26 décembre 2011

Le journal d'un mutant , par Joseph Boly (4). Les bruits de Gorée. La pierre noire. Revit Gorée toujours

11. Les bruits de Gorée (p.29)

Je ne sais plus s’il y avait des bruits, chez nous.
Ici, j’ai entendu, plus encore écouté
La respiration profonde de la mer
Lorsque les alizés l’agitent dans la nuit.
Les cloches du matin, le chant de la mosquée,
Qui fait courber les corps, se lever les esprits.
L’appel de la chaloupe, au rythme de l’horloge,
Etalant sur le quai un bouquet de sourires.
Le brouhaha confus des jeux et des palabres,
Qui recouvre le jour d’un long tapis sonore.
Le bêlement plaintif d’une chèvre aux abois,
La colère des chats, la détresse des chiens.
Le tam-tam quelquefois, déchirant l’air du soir
Pour que battent le sol les pieds d’une danseuse.
Le silence surtout, le silence ocre et rouge
Que rien ne vient troubler : silence qui s’écoute.

25 décembre 2011

L'intégriste, c'est l'autre

Rendre au capitalisme et à ses philosophies ce qui leur appartient

L'INTEGRISTE, c'est l'autre. Surtout s'il habite près des sables et de l'autre côté de la méditerranée. Roger Garaudy, dans «Intégrismes», démasque, derrière cette idée reçue, le premier des intégrismes « modernes», grandi au siècle dernier: le capitalisme et sa philosophie, le positivisme. Ah qu'il était beau le temps des colonies quand le pouvoir de la raison occidentale blanche s'étendait avec la colonisation des peuples, la conquête et le pillage de leurs pays! «Ainsi montre-t-il à propos de l'Algérie et de l'apprentissage du français, d'un pays qui comptait au temps d'Abd El Kader, 65% de lettrés en langue arabe, l'Algérie était devenue lors de sa libération, après cent vingt ans de «présence française» un pays comptant 65% d'illettrés, la culture arabe ayant été refoulée et la culture française n'atteignant qu'une infime minorité».
La désintégration des peuples, des économies et des cultures devenait ainsi le lot des pays «intégrés»... aux empires.
L'intégrisme islamique auquel le philosophe consacre la plus grande partie de son livre ne serait-il alors que la juste réponse de la bergère violée au tortionnaire arrogant et dominateur? Oui, si l'oppression tend toujours à nourrir en retour les réactions de défense et la recherche d'une tradition qui se figera d'autant que ses sources vivantes auront été taries et détruites. Non si, comme le montre aussi l'auteur, l'intégrisme islamique actuel trouve l'un de ses foyers les plus actifs en Arabie Saoudite, pays étroitement lié aux intérêts occidentaux et américains où l'usage le plus étroit et le plus dogmatique de quelques textes de l'islam, coupés de leur contexte, vient justifier à point la domination des plus riches. On coupe dans ce pays la main des voleurs misérables, mais les émirs et leur famille enfreignent en permanence la loi coranique dans leurs dilapidations financières et leur train de vie luxueux.
L'intégrisme islamique devenant alors, au-delà des apparences, l'un des instruments de domination de l'impérialisme sur les peuples... musulmans.

ROGER GARAUDY, dont on sait qu'il s'est converti à l'islam trouve, a contrario, des arguments forts pour mettre en évidence les messages de tolérance et de justice de l'une des grandes religions mondiales.
Reste que l'on peut s'interroger sur l'extension du concept d'intégrisme telle que la pratique l'auteur, notamment quand il l'applique au stalinisme. S'il est certainement pertinent de repérer dans certaines interprétations du marxisme les traces du positivisme et ses effets réducteurs, l'ampleur de la tragédie stalinienne ne peut se réduire à un «contresens philosophique». Plus qu'un intégrisme marxiste elle est un antimarxisme en actes, la systématisation d'une pratique fondée sur la négation de la démocratie.
Sur le fond, comment ne pas souscrire a cette conclusion: «L'on ne peut échapper à ces fausses réponses des intégrismes qu'en éveillant les hommes au sens des vraies questions.» Au titre de celles-ci, la construction d' un ordre social et économique permettant à chacun de déployer les richesses qu'il porte en lui, l'intégrisme exprimant selon Roger Garaudy «une frustration devant la solitude et le non sens d'un monde sans but».

