec
le butin, les gens et les bêtes dont ils s'étaient emparés. Ils amenèrent
le tout au camp situé dans les plaines de Moab, près du Jourdain et en face de
Jéricho, pour le présenter à Moïse, au prêtre Éléazar et à toute la communauté
d'Israël.Moïse, Éléazar et les autres chefs de la communauté sortirent du camp
pour les accueillir. Moïse se mit en colère contre les commandants de régiments
et de compagnies qui revenaient de cette campagne. Il leur dit :
« Quoi ! vous avez laissé la vie aux femmes ! Vous le savez
bien, pourtant, ce sont des femmes madianites qui, sur les conseils de Balaam,
ont poussé les Israélites à commettre des fautes graves envers le Seigneur,
lors de l'affaire de Péor ; et à la suite de cela un fléau s'est abattu
sur le peuple du Seigneur. Eh bien maintenant, tuez tous les garçons, de
même que toutes les femmes qui ont été mariées. Mais vous pouvez garder
pour vous toutes les filles encore vierges. Tous ceux d'entre vous qui ont
tué quelqu'un ou touché un cadavre doivent demeurer sept jours hors du
camp ; ils devront se purifier le troisième et le septième jour.
Cet ordre concerne aussi vos prisonnières. Vous purifierez également les
vêtements, et tous les objets en peau, en poil de chèvre ou en bois. Puis le prêtre
Éléazar dit aux hommes qui avaient participé au combat : « Voici les
règles que le Seigneur a communiquées à Moïse : “Les objets en or, en
argent, en cuivre, en fer, en étain ou en plomb, c'est-à-dire les objets qui ne
brûlent pas, vous les purifierez par le feu, puis vous les tremperez
dans l'eau de purification. Ce qui brûle, vous vous contenterez de le tremper
dans l'eau de purification. Après avoir lavé vos vêtements le septième jour,
vous serez purs et vous pourrez regagner le camp.»
Le partage du butin
« Le Seigneur dit à
Moïse : « Éléazar et toi, avec l'aide des chefs de famille de la
communauté, vous allez faire le compte de tout ce qui a été capturé, gens et
bêtes. Tu en feras ensuite deux
parts égales, l'une pour ceux qui ont été mobilisés et ont pris part au combat,
l'autre pour le reste de la communauté . Sur la part attribuée aux
combattants, tu retiendras pour moi une redevance qui s'élèvera à un être
humain sur cinq cents, et à un animal sur cinq cents, en ce qui concerne les
bœufs, les ânes, les moutons et les chèvres. Tu remettras au prêtre Éléazar la
redevance ainsi prélevée pour moi. Sur la part attribuée au reste des
Israélites, tu retiendras un être humain sur cinquante, et un animal sur
cinquante, en ce qui concerne les bœufs, les ânes, les moutons, les chèvres et
les autres bêtes ; et tu remettras cette redevance aux lévites, qui
s'occupent de ma demeure sacrée. »
Moïse et Éléazar exécutèrent l'ordre donné par
le Seigneur à Moïse. Du butin pris à l'ennemi par les combattants, il restait
675 000 moutons et chèvres, 72 000 bœufs, 61 000 ânes et
32 000 filles encore vierges. La part attribuée aux combattants fut la
suivante : 337 500 moutons et chèvres, dont 675 furent prélevés pour
le Seigneur ; 36 000 bœufs, dont 72 pour le Seigneur ;
30 500 ânes, dont 61 pour le Seigneur ; 16 000 êtres humains,
dont 32 pour le Seigneur. Moïse remit au prêtre Éléazar la redevance destinée
au Seigneur, selon l'ordre reçu. La part attribuée au reste de la communauté
d'Israël était l'équivalent de celle des combattants. Elle comprenait
337 500 moutons et chèvres, 36 000 bœufs, 30 500 ânes et
16 000 êtres humains. Sur la part attribuée aux Israélites, Moïse préleva
une redevance d'un être humain sur cinquante, et d'une bête sur
cinquante ; et, selon l'ordre qu'il avait reçu du Seigneur, il la remit
aux lévites, qui s'occupent de la demeure du Seigneur.
