04 septembre 2018

Le pop-art est-il de l'art ?

L'histoire du « pop art »... vaut d'être résumée : en 1917, le peintre français Marcel Duchamp envoie à New-York, à la Société des Artistes Indépendants, une « fontaine » (en réalité, un urinoir), en réaction contre l'absurdité du monde : tout est non-sens, l'art en premier lieu. Ce fut l'origine, en 1919, du mouvement « Dada », montrant le vide et l'inanité d'une société. Duchamp récidiva avec une roue de bicyclette posée sur un tabouret, avec un porte-vaisselle, avec un peigne rouillé, etc.
Cette réaction contre le non-sens de la guerre et du monde dont elle était l'aboutissement, allait donner avec Rauschenberg, son commis voyageur Léo Castelli, et la décomposition de la société américaine économiquement alors florissante, naissance au « ready made » et au « pop art », utilisant comme une « nouveauté », avec soixante-dix ans de retard, ce qui n'était qu'un « canular », pour dénoncer une époque, pour en faire une « école » et un « style ».
Rauschenberg collait sur une toile un oiseau empaillé ou même une chèvre sous prétexte de revenir à la réalité nue.
Cette importation, en Europe, de la désintégration de l'art comme de la société américaine, n'eut pas seulement pour effet majeur de transformer le cinéma, devenant, à quelques exceptions près, d'un art, une industrie. Il induisait tout un mode de vie, tel le racisme du « western » où le « bon lndien » est l'Indien mort ou le « collabo » de l'envahisseur, jusqu'au film d'épouvante fondé sur une technique sophistiquée des « effets spéciaux » devenus une spécialité d'Hollywood, ou plus encore un film de violence avec cent coups de feu par heure, traduisant la décomposition d'un peuple comme d'une civilisation ou d'un art. L'une des conséquences de cette pollution culturelle venue des États-Unis, avant-garde de la décadence, fut d'élever le vandalisme au niveau des Beaux-Arts, comme ce fut le cas pour les « colonnes » de Buren au Palais Royal et l'« empaquetage » du Pont-Neuf par Christo.
Il commence, le 13 septembre 1982, l'emballage du Pont-Neuf qui constitue évidemment, avec ses 43 000 mètres carrés de toile ignifugée et 11 000 mètres de corde, une affaire d'or. « C'est aussi intéressant, dit l'écrivain Vercors, que d'aller à Athènes admirer le Panthéon et de le trouver emballé. » Cette mascarade ne coûtera aux contribuables parisiens que 19 000 000 de francs.
Christo avait, sur ce point, perdu d'une courte tête sur Buren qui avait réussi à extorquer 22 000 000 de francs pour l'exhibition des furoncles de ses tronçons de colonnes zébré dans la Cour d'honneur du Palais-Royal.
De gauche ou de droite, la logique de l'anticulture se poursuit inflexiblement, fût-ce en défigurant Paris sous l'effet combiné de la contagion de la logique commerciale américaine et des intérêts spéculatifs des entreprises chargées des travaux.

Roger Garaudy, dans "Les Etats-Unis, avant-garde de la décadence", pages 68-69