Maurice Ulrich
dans l'Humanité du 14/12/1990

23 décembre 2011

Le journal d'un mutant, par Joseph Boly (3). La prière de Mamadou. Les larmes de Noël. La messe sur Gorée

8. La prière de Mamadou (p.23)

         J’attendais la chaloupe à l’embarcadère de Dakar. Mon ami nigérien, Mamadou, venait de débarquer pour une promenade en ville. Mais c’était l’heure de la prière. Je l’ai observé en silence. Il a demandé un tapis et des babouches. Il s’est déchaussé et a enlevé ses bas. Il a fait ses ablutions au robinet de l’embarcadère. Il a sorti son chapelet. Il a regardé le ciel, debout, les mains tendues comme les branches d’un arbre. Il s’est incliné profondément, couché comme une pierre. Il s’est tenu à genoux, comme un homme. C’est ainsi qu’est rythmée l’oraison musulmane, selon les trois ordres de la nature, en union avec le cosmos. Autour de lui, la vie continuait, bruyante. Personne n’y a fait attention.

Y a-t-il un péril islamiste?


DIFFICILE d'imaginer thème d'une actualité plus brûlante que ce «péril islamiste» dont on a débattu pendant trois jours au palais des congrès et de la culture du Mans (1), sous la présidence d'Alain Gresh, journaliste au «Monde diplomatique». Thème mobilisateur si l'on en juge par l'affluence qu'il suscita.
Maxime Rodinson, de l'Ecole pratique des hautes études, ouvre le feu. Il montre que les démêlés entre le monde musulman et l'Occident ne datent pas d'hier (de la chute de Grenade aux guerres d'indépendance en passant par les Croisades et la conquête coloniale). A propos de la manière différente de concevoir le monde, Maxime Rodinson estime qu'un moment très important se situe au XIXe siècle, «dans le ralliement de l'Occident à l'idée de bonheur terrestre». A partir des révolutions européennes «s'est répandue l'idée de formuler des recettes de bonheur universellement valables». Or, «l'idée que l'islam recèle des recettes pour construire sur terre une société idéale, harmonieuse, où il fait bon vivre, existe chez les musulmans depuis l'époque du prophète Mohamed». A tort, à en juger par la violence qui régnait alors et qui fit que trois des quatre successeurs du prophète moururent assassinés. C'est pourtant cette «utopie islamique» qui renaît aujourd'hui sur les décombres des expériences ratées. Voyant leur sociétés péricliter alors que l'Occident prospérait, les musulmans ont essayé - pas toujours de leur plein gré - les recettes importées d'Europe. «Mais à l'essai ni le parlementarisme ni le socialisme n'ont satisfait les peuples. Tous deux ont abouti à la corruption.»

Maxime Rodinson se dit «très sceptique» à l'égard de ce qu'il appelle «la nouvelle mouture de l'islamisme» et ses promesses. «Cela fait quatorze siècle que, dans les pays musulmans, le pouvoir est plus ou moins régi par l'islam. Pourquoi n'a-t-il pas donné de meilleurs résultats?» Il renvoie pour finir à la thèse de l'historien britannique Arnold Toynbee: «Les empires s'effondrent sous les coups du prolétariat intérieur ou du prolétariat extérieur (ce qu'il appelle «les barbares»)» et conclut: «Il y a aujourd'hui un nouveau «péril barbare», surtout pour les habitants des pays musulmans eux-mêmes.»

Le dernier orateur, Roger Garaudy, conclura sur une idée proche. Pour être devenu musulman, il n'en est pas pour autant un «islamiste». «L'islamisme, dit-il, est une maladie de l'islam» et l'intégrisme «une réaction au colonialisme». Il montre dans quelles conditions de catastrophe économique pour le tiers-monde - dont fait largement partie le monde musulman - se propage cette «maladie». «Tout ce qu'on propose aujourd'hui aux immigrés du tiers-monde, c'est de passer du monde de la faim au monde du chômage», dit-il.
Comment se débarrasser de la maladie de l'islamisme? En tuant les malades ou en supprimant la cause du mal? Pour Roger Garaudy, la réponse ne souffre pas d'hésitation. «Aujourd'hui, nous vivons dans un monde privé de sens, où l'homme est réduit à son rôle de producteur et de consommateur, où seul a droit à la démocratie celui qui a accès au marché. La seule solution est de rendre solvables ceux qui ne le sont pas.»
François Burgat, chercheur au CNRS, en poste au Caire après avoir travaillé en Algérie (2), voit dans les réactions à l'islamisme la peur que suscite chez les Occidentaux «la remise en cause de leur monopole idéologique». Pour lui, «la ré-islamisation de sociétés, où l'Occident avait été un peu trop présent, correspond à une récupération d'identité». Le processus se produit, de plus, dans des régimes usés, souvent ressentis comme illégitimes ou corrompus (Egypte, Algérie), qui ont porté atteinte de manière violente à la culture musulmane (le shah en Iran ou Nasser coupant les barbes sur la place publique) et qui n'ont laissé se développer aucune autre alternative.