Une offrande volontaire
pour Dieu
Les chefs militaires, commandants de régiments
et de compagnies, se réunirent auprès de Moïse et ils lui dirent :
« Nous avons fait le compte des combattants placés sous nos ordres : il
n'en manque aucun. C'est pourquoi nous apportons des offrandes pour le
Seigneur, afin que nos vies soient préservées ; chacun de nous offre les
objets d'or qu'il a trouvés : chaînettes, bracelets, anneaux, boucles
d'oreille et colliers. »
Moïse et le prêtre Éléazar acceptèrent tous
les objets d'or ouvragés qu'ils apportèrent. Le poids total des objets
offerts au Seigneur par les officiers fut d'environ 170 kilos. Quant aux
simples soldats, chacun garda pour lui-même le butin qu'il avait ramassé. Moïse
et Éléazar déposèrent tous les objets d'or offerts par les officiers
dans la tente de la rencontre, afin que le Seigneur n'oublie pas les Israélites.
Ce récit est, à y bien réfléchir, effroyable
et révoltant. J'invite le lecteur à s'évader un instant de la lecture des mots
imprimés, et à essayer de revivre les événements rapportés, dans la réalité des
cris des victimes, du sang et des cadavres.
Première étape: massacre de tous les hommes
adultes de la tribu.
Le texte ne nous indique pas le nombre, mais
on peut émettre l'hypothèse de plusieurs milliers à dizaines de milliers, si on
se base sur les chiffres mentionnés plus loin. Imaginons la mise à mort, par
l'épée et la lance, de tous ces hommes, la masse de cadavres ensanglantés,
certains encore vivants et agonisants. Non, ce ne sont pas des fantasmes, les
récits des massacres commis par les Einsatzgruppen allemands dans les pays de
l'Est à l'encontre d'hommes désarmés nous donnent une idée de ces scènes
horribles.
Deuxième étape: capture des femmes et des
enfants
Ils sont
emmenés comme butin de guerre avec le bétail, comme du bétail !
Troisième étape: le tri des victimes
Les femmes sont « examinées »
dans leur intimité, l'une après l'autre et triées, les unes, c'est à dire les
femmes âgées veuves et les femmes mariées même celles portant des enfants en
bas-âge ou enceintes, sont destinées à
la mort, les fillettes et les adolescentes encore vierges sont réservées pour
le plaisir sexuel des guerriers et le travail épuisant d'esclaves.
Quatrième étape: le massacre des femmes
destinées à la mort, ainsi que de tous les
enfants mâles, depuis le nourrisson jusqu'à l'adolescent
Que s'est-il passé avec les nourrissons et
bébés de sexe féminin, le récit ne les évoque pas, on ne peut qu'émettre des
hypothèses: mise à mort avec leurs mères, ou dans le meilleur des cas, ces
bébés et nourrissons ont-ils été remis à leurs grandes sœurs épargnées ?
Cinquième étape: mise en esclavage sexuel des
fillettes et adolescentes, au nombre de 32000 !!,
ce qui à contrario, laisse entendre qu'un nombre similaires de jeunes garçons
et adolescents ont déjà été massacrés.
Sixième étape: le pillage des objets de valeur
des victimes
Les soldats israélites vont arracher, aux cadavres des femmes madianites
les « chaînettes, bracelets,
anneaux, boucles d'oreille et colliers. »
Septième étape: la répartition du butin
Il faut noter que c'est Yahwe lui-même qui va
donner des instructions précises pour l'affectation du butin ( êtres humains,
bétail et matières précieuses) avec même une partie à titre de tribut réservé comme offrande à Yahwe
comprenant:
675 moutons,72 bœufs,61 ânes et( mentionnées
après les animaux !), 32 adolescentes et fillettes
Faut-il comprendre que cette part a été
offerte en sacrifice à Dieu sur l'autel, animaux ainsi que les êtres humains ?
le texte dit simplement que « Moïse
donna au sacrificateur Eléazar le tribut réservé comme offrande à l'Eternel,
selon ce que l'Eternel lui avait ordonné »
La part revenant aux lévites qui avaient la
garde du tabernacle s'ajoutant au tribut précité.
