07 juillet 2014

La recherche de Dieu, par Roger Garaudy



Le DIEU que nous cherchons n’est pas celui des philosophes, mais celui de JESUS.
Nous ne pouvons connaître de DIEU que ce que nous en a révélé JESUS qui rend visible, par ses paroles et ses actes, le DIEU caché.
JESUS n'a de précédent dans aucune des images que les peuples se faisaient jusque là de DIEU.

1 - Sa vie et sa mort se distinguent radicalement des dieux de puissance (ZEUS brandissant la foudre ou YAHVE "dieu des armées"). Il n'est pas le fils de ces dieux là, ni 1'héritier du « condottiere » DAVID (SAMUEL I et II, Livre des Rois).

2 – Sa vie et sa mort excluent toute extériorité d'un DIEU qui dirigerait "d'en haut" le destin des hommes. Il est pleinement homme comme il est pleinement le DIEU qui se révèle en priorité aux pauvres, aux plus démunis, avec leurs défaites et leurs responsabilités.

3 - Sa vie et sa mort mettent fin à l’idée maudite de "peuple élu propre à toutes les religions tribales, et à leurs dieux "jaloux" et partiaux en faveur de leur peuple et lui donnant la terre et la victoire par le massacre des autres.
Il est révélateur qu'il ne soit fils d'aucun homme particulier: ni chrétien, ni juif, ni musulman, ni chinois. Il est le FILS DE L' HOMME.

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Sa vie nous permet de rechercher DIEU, le DIEU vivant.
1 ) Le silence de DIEU: le Père.
2 )  Le verbe de DIEU: le Fils.
3 ) La présence de DIEU: 1'Esprit.

Le plan est trinitaire car je pense, comme le Père PANIKKAR, que la Trinité n'est pas exclusivement chrétienne: elle nous aide à entrevoir toutes les dimensions de 1’homme et de DIEU. (Un mystique musulman du XIIème siècle RUZBEHAN de Shiraz l'a formulée ainsi: "DIEU est 1'unité de 1'amour, de 1'amant et de l’aimé .... ").

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I . LE SILENCE DE DIEU : LE PERE .
Nous ne pouvons rien dire de DIEU tel qu'il est "en soi", mais seulement ce qu'il est" pour nous."II n'est d'approche possible que négative:
- l’apophatisme: pour nous libérer de la "philosophie de l'être" des grecs. DIEU n'est pas un être, mais 1'acte qui fait être.
- la kénose: faire le vide en nous pour laisser toute la place à DIEU, comme 1'écrivait Maître ECKART. (Comme d’ailleurs la sagesse du Tao, 1'ascèse indienne, ou le "fana" des soufis musulmans.)
Vide des désirs partiels ou des volontés fanfaronnes.
- la poésie : DIEU transcendant ne peut être saisi par nos concepts, mais seulement désigné par nos métaphores, nos symboles , nos mythes, comme il ne nous parle, à travers ses messagers que par "paraboles".
La poésie a toujours été le langage des mystiques: de ROUMI ou de IBN ARABI à SAINT-JEAN de la Croix ou à Sainte THERESE d'Avila.
Le danger est de figer le mythe (création des peuples et éternellement présent comme marquant les étapes de 1’humanisation de 1'homme)en une histoire, toujours écrite par les vainqueurs, n' appartenant qu'au passé, et servant à justifier les nationalismes, les colonialisms, les intégrismes, toutes les prétentions de "peuples élus".

II. LE VERBE DE DIEU: LE FILS
Une deuxième approche,dans la recherche de DIEU, est 1'écoute et 1'amour de ses témoins.
D’abord parce qu'elle nous oblige à sortir de notre petit "moi". « Etre pour les autres est 1'unique expérience de la transcendance»  écrivait le pasteur BONHOEFFER. L'amour est ainsi le commencement et la fin de 1'expérience de DIEU.
JESUS incarne, à 1'inverse de tous les dieux de puissance, la descente de 1'amour dans 1'histoire, brisant tous les enchaînements de violence, 1’une cause et 1'autre effet, mais toujours aboutissant au triomphe sur 1'autre, la substitution d'une domination à une autre.
JESUS a toujours refusé d'être le MESSIE que les juifs attendaient: un émule de DAVID. Dans le Royaume qu'annonce JESUS on n'entre pas par la conquête mais par le dépouillement.
Sa résurrection n'est pas un événement du passé qui se serait produit une seule fois par un miracle de régénération cellulaire.
La résurrection, c'est tous les jours: ce n'est pas un miracle de la puissance mais de la foi.
JESUS est vivant, et présent comme un ferment transformateur de la vie, et, pour tous ceux qui croient en lui: " Nous sommes passés de la mort à la vie", écrit JEAN (III, 14).
La résurrection n’appartient pas au passé, comme un événement de la biologie ou de 1'histoire.
Elle n'appartient pas non plus à 1’avenir comme la promesse d'une
"fin des temps" où nous serait garanti un même "miracle" pour ressusciter à notre tour.
La résurrection c'est le présent et la présence: la présence de JESUS vivant.

III. LA PRESENCE DE DIEU: L'ESPRIT.
"Esprit toujours actif, combien je te ressens", écrivait GOETHE.
DIEU non pas conçu comme un être, mais vécu comme une force.
La théologie de la Croix n'est pas une exaltation de la douleur. Ce n'est pas la douleur qui délivre et qui sauve: c'est 1'espérance et 1'amour agissant pour y mettre fin.
La foi en la résurrection c'est le choix d'une forme nouvelle de vie: un engagement pour délivrer "les plus petits d'entre nous", crucifiés aujourd'hui chaque jour comme le fut JESUS.
La théologie de la Croix n'est pas une théologie de la résignation à la pauvreté subie, elle est une théologie de la libération, par le nécessaire sacrifice de la pauvreté voulue.
C'est celle de BOUDDHA né prince et devenu mendiant pour donner 1' exemple de 1'extinction du désir.
C'est celle de SAINT-FRANÇOIS né d'un riche marchand d'Assise et devenu le "poverello" dans un monde où 1' argent commençait à devenir roi.
C'est celle du Coran où DIEU dit: "Quand nous voulons anéantir une cité ... nous faisons les riches détenteurs du pouvoir." (XVII, 16)
C’est celle de JESUS, annonçant un Royaume d'où la richesse est exclue.
C'est celle des Pères de 1'Eglise, nous enseignant tous, comme CLEMENT d’Alexandrie, que "DIEU est devenu homme pour que 1'homme puisse devenir DIEU."(Protreptiques I,9)
C’est celle des théologiens de la libération pour qui la théologie n'est pas une carrière libérale, et luttant pour que chaque homme,  quelle que soit son origine puisse développer pleinement toutes les richesses humaines qu'il porte en lui.
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Aujourd'hui, après cinq siècles de colonialisme et cinquante ans de règne du FMI les inégalités dans le monde, aggravées par le
"monothéisme du marché", déguisé en « liberté des échanges », se vérifie avec éclat la parole prophétique du Père LACORDAIRE: "Entre
le fort et le faible c'est la liberté qui opprime."
Quand un Président des Etats-Unis proclame: «Il faut créer une zone de "libre-échange " de 1'Alaska à la Terre de feu » et lorsque son Secrétaire d'Etat ajoute: «une zone de libre échange de Vancouver à Vladivostok", c'est le défi d'une volonté de puissance qui ne pose pas seulement un problème économique ou politique, mais théologique:  laisserons-nous crucifier 1' humanité sur cette Croix d'or?

Roger Garaudy
Résumé pour les Claritaires
7 avril 1995
(Document dactylographié)