A propos de l'Algérie, François Burgat estime que le soutien de l'Occident à l'interruption du processus électoral est grave pour l'avenir car il montre une fois de plus que «l'Europe défend des valeurs prétendument universelles, mais en réalité à géométrie variable: on respecte le verdict des urnes, sauf quand ce qu'il y a au fond des urnes nous déplaît». Résultat: une double radicalisation (de l'Etat et des islamistes) dont il pense qu'il faudra bien sortir.
Evoquant lui aussi l'Algérie, Roger Garaudy estime que «l'initiative de la violence revient à ceux qui ont interrompu le processus démocratique». «Les «démocrates», qui avaient demandé des élections libres ont applaudi à leur interruption par les militaires.» Il rappelle que le noyau dur terroriste, les Afghans, a été formé et financé par la CIA pour combattre les Soviétiques. Et aussi que l'Algérie a 26 milliards de dollars de dettes. «Voilà le terreau sur lequel se développe l'islamisme, conclut-il. On ne peut pas se contenter de la répression. Il n'y a pas d'autre choix que le dialogue ou la guerre. Maudit soit celui qui choisit la guerre.»

Le chercheur américain Kenneth Brown, spécialiste du Maroc, analyse le rôle joué par les Oulémas - les docteurs de la foi musulmane - dans la cohésion des sociétés islamiques. Intermédiaires entre le pouvoir et la population, ils font tout pour éviter ce qui est pour eux le mal absolu: la «fitna» ou chaos. Pour cela, tout est permis, même l'obéissance à un pouvoir tyrannique. Il prêchent donc une théorie de la soumission qui sied particulièrement aux pouvoirs en place, que ce soit au Maroc ou en Arabie Saoudite.
Le cas de ce dernier pays, où la secte fondamentaliste des Wahhabites impose sa dictature depuis 1932, est abondamment cité. Roger Garaudy note: «Le pouvoir peut y couper autant de mains qu'il veut, emprisonner ses opposants et opprimer les femmes, cela ne l'empêche pas d'être accueilli à bras ouverts par le club des défenseurs de la démocratie.» Etats-Unis en tête, bien sûr. «Pourtant, dit-il, il alimente à travers le monde toutes sortes d'intégrismes. Mais on ne l'a jamais inscrit sur la liste des pays terroristes.» François Burgat rappelle «le massacre de 9.000 fidèles dans la mosquée de La Mecque avec l'assistance technique et humanitaire des services spéciaux français».

De la salle, Abraham Serfaty affirme qu'Hassan II a entrepris une «dépersonnalisation du Maroc comparable à celle du shah en Iran». «La tyrannie de Hassan II est si évidente que toutes les forces, aujourd'hui, s'unissent contre lui et notamment le mouvement national marocain héritier de Mohammed Abdou.»
Nombre d'orateurs se réfèrent à ce penseur réformateur et moderniste. Et même Tarek Ramadan, professeur à Genève, petit-fils du fondateur du mouvement des Frères musulmans, Hassan el-Bannah. Il se fait le défenseur d'un islamisme qu'il décrit comme un «engagement social». «Nous voulons assainir la société par un programme de travail à la base.» Il dénonce une conception figée de l'islam qui applique des jurisprudences (fiqr) anachroniques (couper la main des voleurs ou interdire au femmes de conduire) au nom de la Charia. «Il faut tout revoir, dit-il. Nous n'avons jamais dit qu'il fallait jeter la démocratie à la poubelle.» Ni l'Iran, ni le Soudan, ni l'Arabie Saoudite ne peuvent servir de modèles, dit-il. Mais il doit bien reconnaître qu'un Etat islamique démocratique reste à inventer.


La fin de la guerre?
Ce n'est certainement pas l'Iran qui en donne l'exemple. L'expérience iranienne sert pour tous de repoussoir. Deux intellectuels iraniens, Farah Khosrokhavar et Fariba Abdelkhak, affirment que la révolution islamique fut d'abord une réaction à la modernisation autoritaire et oppressive imposée par le shah. Selon eux, la société iranienne est en train de conquérir «une certaine autonomie» vis-à-vis du pouvoir des mollahs. Pour Farah Khosrokavar, «on est arrivé à l'étiage du désespoir et une nouvelle société civile en gestation apparaît dans laquelle l'islamisme radical n'a presque plus de partisans».
C'est aussi l'avis d'Olivier Roy (3). «La guerre est finie, mais on ne le sait pas encore, dit-il. Après la guerre du Golfe, quelle menace stratégique peut venir du monde musulman. Quel pays musulman peut tenir tête à l'Occident? Le courant islamiste est plus défensif qu'offensif. C'est lui qui subit l'agression culturelle de l'Occident. Et en Europe, c'est plutôt à la communauté musulmane de se sentir menacée.»