Huitième étape: la purification des soldats ce qui semble bien indispensable
après tant de meurtres !
Tout personne dotée d'un peu de raison et d'un
reste d'humanité, c'est à dire un être humain tout simplement, à l'évocation de
ce récit, ne peut que s'interroger. Est-il possible que Dieu ait ordonné un
pareil massacre avec toutes ses horreurs, en opposition d'ailleurs avec ses
commandements ? C'est bien dans la Bible que nous lisons:
« Sachez le aussi, je redemanderai le
sang de vos âmes, je le redemanderai à tout animal;et je le redemanderai l'âme
de l'homme à l'homme, à l'homme qui est son frère. Si quelqu'un verse le sang
de l'homme, par l'homme son sang sera versé,
car Dieu a fait l'homme à son image »(Genèse 9.5 à 6)
« Tu ne tueras point »( Exode
20.13) un des dix commandements.
Comment concilier ce Dieu appelé Yahwe,
vengeur et sanguinaire, avec le Père céleste plein de bonté pour toutes ses
créatures, les bons comme les méchants, que nous a révélé Jésus?
Roger Garaudy nous apporte sa réponse : « Les
textes que nous venons de citer ne sont que des échantillons parmi une foule
d'autres quoi fourmillent dans l'Ancien Testament sans qu'il soit possible d'y
voir une métaphore. Ils servent encore aujourd'hui( nous y reviendrons en
conclusion de cet article) à justifier des politiques. Comment peuvent-ils
figurer parmi les « textes sacrés » des chrétiens aux côtés des
prophètes et des évangiles ? Comment ce Dieu sanglant et tribal peut-il être
assimilé au Père qu'invoque Jésus, et ses plus féroces exécutants, par exemple
Josué, être considéré comme des précurseurs de Jésus ? »(4)
Mais que le lecteur se rassure, ce massacre
avec toutes ses horreurs, n'a jamais eu lieu, il n'est que le produit de
l'imagination fertile (et perverse) du rédacteur de ce texte. Et j'en apporterai la preuve par les textes eux-mêmes.
La contradiction dans le texte lui même, qui parle des filles de Moab comme ayant séduit le peuple à
Chittim, pour ensuite en accuser les Madianites, alors que le peuple d'Israël
campe dans la vallée des acacias, en face de Jéricho, dans le territoire de Moab,
bien loin du désert aride du Sinaï où nomadisent les tribus madianites. Les
femmes madianites auraient dû faire un long déplacement, entre 200 et 300
km, pour se rendre à Chittim,en face de Jéricho, je le rappelle,
à une époque où il n'existait aucun moyen de transport, à l'exception des ânes,
alors que durant les 40 ans où le peuple séjourna dans le désert, et qu'il
côtoyait les tribus madianites, les
relations étaient empruntes d'amitié et de respect mutuel, sans jamais de
tentative de séduction ni d'orgies ou autres fêtes à connotation sexuelle.
C'est invraisemblable.
Les chiffres des victimes sont
invraisemblables:
32000 fillettes et adolescents, selon le texte, donc on peut y ajouter, sans crainte de se
tromper, autant de garçons et d'adolescents, soit 32000 quant aux adultes, hommes et femmes, on peut, au vu du nombre
d'adolescents 64000, les estimer à au moins 40000, soit plus de 100 000
personnes
100 000 Madianites nomadisant dans les plaines
et les montagnes désertiques du Sinaï, c'est évidemment
un chiffre fantaisiste, lorsqu'on connaît la difficulté pour ces tribus
nomades, réduites souvent à un clan, de
trouver suffisamment de ressources en pâtures et en points d'eau pour le
bétail. Il suffit de se rappeler les luttes âpres entre les bergers d'Abraham
et ceux du roi Abimélek autour de quelques puits.
quant aux chiffres du butin prélevé parmi les
troupeaux, il tombe dans la déraison.
