Quelle que soit la solution choisie
la confusion de la croyance
religieuse et de la foi vivante et
agissante à l'intérieur de
toutes les religions rend le problème
insoluble par la résurgence
des intégrismes, qui consistent à
prétendre que tous les
problèmes ont été résolus, et pour
toujours, par leurs pères
réponses et des solutions aux
interrogations et aux problèmes
de leur temps, cela ne nous dispense
en aucune manière de la
responsabilité de résoudre, à partir
de leurs principes, les problèmes
de notre temps : aucun sutra bouddhiste,
aucun verset
de la Bible ou du Coran, ne nous
permet de résoudre, sans
une interprétation préalable, les
problèmes posés par l'énergie
atomique, les multinationales, la
spéculation boursière, le
colonialisme, ou autres, qui ne se
posaient pas au temps des
prophètes. Nous pouvons seulement, à
partir des principes
qu'ils ont apportés, prendre, à tout
risque, la responsabilité de
les appliquer dans des situations
historiques radicalement
nouvelles.
Ceci n'implique aucun relativisme, ni
éclectisme, ni syncrétisme.
Chaque religion a sécrété, autour des
principes communs
à toute acceptation de la
transcendance, des valeurs absolues,
des cultes avec leurs rites et leurs
dogmes propres à chaque
culture pour tenter une approche de
l'absolu. Il se peut que
cette liaison ou cette soumission à
Dieu qui exige la participation
entière de notre être, y compris de
notre corps, donne une
forme particulière à la prière et à
l'adoration, qui vont ensuite
informer notre action.
La tradition culturelle de chaque
peuple peut ainsi s'exprimer
par une attitude particulière du
corps, celle du yoga (joug)
soumission à Dieu, pour les uns, de
la prosternation ou de
l'agenouillement pour d'autres.
L'essentiel est que cette posture du
corps facilite la communication
avec Dieu ou avec la sagesse (de
quelque nom qu'on les
désigne), et ne se dégrade pas en une
gymnastique sans âme.
La diversité des religions, par la
fécondation réciproque des
cultures qui les spécifie, est une
richesse que l'on ne peut
détruire en imposant à l'autre la
forme d'expression dont nous
sommes, avec notre culture, les
héritiers.
Nous ne pouvons revendiquer le
monopole des voies d'accès
à la transcendance, que nous
l'appelions salut, libération,
moksha ou nirvana.
Nous pouvons seulement, avec le plus
grand respect du comportement
rituel des autres, et des symboles
par lesquels ils
expriment leur foi, leur sagesse ou
leur Dieu, nous enrichir de
leur expérience, gravissant, par des
voies diverses, la même
cime, inaccessible peut être, qui
nous fait rechercher le sens de
notre vie et de notre histoire, et
les voies de son accomplissement.
En résumé, ce qu'il y a le plus
précieux, ce n'est pas ce qu'un
homme dit de sa foi, mais ce que
cette foi fait de cet homme.
Comment le libère-t-elle de ses aliénations
?
C'est-à-dire de ses ambitions
personnelles réalisées par l'écrasement
des autres, de ses projets partiels,
individuels ou
nationaux, qui ne tendent pas à la
création d'une communauté
universelle, symphonique, fin suprême
de la foi qui appelle
toutes les religions à la
transcendance, au dépassement de
soi.
Roger Garaudy, L’avenir
mode d’emploi, pages 187 à 189