Une conclusion qui rejoint celle du professeur israélien Emmanuel Sivan, conseiller du premier ministre Yitzhak Rabin pour les affaires islamiques. «L'islam politique, dit-il, n'existe pas. C'est la réaction à un danger qui vient d'Etats souvent populistes. Il s'agit d'une lutte interne aux pays musulmans eux-mêmes.» Il y voit une contre-attaque de la société civile musulmane contre les agressions qui l'ont privée de son autonomie traditionnelle par rapport à l'Etat. Celle-ci a été remise en cause au XIXe siècle, avec l'irruption de modèles importés d'Europe, en Egypte précisément, par le sultan Mohamed Ali, ancien esclave albanais devenu mamelouk.
Chacun semble pour finir sur l'idée qu'il y a dans la «ré-islamisation» une «recherche d'identité» sur fond de désespoir. Mohammed Arkoun, professeur d'histoire de la pensée islamiste, y voit davantage encore: «Une recherche de sens» face à un monde qui a perdu ses valeurs, et notamment le sens du sacré. Un monde où il faut réapprendre «la disputation» - étude, et connaissance par le débat d'idées qui permettait autrefois dans la tradition islamique la «transgression sans violence». Une pratique de haute culture aujourd'hui oubliée. C'est avec elle qu'on renoué pendant trois jours les participants au colloque du Mans. Pour conclure avec Alain Gresh, que la démocratie laïque à la française a du bon quand elle permet ainsi d'avancer dans la connaissance de l'autre.

(1) Les débats, présidés par Alain Gresh, avaient été organisés par l'association «Les Carrefours de la pensée», le journal «le Monde diplomatique», la Ligue nationale de l'enseignement et l'université du Maine.
(2) Il est l'auteur de «l'Islamisme au Maghreb» (Karthala).
(3) Chercheur au CNRS, auteur de «l'Echec de l'islam politique».


FRANÇOISE GERMAIN-ROBIN

le 16 Décembre 1993

22 décembre 2011

Quel avenir pour le Parti communiste ? (1995)

  le 8 Février 1995


L'important, c'est de savoir quel est l'avenir de ce parti. Je crois qu'actuellement il y a trois problèmes majeurs indissolublement liés et tout à fait capitaux. Celui de la faim dans le monde, celui du chômage, et celui de l'immigration. Pour moi, les trois ne font qu'un.
Jusqu'à présent, j'entends parler, pour le problème du chômage, de la croissance. Mais la croissance ne fait pas d'emplois. Elle en élimine. Marx avait déjà vu que la machine enlève l'homme de la production.
Deuxièmement, j'entends parler de partage du travail. Mais je pense qu'il faut surtout se dire: la croissance a augmenté de tant, la productivité a augmenté de tant, et le temps de travail est resté le même. A mon sens, un des projets essentiels, si l'on veut vraiment changer, c'est d'exiger l'indexation du temps de travail - du temps de travail, pas des salaires - sur la productivité.
Le fond du problème, c'est de changer les rapports avec le tiers-monde. Tant que 3 milliards d'êtres humains sur 5 demeureront insolvables, on parle d'un marché mondial mais on ne donne pas de travail à l'ensemble du monde. La seule solution, c'est donc un changement radical de nos rapports avec le tiers-monde. S'il y a un changement dans le Parti, ce doit être, à mon avis, celui-là. Ce changement radical consisterait très simplement: 1° à annuler la dette; 2° à supprimer l'aide par le haut, c'est-à-dire par les gouvernements, parce qu'elle passe en armement et en pots-de-vin, aussi bien du côté des donneurs que des bénéficiaires; 3° à faire directement ces prêts par l'intermédiaire d'organismes de base: de coopératives, de syndicats, de groupements de producteurs... Que chacun de ces prêts se fasse sur un projet précis, concernant l'amélioration du sort des populations, avec priorité pour les paysans afin d'atteindre l'autosuffisance alimentaire. Je pense à des forages de puits, à des routes, des hôpitaux. A mon avis, un parti qui ne pose pas ce problème est incapable de résoudre les problèmes mondiaux et, par conséquent, ne change pas. Pour moi, seul le Parti communiste a vocation pour avancer dans ce sens. C'est ce que j'attends de lui.

20 décembre 2011

Le journal d'un mutant, par Joseph Boly (2). Vivre au soleil. Le rythme de la chaloupe. Le temple de l'esprit. La marque des esclaves

J. BOLY, Le journal d’un mutant de l’île de Gorée, Bruxelles, CEC, 1987 p.15 à 21.

4. Vivre au soleil (p.15)

            Il peut être agréable de découvrir l’Afrique en passant, entre deux palaces qui vous bercent dans l’air conditionné. Mais vivre au soleil de l’Afrique, tous les jours, pendant quelques mois, cela suppose que vous changiez de peau.
            C’est comme si la mappemonde avait basculé pour vous projeter sur l’autre face. Quand le matin, réveillé par les vagues de l’océan, vous ouvrez la fenêtre de votre chambre, inutile de vous demander s’il fera beau ou s’il pleuvra. Il fait déjà beau. Gorée s’éveille. Le petit marché a pris forme. Les filles puisent l’eau à la fontaine. Les gosses débouchent de tous les coins dans la direction de l’école. Les balayeurs n’ont pas fini de déplacer le sable sur l’allée de l’Espadon. Le commissaire de police est déjà sur son siège. Les vieux palabrent au pied des filaos ou égrènent leur chapelet à l’ombre du Coran.