Qu'on en juge:
six cent soixante quinze mille brebis, oui 675
000 brebis ! Imaginer 675 000 brebis, dans un désert, aux
rares points d'eau et aux pâturages à l'herbe rare, et surtout comment imaginer
rassembler un tel troupeau,le déplacer
sur un si long parcours, le nourrir et l'abreuver, relève de l'impossible, ou
de l'imaginaire fertile d'un scribe qui n'a jamais vécu dans un désert avec un troupeau de
moutons et de chèvres.
Mais il y a encore mieux: dans la liste des troupeaux, après les brebis,
les bœufs: soixante douze mille bœufs, oui, vous avez
bien lu, 72 000 bœufs.
Si à la rigueur, des brebis et des chèvres se
contentent d'un maigre pâturage, pour nourrir des bœufs, il faut de grasses
prairies, et s'imaginer que des pasteurs nomades dans le désert aride du Sinaï
aient pu posséder un tel cheptel, est totalement déraisonnable. Et s'imaginer
ensuite qu'il ait été possible de
rassembler d'abord, puis de conduire un tel troupeau, avec les moutons
et les chèvres, depuis le désert du Sinaï,jusqu' au camp situé dans
les plaines de Moab près du Jourdain à face de Jéricho , sur plusieurs
centaines de kilomètres, à travers un paysage aride, sans pâturages et aux rares points d'eau, relève
de l'exploit impossible. Demandez à des berger et des éleveurs ce qu'ils en
pensent !
Enfin le butin en or, sous forme de bijoux
« chacun
de nous offre les objets d'or qu'il a trouvés : chaînettes,
bracelets, anneaux, boucles d'oreille et colliers......Moïse et le prêtre
Éléazar acceptèrent tous les objets d'or ouvragés qu'ils apportèrent. Le poids
total des objets offerts au Seigneur par les officiers fut d'environ 170
kilos. »
Voici des nomades bien richec, qui détiennent
en sus de leurs énormes troupeaux, un tel trésor d'or ! C'est là aussi un
chiffre totalement fantaisiste.
Et en dernier lieu, nous apprenons par la
Bible elle même que les Madianites n'ont jamais été anéantis. En effet quelques dizaines d'années, deux ou
trois générations plus tard, voici le récit que nous lisons dans le livre des
Juges au ch.6:
« Les Israélites firent de nouveau ce qui
déplaît au Seigneur. C'est pourquoi le Seigneur les livra aux Madianites
pendant sept ans. Les
Madianites opprimaient durement Israël. Pour leur échapper, les Israélites
utilisèrent les couloirs, les cavernes et les endroits escarpés des montagnes.
Chaque fois que les Israélites avaient ensemencé leurs champs, les Madianites venaient
les attaquer, avec les Amalécites et des nomades de l'Orient. Ils campaient sur
leurs terres et détruisaient les produits du sol jusqu'à proximité de Gaza. Ils
ne laissaient rien à manger aux Israélites, ils ne leur laissaient ni moutons,
ni bœufs, ni ânes. En effet, ils se déplaçaient avec leurs troupeaux et leurs
tentes, ils arrivaient en masse comme les sauterelles ; ils étaient si
nombreux, eux et leurs chameaux, qu'on ne pouvait pas les compter. Ils
envahissaient le pays et le dévastaient. Ainsi, les Israélites furent plongés
dans une telle misère par les Madianites qu'ils appelèrent le Seigneur à leur
secours. » (Juges 6) et un peu plus
loin : « Zéba et Salmounna( les deux princes madianites qui avaient échappés à la bataille)
étaient à Carcor avec leurs troupes qui ne comptaient plus que quinze mille
hommes. C'était tout ce qui restait de l'armée des nomades de l'Orient, car
cent vingt mille soldats avaient été tués.Gédéon prit la route que
suivent les nomades, à l'est de Noba et de Yogboha, et il attaqua le camp
ennemi qui se croyait en sécurité. Les deux rois madianites Zéba et Salmounna
s'enfuirent, mais il les poursuivit, les captura et sema la panique dans toutes
leurs troupes. » (Juges 8,10-11)
Ainsi donc la tribu des Madianites, quelques générations
après son extermination par Moïse, avait reconstitué ses effectifs, puisqu'elle
pouvait aligner, avec certes l'appui d'une autre tribu, les Amalécites, et les
bédouins du désert, une armée aussi nombreuse. Encore un indice qui nous
apporte la preuve indirecte que le récit du massacre par les soldats israélites
commandés par Moïse et Josué était pure
invention.
