09 mai 2017

Garaudy, le communiste (1933-1970). 3/ Le monde est ma maison



Eluard et Garaudy en 1949 au Mexique
lors du Congrès panaméricain pour la Paix
Garaudy arrive à Alger
le 10 mars 1965
Autre plongée dans les problèmes concrets :
problèmes du socialisme d'une manière nouvelle, et terriblement aiguë. Une chance parmi tant d'autres dans ma vie : je pars avec Paul Éluard et notre première étape est Mexico, où nous représentons le Mouvement de la Paix au Congrès panaméricain de la paix.
A Mexico, Figuerroa, admirable photographe du film de Bunuel Los Olvidados, me fit visiter, autour de la ville, les décors naturels de ce film. Rien n'a été reconstitué : la réalité de la misère est ici plus atroce que toute fiction.
Éluard est aussi obsédé que moi par cette
détresse. Nous ne passons que quelques heures à
visiter ensemble les pyramides de Teotihuacan, mais
les faubourgs de Mexico nous hantent. Une nuit
Paul écrit un poème qu'il intitule : « La grande
revendication des hommes de mon temps ». A
2 heures du matin il vient me le lire et m'en offrir le
manuscrit, avec toutes ses ratures, et une dédicace
de l'oeuvre inachevée. Ces vers seront pour moi le
leitmotiv de ce périple en Amérique latine :
Je vous parle d'un temps sans joie sans auréole
D'un passé qui n'est pas sacré, mais c'est le mien
Hommes de l'avenir jugez de ce temps noir
Comprenez-moi demain il vous faut voir hier.

De ce congrès je conserve quelques images
d'hommes debout, alors si peu nombreux sur un
continent où claque le fouet d'un seul maître. José
Giral, l'ancien président de la République espagnole,
me disant, à propos de l'anticommunisme,
arme de tous les ennemis de l'homme : « Pourquoi
dit-on : l'Est, l'Ouest? Pourquoi diviser l'espérance?»
Le peintre Diego Riveira, me faisant visiter le
palais de style aztèque qu'il avait fait bâtir sur une
coulée de lave, et où il accumulait les pièces d'un
musée d'art précolombien, comme une protestation,
appuyée sur la culture d'un passé lointain, contre
l'insolence inculte des « gringos ».
Le bon géant Siqueiros, que l'on appelait le
coronellasso, (le grand colonel) pour avoir commandé
une unité de blindés pendant la guerre
d'Espagne, et qui peignait alors, à la pyroxyline, des
oeuvres géantes dont chacune était un cri de colère,
de révolte et d'espérance. Il riait parce que je l'avais
surnommé « le camarade Paricutin », du nom d'un
volcan qui venait de bourgeonner dans cette terre
violente.
Pablo Neruda, alors en exil, l'un de ceux qui
avaient dénoncé avec la plus grande fermeté les
« collabos » chiliens de l'époque. Il m'a raconté
qu'à son procès son avocat, un vieux libéral, avait
pu déclarer : « Messieurs, soyons francs : Y a-t-il
un homme ici qui ne considère pas Videla (le
Pinochet de l'époque. R.G.) comme un traître? »
Un silence écrasant pesa sur la cour. Le grand
poète, vingt-cinq ans plus tard, demeura inflexiblement
debout, jusqu'à la mort, face aux nouveaux
tortionnaires du peuple chilien, au service des
mêmes maîtres étrangers.
Ainsi germait déjà la liberté dans l'Amérique
latine de nouveau colonisée. A Rio de Janeiro
j'habitais chez le peintre Candido Portinari, et sur
son conseil, je visitai dans la province de Minas
Gérais, les mines d'or. J'étais à Sabara, la cité
légendaire de l'or, d'où, au 16e siècle, les bandeirantes
partaient vers le Pacifique, brûlant, pour
passer, les millénaires forêts vierges, à la recherche
de la Sierra des Émeraudes. J'ai visité ce royaume
de l'or, j'ai visité l'Eldorado, et son entrée ressemble
à celle de l'enfer : à l'entrée de la vallée, sur
la terre d'hématite rouge, à droite deux vastes bâtiments
blancs où sont entassés les tuberculeux; à
gauche l'interminable fosse commune aux milliers
de croix où pourrissent, depuis deux siècles, ceux que
l'or a tués. Pour arracher chaque mois 16 kilos
d'or fin à la terre, cinq ou six mineurs succombent
aux poussières et aux éboulements.