Le nouveau désordre mondial

ROGER GARAUDY, qui revient du Brésil où il s'est procuré un certain nombre de documents préparatoires à la conférence de Rio, était l'invité hier du Club de la presse «Huma»-TSF. Il est d'abord questionné par Alain Bascoulergue sur l'avenir de l'Europe dans la perspective du traité de Maastricht. Le philosophe vient de publier «Les Fossoyeurs», aux Editions de l'Archipel (1). L'essai porte en sous-titre «Un nouvel appel aux vivants». Il y écrit que cette Europe en construction équivaut à «créer un espace économique darwinien», soit de «sélection naturelle».
«Il ne s'agit pas seulement d'un espace où les plus aptes dévorent les autres. Cette Europe est un centre isolé du tiers-monde. Maastricht ne comporte pas une ligne concernant les pays non développés. C'est une folie; pis, c'est une logique. Il s'agit de la constitution d'une entité ouverte à la fois aux Etats-Unis et au Japon. La France, en ce qui la concerne, risque de devenir un petit tiers-monde de l'Europe. L'Europe est le club des anciens colonialistes: les pionniers, avec l'Espagne et le Portugal; les grands empires, avec l'Angleterre, la France, la Belgique, la Hollande; les «tard venus», avec l'Italie et l'Allemagne, ils y sont tous.» Roger Garaudy évoque ici les récents événements qui montrent que les décisions du GATT l'emportent sur celles de Bruxelles en matière de politique agricole commune. «Ce club est une forme de colonisation de l'Europe par les Etats-Unis. Une coupure avec le tiers-monde, alors que l'avenir de la France, c'est le sud de la Méditerranée et, à travers cela, l'Afrique et le reste de la planète.»
Arnaud Spire fait remarquer ici que le tiers-monde est plus proche de l'Europe qu'on ne le croit. Le renoncement à la politique agricole commune au profit du GATT va obliger les agriculteurs européens à mettre 15% de leurs terres en friche au moment où les conséquences de la famine dans le tiers-monde se soldent par un minimum de 40.000 morts par jour. Enfin, l'alignement des prix à la production sur le cours mondial ne signifie-t-il pas que le pillage des matières premières, comme il se pratique dans le tiers-monde, va être étendu sous des formes spécifiques aux anciens pays socialistes et aux membres de la CEE, France comprise?
Roger Garaudy acquiesce. «Alors que 60 millions d'êtres humains par an meurent de faim ou de malnutrition sur la planète, il est juste de remarquer que la croissance de l'Occident coûte au sous-développement des sommes de plus en plus folles. Le mot «sous-développement» est une imposture. La réalité, c'est que l'écart entre le tiers-monde et le monde actuel a doublé dans les dix dernières années. Les textes du sommet de la Terre qui s'ouvre à Rio de Janeiro - dont je suis revenu il y a trois semaines - le confirment. Faut-il s'étonner si, dans ces conditions, nous allons vers de graves convulsions? Le problème central de notre époque, c'est cet «Hiroshima par jour» imposé au tiers-monde par l'Occident.»
Abordant le sommet de Rio, il considère «qu'on n'en attendra rien» et trouve l'ensemble «tout à fait négatif». Il cite différents projets qui ont été présentés, par les Etats-Unis, par «la bande des Sept» (les pays les plus industrialisés). Notamment le texte préparé par les Japonais, qui propose «d'accroître l'accès au marché des pays industrialisés dans le contexte de l'Uruguay Round (le GATT), ainsi que les investissements privés et les transferts de technologie».