Alors si nous voilà rassurés, et au fond
soulagés, il reste une question qui nous taraude : pourquoi le rédacteur de ce
texte a-t-il inventé un pareil récit?
En même temps, nous réalisons que ce n'est
certainement pas Moïse l'auteur, car comment supposer un seul instant qu'il ait
pu, peu de temps avant sa mort, composer le récit imaginaire d'un massacre
abominable. Et même, un soupçon se fait jour: le scribe qui a composé ce
récit, sans doute sur instructions, aurait-il volontairement glissé dans le
texte quelques invraisemblances, pour attirer l'attention des futurs
lecteurs, un peu comme les cailloux blancs répandus sur le chemin par le petit
Poucet, en voulant leur adresser, par ce moyen, un signal codé:
« Attention, ce récit est pure invention ! »
Mais cette conclusion suscite elle même des
questions:
1) Pourquoi avoir accusé les femmes madianites
des excès commis par les femmes moabites ?
Comme Dieu avait interdit au peuple d'Israël
de s'en prendre au peuple de Moab, nous lisons en effet: « L'Eternel
me dit: N'attaque pas Moab et ne te mets
pas en campagne pour lui faire la guerre: car je ne te donnerai pas de
possession dans son pays:c'est aux fils de Loth que j'ai donné Ar-Moab en
possession »(Dt 2,9) il fallait lui trouver un coupable de
substitution, les Madianites étaient à cet égard les coupables tout trouvés.
2) Pourquoi avoir imputé à Moïse, et à Dieu, de
tels crimes imaginaires ?
Seuls les « inventeurs » de ce récit
abominable pourraient nous donner leurs raisons, en tout cas nous sommes
confrontés à une question terrible, quel esprit inspirait le ou les écrivains,
ou leurs donneurs d'ordre, pour écrire de pareils récits ?
Mais il reste néanmoins à réfléchir à une
autre question :
Il y a entre ce récit, imaginaire certes, et
le récit, lui bien réel, de l'extermination des juifs par les nazis pendant la
dernière guerre mondiale de nombreuses et troublantes coïncidences.
Examinons-les:
Anéantissement total d'un peuple en raison de
sa race
Les victimes sont conduites et rassemblées au
lieu de leur mise à mort
Les victimes sont examinées et triées ,
certaines épargnées ( travail forcé, ou esclavage sexuel)
La mise à mort ressemble plus à un abattage de
masse
Les victimes, mortes, sont dépouillées de
leurs objets de valeur
Les objets en or sont fondus pour les
transformer en lingots
Les bourreaux, ou exécuteurs, ne rencontrent
aucune résistance de la part de leurs victimes
Ces coïncidences sont trop nombreuses pour être anodines, ou
le fait du hasard, ou de l'esprit simplement inventif du scribe. Seul un esprit
pervers, tordu,sous une inspiration diabolique, a pu inventer et sans doute se
délecter à écrire de pareilles horreurs.
Dès lors, comment imaginer un seul instant que
ce récit soit d'inspiration divine, ou que son ou ses auteurs aient été
inspirés par l'esprit de Dieu ?
Mais alors pourquoi les scribes ont-ils
inventé un récit aussi sanguinaire, en n'hésitant pas à charger Moïse de ce
sang innocent et en présentant Yahwe comme l'instigateur de ce génocide ?
C'est là une
question redoutable qui n'a pas de réponse, sinon à ....