Au retour, ma dernière escale fut La Havane, où,
pour avoir circulé en plein jour dans les rues, je suis
prêt à croire au chiffre qui m'a été donné :
100000 prostituées dans une ville d'un million
d'habitants.
J'ai souvent repensé à ce cauchemar lorsque,
treize ans plus tard, je suis revenu à Cuba, devenue
la première terre libre d'Amérique. Le 4 février
1962, j'assistais, aux côtés de Fidel Castro et de
Che Guevara, au rassemblement de plus d'un
million de Cubains sur la place de la Révolution où
était lancée la « Deuxième Déclaration de La Havane ».
J'écoutais comme un chant triste et grondant
la grande dénonciation de ce que j'avais
ressenti, treize ans plus tôt, du Guatemala au
Pérou, du Brésil à la mer des Caraïbes. C'était
comme l'une de ces secousses terribles que j'avais
éprouvées en avion lorsque j'avais traversé la
cordillère des Andes, au-dessus des 8 000 mètres
du Chimborazo : « Une chaîne de bras et de mains
toujours tendus — presque toujours tendus en vain
depuis des siècles, toujours en vain — s'étire au dessus
des monts de la Cordillère... Mille dollars
par cadavre, et quatre cadavres par minute...
Maintenant... on aura à compter avec les exploités
et les humiliés de l'Amérique latine, qui ont décidé
de commencer à écrire pour eux-mêmes, et pour
toujours, leur propre histoire. »
Je suis revenu quelques mois plus tard, invité à
aider au développement de l'enseignement du marxisme
dans les universités de La Havane, de
Santa Clara et de Santiago de Cuba. Je me
souviens surtout de l'entretien de plus de deux
heures que j'eus alors avec Fidel Castro. Il n'aimait
pas s'attarder sur les succès remportés : « Quand
vous me dites ce qui vous a plu dans mon pays, cela
me fait plaisir. Mais quand vous me dites ce qui ne
va pas, cela m'aide dans ma propre critique »,
me disait-il. C'est pour moi la pierre de touche pour
juger un chef d'État. J'ai retrouvé cette attitude, au
cours d'entretiens avec eux, chez Ben Bella, chez
Senghor, chez Nasser. Jamais chez Khrouchtchev
ou Walter Ulbricht.
Peut-être est-ce cette attitude première de Fidel
Castro et de Che Guevara qui a permis à Cuba
d'éveiller toute l'Amérique latine. Aujourd'hui des
fruits merveilleux ont mûri, d'une manière inattendue,
d'abord chez les chrétiens d'Amérique latine :
mes rencontres avec Dom Helder Camara, archevêque
d'Olinde et de Recife, et ses lettres fraternelles
ont été pour moi un indispensable levain
pour dépasser mes dogmatismes et mes sectarismes
anciens, notamment lorsqu'il me posa ce problème
fondamental : « Le prochain pas à accomplir, pour
nous chrétiens, c'est que soit proclamé publiquement
que ce n'est pas le socialisme mais le capitalisme qui
est « intrinsèquement pervers », et que le socialisme
n'est condamnable que dans ses" perversions. Et
pour vous, Roger, le prochain pas à accomplir c'est
de montrer que la révolution n'est pas liée d'un lien
essentiel, mais seulement historique, avec le matérialisme
philosophique et l'athéisme, et qu'elle est
au contraire consubstantielle au christianisme. »
Dom Helder m'a ouvert ce programme i l y a six ans
et n'a cessé de m'aider à le remplir. Cela est devenu
depuis lors le centre de mon expérience existentielle
et de ma réflexion théorique. Les actuelles « Théologies
de la libération », du père Guttierez au
Pérou, ou du pasteur Rubem Alvès au Brésil, qui
constituent, à mon sens, la véritable avant-garde de
la théologie mondiale, apportent une contribution
éminente à la solution de ces problèmes. Ils ont
opéré la grande inversion de la théologie contemporaine
: au lieu de partir des textes bibliques pour en
déduire une doctrine sociale, politique ou morale,
ils partent de la pratique des luttes de libération des
peuples qui posent des problèmes de vie et ils
essayent, à la lumière de l'Évangile, d'en déchiffrer
le sens profond. La théologie n'est plus alors une
manière d'interpréter le monde mais une participation
au mouvement qui tend à le changer.
