L'histoire
du « pop art »... vaut d'être résumée : en 1917, le peintre
français Marcel Duchamp envoie à New-York, à la Société
des Artistes Indépendants, une « fontaine » (en réalité,
un urinoir), en
réaction contre l'absurdité du monde : tout est non-sens, l'art
en premier lieu. Ce fut l'origine, en 1919, du mouvement «
Dada », montrant le vide et l'inanité d'une société. Duchamp récidiva avec
une roue de bicyclette posée sur un tabouret, avec un porte-vaisselle,
avec un peigne rouillé, etc.
Cette
réaction contre le non-sens de la guerre et du monde dont elle
était l'aboutissement, allait donner avec Rauschenberg, son commis
voyageur Léo Castelli, et la décomposition de la société américaine
économiquement alors florissante, naissance au « ready made
» et au « pop art », utilisant comme une « nouveauté », avec soixante-dix
ans de retard, ce qui n'était qu'un « canular », pour dénoncer
une époque, pour en faire une « école » et un « style ».
Rauschenberg
collait sur une toile un oiseau empaillé ou même une
chèvre sous prétexte de revenir à la réalité nue.
Cette
importation, en Europe, de la désintégration de l'art comme
de la société américaine, n'eut pas seulement pour effet majeur
de transformer le cinéma, devenant, à quelques exceptions près,
d'un art, une industrie. Il induisait tout un mode de vie, tel le racisme
du « western » où le « bon lndien » est l'Indien mort ou le «
collabo » de l'envahisseur, jusqu'au film d'épouvante fondé sur une
technique sophistiquée des « effets spéciaux » devenus une spécialité
d'Hollywood, ou plus encore un film de violence avec cent
coups de feu par heure, traduisant la décomposition d'un peuple
comme d'une civilisation ou d'un art. L'une
des conséquences de cette pollution culturelle venue des États-Unis,
avant-garde de la décadence, fut d'élever le vandalisme au
niveau des Beaux-Arts, comme ce fut le cas pour les « colonnes » de
Buren au Palais Royal et l'« empaquetage » du Pont-Neuf par Christo.
Il
commence, le 13 septembre 1982, l'emballage du Pont-Neuf qui
constitue évidemment, avec ses 43 000 mètres carrés de toile ignifugée
et 11 000 mètres de corde, une affaire d'or. « C'est aussi intéressant,
dit l'écrivain Vercors, que d'aller à Athènes admirer
le Panthéon
et de le trouver emballé. »
Cette mascarade ne coûtera aux contribuables
parisiens que 19 000 000 de francs.
Christo
avait, sur ce point, perdu d'une courte tête sur Buren qui avait
réussi à extorquer 22 000 000 de francs pour l'exhibition des furoncles
de ses tronçons de colonnes zébré dans la Cour d'honneur du
Palais-Royal.
De
gauche ou de droite, la logique de l'anticulture se poursuit inflexiblement,
fût-ce en défigurant Paris sous l'effet combiné de la contagion
de la logique commerciale américaine et des intérêts spéculatifs des
entreprises chargées des travaux.
Roger Garaudy, dans "Les Etats-Unis, avant-garde de la décadence", pages 68-69