Sans doute les exégètes vont nous chercher de
savantes explications, et le débat pourrait se cantonner aux discussions entre
théologiens. Malheureusement ces textes
sont lus aujourd'hui encore par certains comme récits véridiques, par les chrétiens fondamentalistes d'une part, mais
surtout par beaucoup de juifs en Israël. C'est là le drame. Israël Shahak(5)
nous rappelle « l'influence pernicieuse des lois particulières contre
les anciens Cananéens et les autres nations qui habitaient la Palestine avant
la conquête de Josué. Toutes ces nations devaient être entièrement exterminées,
selon les exhortations génocidaires de la Bible, que le Talmud et la
littérature talmudique reprennent avec encore plus de véhémence. Des rabbins
influents, qui ont de très nombreux adeptes parmi les officiers israéliens,
identifient les Palestiniens(voire tous les arabes), à ces anciennes nations,
ce qui donne un sens très actuel à des commandements tels que « tu n'en
laisseras rien subsister de vivant(Dt 20,16) ». Les versets de la Bible
exhortant au génocide des Madianites (Nb 31,12-20), (se
référer à notre analyse ci-dessus) ont été repris solennellement par un
important rabbin israélien pour justifier le massacre de Qibbiya(6) ;
sa déclaration a reçu un vaste écho dans
l'armée. Je n'en finirai pas de citer les proclamations sanguinaires contre les
Palestiniens, lancées par des rabbins au nom de ces lois »
Quand donc les chrétiens
vont-ils reconnaître que ces textes ne sont certainement pas inspirés par le
Dieu de Jésus Christ, son Père et notre Père, et que le dieu Yahwe, qui a
ordonné ces génocides, un dieu tribal et sanguinaire, comme l'appelle Roger
Garaudy, n'est pas le Dieu annoncé par Jésus ?
Mais reconnaître cela, ce serait faire trembler la
chrétienté sur ses fondements .
Marc
(1) « Vers une guerre de religion ? Le débat du siècle » Roger Garaudy.
Editions Desclée de Brouwer
(2)Yahweh, le nom du dieu tribal d'Israël dans la bible
hébraïque, se traduit dans nos bibles par "l'Eternel " ou " le
Seigneur". A noter la découverte d'une inscription datée du règne
d'Aménophis II( début du XIV siècle avant J.C.) au temple de Soleb en
Nubie. Elle concerne les bédouins Shosou. On peut lire, parmi plusieurs
toponymes, celui de Yahweh ( sous la forme hiéroglyphique yhw) en terre de Shosou. Il
s'agit sans doute d'un sanctuaire consacré à Yahweh dont le nom
apparaît pour la première fois dans un contexte étranger à la Bible. Guy Rachet, La Bible, mythe ou réalité en 2 vol. Editions du rochet 2003. Vol. 1 p.200-201
(3)Le livre du Deutéronome ( Dt) fait partie du
Pentateuque avec les livres de la Genèse, de l'Exode, du Lévitique et des
Nombres. Viennent ensuite les livres historiques comme Josué, les Juges, Samuel
….etc
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(5) Israël Shahak, un juif israélien, né en Pologne, interné au camp de
Belsen, professeur de chimie organique, fut durant toute sa vie un infatigable
militant de droits de l'homme en Israël. Dans son livre « Histoire
juive – Religion juive. Le poids de trois millénaires » il dénonce
l'étendue de l'influence qu'exerce sur l'Etat séculier les orthodoxes
religieux. Editions « La vieille Taupe(Pierre Guillaume) » 1996
(6) R.Sha'ul Yisra'eli, « Taqrit
Qibbiya Ke'or Halakhah »(Les événements de Qibbiya à la lumière de la
Halakhal) in Hattorah Wehamedinah,vol.5,1953/4 https://fr.wikipedia.org/wiki/Massacre_de_Qibya
(Note 2 Modifiée par l'auteur le 17/06/2016)
[NDLR: LIRE AUSSI: http://rogergaraudy.blogspot.fr/2010/10/vers-une-guerre-de-religion.html.]