Après ma première expérience de l'Amérique
latine, où j'avais vu se poser les problèmes de la
manière la plus aiguë, je rêvais de voir comment les
contradictions majeures de notre temps avaient été
résolues en Union soviétique. Je demandai donc à
partir en U.R.S.S. comme correspondant de
L'Humanité pour faire, du dedans, l'expérience de
l'autre monde, celui du socialisme. D'octobre 1953
à août 1954, je suis allé vivre en Union soviétique.
Pas en touriste : je travaillais à l'Institut de philosophie
de l'Académie des sciences, où je soutins une
thèse de doctorat (après celle que j'avais soutenue à
la Sorbonne deux ans plus tôt). M a femme faisait
son marché. Mes enfants allaient l'un à l'école
soviétique, l'autre au jardin d'enfants. J'ai sillonné
en tous sens cet immense pays : du Caucase à la
Baltique, et de l'Ukraine à l'Asie centrale.
Staline, que j'avais rencontré l'année précédente,
lorsque j'étais délégué du P.C. français au
X I Xe Congrès du P.C. de l'Union soviétique, était
mort le 6 mars 1953. L'on m'a souvent reproché,
dans une certaine presse, d'avoir évoqué avec
lyrisme mes contacts avec Staline, d'avoir dit mon
admiration pour celui que mon deuxième fils, âgé de
trois ans, appelait « pépé Staline ». Je n'ai jamais
rougi d'avoir été stalinien pendant près d'un quart
de siècle, de 1933 au X Xe Congrès du P.C. de
TU.R.S.S., en février 1956. Car, comme tous mes
camarades, je ne connaissais de Staline que ce qui,
en lui, personnifiait les conquêtes du socialisme. Et
je savais bien que ce que toutes les forces du passé,
toutes les réactions et tous les fascismes haïssaient
en Staline, ce n'étaient pas ses défauts, mais tout
simplement le fait qu'il signifiait, pour eux aussi, le
socialisme. Comment n'eût-il pas donné un visage à
tout ce qui faisait le sens de notre bataille?
J'ai passé cette première année en U.R.S.S. à un
moment privilégié : celui où l'on tentait, au lendemain
de la mort de Staline, de déraciner le système
policier. J'étais à Moscou depuis quelques semaines
à peine lorsque la Pravda annonça l'exécution de
Beria, qui symbolisait le système policier. Ce qui me
frappa surtout, des Carpathes à l'Oural, et, en
Sibérie, jusqu'au Pamir, c'était l'enthousiasme au
travail d'une très belle jeunesse qui réparait en
chantant les ruines de la guerre encore proche. J'ai
vu, la nuit, par 38 degrés au-dessous de zéro, le
travail continuer partout sous les projecteurs. Les
chalumeaux et les chansons sifflaient dans les
échafaudages de métal de futurs barrages. J'ai vu
l'ancienne « steppe de la faim » en Ouzbékistan, en
train de se transformer en « vallée des roses » par
le travail et la foi de milliers de volontaires. Oui, j'ai
cru voir naître, dans cette joie créatrice, un homme
nouveau.
Le coup fut d'autant plus rude lorsque le
X Xe Congrès du P.C. de l'U.R.S.S., en 1956, révéla
les erreurs et les crimes de l'époque stalinienne.
