Michaël Prazan et Adrien Minard sont deux gentils garçons, bardés
de diplômes. Docteur és lettres, pour le premier. Diplômé de Sciences-Po et
agrégé d’histoire pour le second.
http://calmann-levy.fr/livres/roger-garaudy-itineraire-dune-negation/ |
Ils se sont
mis à deux pour écrire un bouquin très intéressant : Roger Garaudy. Itinéraire d’une négation.
Notez bien
que, dans un premier temps, j’avais feuilleté le livre un peu au hasard et
j’étais tombé sur je ne sais plus quelles perles. J’avais renoncé à le lire. À
Serge Thion, qui m’interrogeait, j’avais répondu : « Laisse tomber.
Rien de neuf. Le qualitatif n’est pas leur force de frappe ».
Je n’ai pas
changé d’avis sur le dernier point. Mais j’avais tort de n’avoir pas poursuivi
ma lecture. Car s’il n’y a rien de neuf et si je n’y apprends rien, on y
apprend beaucoup sur les procédés par lesquels Michaël et Adrien confortent
leurs certitudes, et réflexion faite, c’est un livre tout à la gloire de laVieille Taupe. Elle n’est pas répertoriée dans l’index, mais elle est
omni-présente dans le livre, et votre
serviteur y est répertorié 45 fois !
Finalement
ce livre contient beaucoup d’informations exactes, puisées aux meilleures
sources ; dans les deux camps : l’AAARGH, et les bulletins de la VT,
pour le camp révisionniste. Ils sont manifestement lus attentivement et
épluchés, quasiment en temps réel.
Il est bon
que toutes les informations vraies circulent. Bien sûr elles sont, dans ce
livre, polarisées par les préjugés.
Justement,
les préjugés de Michaël et d’Adrien sont bien connus et identifiables. Au
surplus ce livre permet assez aisément de pénétrer dans leur psyché. Tout ce
qu’il contient peut donc aisément être retourné. Et je pense que plusieurs des
lecteurs de ce livre, a priori hostile
à Garaudy et à la « négation » de ce qui est arrivé aux Juifs pendant
la guerre (évidemment !) n’ont certes pas changé d’avis à la lecture de ce
livre, mais se sont plusieurs fois gratté l’occiput. Ils possèdent maintenant
une foule d’informations que nous n’aurions pas eu les moyens de diffuser
nous-mêmes, et qui ne demandent qu’à s’organiser maintenant dans leur esprit
d’une manière qui ne le gratouillerait plus.
Donc la
diffusion de ce livre est une bonne chose pour le révisionnisme, et pour la
Vieille Taupe en particulier ! Il établit d’une manière convaincante que
la conférence révisionniste de Téhéran (sur laquelle il s’ouvre, pour la
dénoncer) résulte en définitive d’initiatives de la VT, et en particuliers de
la publication des Mythes fondateurs de
la politique israélienne de Roger Garaudy, et de l’écho que ce livre a eu,
en particulier dans les pays arabes.
Pour le
reste, c’est simple. Puisque les chambres à gaz ont existé (point de départ
obligé pour un universitaire, sinon il cesse de l’être) ceux qui les nient, et
par conséquent Garaudy, sont nécessairement des crétins ou des antisémites, ou
plus probablement, les deux à la fois. Et la vie de Garaudy est un naufrage. Et
sa philosophie itou…
En dehors de
quelques récits totalement mensongers, visant à présenter des révisionnistes
comme ridicules, agressifs et violents, où l’on peut penser que nos duettistes
ont été induits en erreur par leurs informateurs ou leurs sources, et quelques
entourloupes grossières, classiques du genre[1][19], la documentation est dans l’ensemble remarquable et
véridique !
Si bien que
s’il venait à un lecteur l’idée que le postulat de départ pourrait n’être pas
aussi évidemment assuré, le livre se transforme en panégyrique des
révisionnistes en général et de la VT [laVieille Taupe – ndlr] en particulier ! Et de toute façon il diffuse
largement, jusque dans des têtes complètement inaccessibles pour moi,
exactement ce que je voulais y diffuser ! Par exemple l’existence de la
consigne de mettre un t à médiats
jusqu’à ce qu’ils se soumettent. Ou l’image d’une Vieille Taupe pacifique, qui
a « cessé le combat révisionniste », et d’un pauvre homme isolé qui
fait le tour de la place de Beaune en brandissant, crosse en l’air, son
fusil !
La manière
dont l’affaire Abbé Pierre est racontée au début du livre, peut se retourner
comme une crêpe. Surtout si on relève dans l’épilogue (p.407) que l’un des
derniers déplacements de l’abbé (janvier 2006) avant sa mort, fut pour se
rendre chez Garaudy. « Deux frères, deux doigts de la main, nous le sommes
restés ». Et si page 251 on avait relevé cette citation d’une lettre du 15
juin 1996 envoyée au Monde (bien sûr
non publiée) : « Pour moi, au
monastère, j’ai pu au calme lire et annoter le livre incriminé. Je n’y ai rien
trouvé de blâmable ».
L’abbé était
devenu « révisionniste » !
Les voies de
Dieu sont insondables.
On ne peut
pas reprocher à Michaël et Adrien d’avoir foi aux chambres à gaz. Mais, dans
l’épilogue, leurs commentaires sur le dentier de Garaudy, et le ton général
d’ironie sur les dégradations qu’entraîne la vieillesse ne sont déshonorants
que pour eux.
Pierre
Guillaume