«L'INGERENCE, dit-il, est pratiquée depuis longtemps.» Ce ne sont pas les Brésiliens qui détruisent l'Amazonie au bulldozer, au rythme de 80 terrains de football par jour, «c'est Goodyear, Nippon Steel, Volkswagen et Nestlé». Il évoque la construction du barrage de Tucurui, qui va inonder des milliers d'hectares de forêt, «pour vendre à 180 dollars le mégawatt ce qui est coté sur le marché mondial 281 dollars». Donc, non seulement «il ne s'agit pas d'accélérer l'ingérence comme le veut M. Rocard, mais de dire à ces gens-là, fichez-le camp, vous êtes en train de détruire la planète». Autrefois, les Etats-Unis pouvaient se servir des dictatures militaires, mais ils ont accepté très volontiers de les remplacer par de prétendues démocraties avec des Collor pour le Brésil, avec des Menem pour l'Argentine, à condition qu'ils continuent la même politique, c'est-à-dire qu'ils payent les dettes et qu'ils oublient les crimes de la dictature militaire.
Mais qu'en est-il des «grands défis posés à l'humanité tout entière», interroge Alain Bascoulergue: la protection des climats, la préservation de la diversité des espèces végétales et animales. Faut-il adopter une charte comme le proposent les organisations non gouvernementales afin de répartir? C'est là «une utopie au mauvais sens du mot», répond Roger Garaudy. En exploitant rationnellement la forêt amazonienne, selon les règles les plus simples, il est possible avec la biomasse de fabriquer deux fois plus d'énergie que l'ensemble du pétrole fourni par l'Arabie Saoudite, mais à condition que cette forêt ne soit pas saccagée par les multinationales «qui s'abattent dessus comme un vol de corbeaux».
«Nous faisons diversion quand nous parlons de l'intégrisme, de la Thaïlande, ou que sais-je», poursuit-il. «Il y a un ennemi et un seul, c'est la domination mondiale des USA.» Il suggère quelques propositions pour y mettre fin, le boycott, les reconversions afin de «rompre le marché mondial qui est en train de laminer le monde et nous mène à un suicide planétaire».
Arnaud Spire fait remarquer que «l'époque a changé, l'impérialisme d'aujourd'hui n'est pas celui d'il y a vingt ans, c'est un nouvel ordre mondial, à certains égards pire que l'ancien». Mais est-ce que les gens ont vraiment en tête un boycott des produits américains? Seule l'intervention des peuples, chacun dans son cadre national, permet d'élever la conscience.

NOUS avons effectivement à faire face à «un colonialisme unifié, désormais totalitaire sous la bannière des Etats-Unis», répond le philosophe. Comment faire? Multiplier de plus en plus les échanges Sud-Sud, puisque les quatre cinquièmes des ressources sont dans le tiers-monde, afin de se séparer du «monothéisme du marché».
Le premier devoir pour nous, c'est d'en finir avec le leurre de Maastricht, de cette Europe qui n'a jamais représenté que des dominations et de se tourner vers ces pays qui sont complémentaires. Il faut dire non au club des anciens colonialistes et se tourner vers l'Afrique, vers ses besoins réels. Ce qui nous obligera à reconvertir nos industries. Casser le marché, «ce nouveau désordre mondial, la domination américaine». C'est, dit-il, «un géant aux pieds d'argile». L'Occident a connu ces dominations, l'hégémonie romaine, par exemple. Celle d'un pays qui avait la puissance militaire mais qui n'était porteur d'aucun projet humain, comme les Etats-Unis aujourd'hui. Elle s'est effondrée. Les forces pour parvenir au même résultat aujourd'hui existent, mais elles ne se manifesteront pas sous la forme des partis, quels qu'ils soient. Il faut que chacun prenne ses responsabilités. Même si décider de telle ou telle forme de boycott peut avoir des conséquences désagréables ou pénibles pour chacun.
Ne risque-t-on pas, en «boycottant», de décevoir ceux qui agissent de l'intérieur et qui ont des choses à dire, comme les ONG qui seront à Rio, demande Arnaud Spire.
«Si j'y étais allé, répond Roger Garaudy, j'aurais défendu les Indiens. Mais d'autres le feront mieux que moi.» Il conclut son propos en soulignant que l'Occident, massacreur de civilisations, ne peut continuer de se conduire à la fois en «instituteur et en maître du monde».



Lucien Degoy, 27 mai 1992

(1) «Les Fossoyeurs. Un nouvel appel aux vivants», par Roger Garaudy. Editions de l'Archipel.

17 décembre 2011

Le journal d'un mutant, par Joseph Boly (1). Etre un mutant. L'île de Gorée. Le temps de vivre


Avec son autorisation expresse et sur l'initiative de Luc Collès le blogue va publier en plusieurs parties à compter d'aujourd'hui Le journal d’un mutant de l’île de Gorée du Père Joseph BOLY (Bruxelles, CEC, 1987).

Le Journal des mutants, préfacé par Léopold SédarSenghor, est né d’un séjour à l’île de Gorée et d’une expérience à l’université des mutants. Il s’est prolongé, dans la suite, sans date, au gré des événements, des voyages et des lectures, pour recueillir les découvertes, les enrichissements, les  "mutations" de toute une vie.



1. Etre un mutant (p. 9-10)

          Dans son Appel aux vivants, Roger Garaudy parle de l’université des mutants qu’il a créée à l’île de Gorée, au Sénégal. Il lui a donné ce nom « parce qu’on appelle mutant, en biologie, un individu d’une espèce existante portant déjà en lui les caractères d’une espèce nouvelle en train d’opérer sa mutation ».