J'ai déjà dit, en 1966, dans mon Marxisme du
X Xe siècle, ce que fut cette prise de conscience
tragique. Devant ces révélations, et sans oublier un
instant les perspectives d'avenir qui étaient au
même instant ouvertes, il m'est arrivé de relire,
comme un message qui me serait personnellement
adressé, la sombre page de Hegel dans sa Phénoménologie
de l'esprit : « Cette conscience a éprouvé
l'angoisse, non au sujet de telle ou telle chose, non
durant tel ou tel instant, mais elle a éprouvé
l'angoisse au sujet de l'intégralité de son essence,
car elle a ressenti la mort, le maître absolu. Dans
cette angoisse elle a été dissoute intimement, elle a
tremblé dans les profondeurs de soi-même et tout ce
qui était fixé a vacillé en elle. » La peur de la vraie
mort, c'est la peur de la perte de nos raisons de
vivre. Pourquoi ne pas avouer qu'au lendemain du
X Xe Congrès nous avons compris ce que pouvait
être ce vertige vital. Je ne l'avais jamais éprouvé, ni
dans les prisons ni dans les camps.
Ma première réaction fut celle du refus. « C'est
Thermidor! ai-je pensé. Et tout cela n'est que
mensonge. » Mais il fallut se rendre à l'évidence et
je me demandais si, depuis 1933, depuis un quart de
siècle, ma vie avait eu un sens.
C'est au delà de ce « tournant des rêves » qu'il
fallut repartir à la reconquête de la foi. Non pas
décidés à ne plus croire, mais décidés à ne plus
croire que les yeux ouverts.
L'anneau magique qui nous enfermait dans nos
orgueilleuses certitudes insulaires était rompu. Il
fallait apprendre les lois du dialogue, de l’assimilation
critique de ce que les non-marxistes apportaient
à la conscience commune.
D'abord le moment de la subjectivité. Sartre, à
mon sens, avait mal posé le problème, avec une
conception subjectiviste de la subjectivité, mais il
avait le mérite de l'avoir posé. Je lui écrivis pour lui
proposer une recherche commune. Son accueil, au
début de 1956, fut très positif : « Je suis très
heureux, m'écrivait-il, de discuter avec vous sur les
moyens de saisir ce que j'appelle l'homme total,
c'est-à-dire l'homme envisagé à la fois dans ses
conditionnements sociaux et dans la reprise qu'il en
fait dans et par ses actes... Nous avancerions plus
vite si nous essayions en commun et nous aidant les
uns les autres, de mettre au jour tous les conditionnements
et toutes les significations qui peuvent
aider à comprendre tel ou tel personnage historique.
» Nous nous mîmes d'accord pour choisir
Flaubert, et nous avons échangé deux manuscrits
qui auraient peut-être permis de mieux cerner à la
fois les divergences et les complémentarités, de
mieux définir dans quelle mesure l'existentialisme
est un moment nécessaire du marxisme ou un corps
étranger. Les affrontements politiques de 1956
interrompirent cette confrontation que nous ne reprîmes
que plus tard, à Rome, à l'institut Gramsci, en
présence de Togliatti, dans un débat sur la morale
(dont j'ai formulé les thèses essentielles dans un
chapitre de mon Marxisme du XXe siècle) et, à
Paris, lors du grand débat à la Mutualité que j'avais
organisé sur le thème de la dialectique de la nature
dans la science contemporaine.
Les exigences de la lutte commune contre la
guerre d'Algérie nous avaient rapprochés. Dès
1959, Sartre participait à l'expérience que je fis
alors d'écrire un livre, Perspectives de l'homme, en
donnant la parole, à l'intérieur même du livre, à
ceux dont j'examinais l'oeuvre (Sartre, Gabriel
Marcel, Henri Wallon y consentirent).
L'accueil du public à cette tentative fut tel que
lorsque le P.C. français décida, sur ma proposition,
de créer le Centre d'études et de recherches marxistes
(C.E.R.M.) et m'en confia la direction (que
j'assumai pendant dix ans, jusqu'à mon exclusion
en 1970), la méthode se généralisa : je tenais
beaucoup à ce que des non-communistes participent
à nos recherches, car j'étais, et je demeure,
convaincu, que le développement du marxisme n'est
pas l'affaire des marxistes seuls, mais de tous les
chercheurs. De grands débats publics furent organisés
dès lors chaque année, auxquels participèrent
des hommes venus de tous les horizons.
La controverse avec l'existentialisme nous avait
conduits à commencer à élaborer une théorie non
subjectiviste de la subjectivité. Le dialogue avec les
chrétiens nous obligea à explorer davantage une
autre dimension : celle de la transcendance.
J'ai travaillé passionnément à développer ce
dialogue au delà de nos frontières et à organiser, à
Salzbourg, puis à Marianzke Lazne, en Tchécoslovaquie,
avec l'accord compréhensif du cardinal
Koenig, après le concile Vatican II, des
rencontres, où, avec des théologiens catholiques
comme le père Rahner, ou protestants comme
Jurgen Molttman, nous avons posé le problème de
la place de la transcendance dans le marxisme.
Depuis lors, peu d'ouvrages, en ce domaine,
échappent à cette problématique.
Le dialogue repose sur deux postulats : nous
avons quelque chose à apprendre de l'autre, fût-il
un adversaire; et la vérité (provisoire) qui naîtra de
notre rencontre sera autre chose et plus que
l'addition de nos certitudes : un point de vue
supérieur qui les intégrera comme des moments
partiels d'une synthèse plus riche.
C'est pourquoi le dialogue heurte les forces du
passé qui préfèrent s'en tenir à l'opposition manichéenne
du bien et du mal absolus. Lorsque, par
exemple, je revins à Athènes, en 1966 (pourtant
avant la dictature des colonels) pour y ouvrir la
deuxième Semaine de la pensée marxiste, vingt cars
de police stationnaient aux abords de la salle pour
essayer d'intimider les auditeurs. Aux États-Unis, à
Saint Louis, dans le Missouri, où j'étais invité par
l'université des jésuites, la réaction fut plus significative
encore : l'American Légion avait organisé
une campagne pour faire interdire ma venue qui
était, disaient ses affiches et ses tracts, « une
insulte à Dieu, au drapeau, et à nos combattants du
Vietnam ». Le résultat de ce tintamarre fut qu'il y
avait ce soir-là, à ma conférence, plus de 2 000 personnes,
avec quelques bousculades, des tracts, des
cris, un déploiement de police qui donnait à mon
intervention l'allure d'un western!
C'étaient des combats d'arrière-garde. Le mouvement
est irréversible : l'affrontement avec une pensée
lointaine nous permet non seulement de dégager,
mais d'enrichir notre propre vérité. La grande
découverte de Socrate : la dialectique, qui n'est
jamais construction solitaire, mais ouverture à
l'autre et dialogue, devient un phénomène de masse.
Le problème, de plus en plus, est d'élargir ce
dialogue. Car la rencontre chrétiens-marxistes, si
importante soit-elle, pour dépasser les perspectives
unilatérales de chacun et découvrir leur complémentarité
profonde, est une rencontre entre gens d'une
même famille : nous sommes, de part et d'autre, des
Occidentaux. Et l'Occident, à notre époque, devient
de plus en plus « provincial ». A Genève, en 1967,
au Conseil oecuménique des Églises, et, à Vienne,
avec le cardinal Koenig, je suggérais que le dialogue
essentiel était désormais le « dialogue des civilisations
» avec les cultures non occidentales. Nos
problèmes sont aujourd'hui planétaires, nous ne
pourrons les résoudre que dans une perspective
planétaire en recherchant le sens, les valeurs et les
Conférence publique salle Ibn Khaldoun
à Alger le 11.03.1965
fins de notre vie et de notre histoire, avec les
peuples de l'Asie, de l'Afrique, de l'Amérique
latine, et en renonçant à l'illusion mortelle qui
domine et appauvrit l'histoire depuis la Renaissance (c'est-à-dire depuis la naissance conjointe du capitalisme et du colonialisme) que l'Occident serait le seul centre d'initiative historique et le seulcréateur de valeurs


Roger Garaudy
Chapitre "Liberté, libération ?" du livre "Parole d'homme"

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