Garaudy et Ben Bella face à la guerre du golfe (1990)

- le 29 Août 1990

EVITER L'APOCALYPSE

SOUS le titre, «Pour un état de droit et la paix au Proche et Moyen-Orient», Roger Garaudy et Ahmed Ben Bella ont publié, mardi, un texte commun dans lequel ils affirment: «Le sens profond de l'invasion américaine du Golfe après celles, par exemple, du Vietnam et de Panama, risque d'être occulté par le vacarme des médias. C'est la guerre du pétrole, une nouvelle agression contre le tiers-monde, une escalade décisive dans la guerre des riches contre les pauvres camouflée en défense locale d'un peuple souverain contre une invasion étrangère».
«S'agit-il d'une «défense du droit international violé par l'Irak» comme le prétendent les Etats-Unis et leurs satellites?», s'interrogent les auteurs du document. Ils rappellent que «le droit international n'a cessé d'être violé au Proche-Orient, depuis vingt-trois ans: aucune résolution de l'Onu n'a été respectée».
«Ni le retrait de toutes les troupes d'occupation de Cisjordanie, de Gaza et du Golan (résolution 242 du 22 novembre 1967); ni la restauration du statut international de Jérusalem (résolution 267 du 3 juillet 1969, du Conseil exécutif unanime); ni l'interdiction des «colonies» israéliennes implantées dans les territoires occupés (résolution du 20 juillet 1979, et résolution 465 du Conseil de sécurité en mars 1980). (...) Aucun des défenseurs actuels du «droit international» n'a esquissé aucun geste pour l'application du «droit» et des résolutions de l'Onu. Au contraire, les Etats-Unis ont opposé leur veto à toute sanction et ils ont fourni à l'envahisseur armes et finances.»
«Pourquoi, s'interrogent Roger Garaudy et Ahmed Ben Bella, ces deux attitudes aussi radicalement opposées devant des cas «juridiquement inacceptables», selon la formule de Bush? Que signifie cette «justice» à sens unique?» Estimant que «le Koweït n'a jamais été séparé de l'Irak jusqu'en 1961», les auteurs du texte affirment que le rôle spécifique de ce pays, «dans le jeu américain, était de permettre de manipuler les prix du pétrole. (...) Le fond du problème, c'est qu'il ne s'agit ni de «défense du droit international», ni de lutte contre la violation des frontières d'un Etat souverain. En réalité, c'est une croisade colonialiste pour le contrôle absolu de l'Occident sur le pétrole du Moyen-Orient, et une guerre des riches contre les pauvres, contre le tiers-monde, pour lui voler ses ressources naturelles et régler son «développement» selon la loi des maîtres», indiquent-ils.
Roger Garaudy et Ahmed Ben bella affirment que l'«entrée des troupes irakiennes au Koweït et la prise des étrangers en otages» ne justifient pas «la prétention américaine de s'ériger en juges et en gendarmes du monde (...).» Ils constatent que «l'intervention militaire immédiate a rendu impossible toute solution négociée entre les pays arabes (...).»
«Pour éviter l'apocalypse», il faut revenir, selon les auteurs du texte, au «respect du droit international, et à son respect non pas à sens unique, mais pour tous». Alors, concluent Roger Garaudy et Ahmed Ben Bella, «tout devient possible, (...) l'instauration d'un «état de droit» au Proche et Moyen-Orient: les Palestiniens d'une part et les Koweïtiens d'autre part, pourront alors librement choisir leur destin».

16 décembre 2011

Parti communiste: Aragon au Comité central d'Argenteuil (mars1966)

ARAGON fut le rapporteur de la résolution du Comité central du PCF qui se tint à Argenteuil du 11 au 13 mars 1966. Voici quelques extraits de son texte, jamais publié jusqu'ici. Il s'agit de transcriptions réalisées d'après un enregistrement vocal.

PREAMBULE
«J'ai à vous présenter les résultats des travaux de la commission de résolution, je vais en abuser pour vous dire quelques mots à titre individuel en dehors de ses travaux puisque je n'ai pas pris la parole au cours du premier Comité central entièrement consacré aux questions idéologiques que nous ayons eu depuis que je suis membre du Parti, c'est-à-dire depuis 1927.»


L'ART DE LA RESOLUTION
«(...) Permettez-moi de dire que c'est un de mes souhaits les plus ardents que dans les documents que notre parti émet, il n'y ait jamais, ou enfin qu'exceptionnellement, de documents dont on puisse se dire en se réjouissant c'est un document complet. Je suis partisan des documents incomplets, nous avons fait trop de documents complets que nous avons été seuls à lire. Il s'agit de dire l'essentiel et de savoir négliger des choses, l'art de la résolution est là et non pas dans le contraire.»


A PROPOS DU LANGAGE
«Actuellement il se pose dans le peuple français en général, parmi les intellectuels certainement, des questions assez urgentes pour que si on nous attend, ce ne soit pas nécessairement au coin d'un bois, mais pour ça il faut que nous pensions à écrire les choses dans un langage compréhensible pour tous et non pas dans notre habituel jargon. Notre habituel jargon, c'est entendu, est le résultat d'un certain nombre de choses et parfois il nous est commode mais ici ça n'est pas pour parler entre nous, il faut que nous parlions à d'autres gens, il faut qu'ils nous entendent et donc peut-être certains de vous auront été choqués par telle ou telle expression, façon de tourner les choses dans le projet, parce que ce n'est pas notre façon habituelle de nous exprimer.»


A PROPOS DE ROGER GARAUDY

«(...) Mais quand on lit le texte de quelqu'un d'autre et ceci est valable de parler d'autre dans la discussion qui vient de s'établir au cours de ce Comité central, quand on cite les choses prises dans les textes d'un autre, on les cite le plus souvent me semble-t-il avec un oeil sélectif étant donné qu'on a une idée a priori avant de commencer à lire que le camarade en question fait fausse route, on le lit en lui prêtant ce qu'on pense que lui pense et il est certain que cela change le caractère de ce qu'on lit, il est difficile de dire que tel ou tel camarade commet par-là une falsification, c'est une erreur de lecture et une erreur subjective de lecture et ce n'est pas la même chose et je voudrai que ce soit en ce sens qu'on entende ce que je vais dire. Ce n'est pas la même chose d'ignorer que le travail de notre camarade Roger Garaudy est un travail que j'ai suivi avec beaucoup d'intérêt et grandement approuvé en son ensemble, ce qui ne veut pas dire que le cas échéant je n'aurai pas sur des points de détail des remarques à faire au camarade Garaudy mais que dans les circonstances actuelles je préférerai me couper la langue plutôt que de les faire. C'est d'ailleurs un petit reproche que je fais. Il aurait mieux valu créer les conditions dans lesquelles j'aurai fait des reproches au camarade Garaudy. Mais je pense très profondément que son travail a été extrêmement bénéfique - d'ailleurs même les camarades, qui lui cherchent des poux si je puis dire, l'ont reconnu (...). Aussi je regrette beaucoup moins le fait, par exemple, qu'ait pu être citée telle phrase du camarade Garaudy hors de son sens peut-être parce qu'une certaine passion qui est le fait de la jeunesse et que je comprends et qui est une chose de lecture effectivement, fait que tel camarade ne pouvait pas ne pas comprendre les choses comme ça.
«Chers camarades, c'est plutôt de la façon dont ceci est accueilli que je parle, que de la façon dont ceci est dit parce que je ne suis pas sûr que le fait que ceci soit par beaucoup d'entre nous accueilli comme cela a été lu, n'implique pas un jugement a priori qu'implique après les conversations privées le nom même et le nom seul de Roger Garaudy et non pas ce qu'il dit.»

A PROPOS DE LINGUISTIQUE
«(Par exemple) Il y a un cas tout à fait caractéristique, c'est une phrase dans un livre que j'ai écrit à l'époque surréaliste quatre ans avant mon adhésion au Parti, un livre qui s'appelle «le Libertinage» où il y a un conte qui s'appelle «Lorsque tout est fini». C'est une histoire dont le personnage qui parle à la première personne est un membre de la bande à Bonnot, un anarchiste, un voleur et un assassin et qui plus est un donneur qui donne ses camarades de la bande à la police et ce personnage dit la phrase suivante: «Nous sommes ceux qui donnerons toujours la main à l'ennemi.» Chers camarades depuis 1923, depuis quarante-trois ans je suis persécuté par les gens qui me rapportent cette phrase comme l'expression de mes sentiments intimes, à tel point qu'en 1946 dans le 1er arrondissement quand le Parti m'a présenté comme grand électeur aux élections sénatoriales, je me suis trouvé un jour en sortant de chez moi, rue de La Sourdière dans le 1er arrondissement en face d'une affiche apposée sur la maison à côté de la mienne où il y avait cette phrase en énormes lettres, signée Louis Aragon. C'est très simple, ce procédé est un procédé très connu, c'est d'ailleurs le procédé qui a établi en général l'accusation du procès Daniel Siniavski. Dans ce procès, je parle de ça parce que très peu de gens ont lu les textes, et certainement pas le procureur de l'Union soviétique qui a sûrement lu un texte ou on lui a apporté un certain nombre de phrases détachées mais détachées suivant le système qui a servi contre moi aux gens dans les conditions électorales que je rapportais car par exemple toutes ces phrases, presque toutes en tous cas, sont des phrases qui sont dans la bouche de personnage que fait parler l'auteur et contre lesquelles l'auteur est. Avec ce système, il est facile de montrer chez n'importe qui n'importe quoi. Il faut faire très attention à ces choses, c'est un ordre de choses pour lesquelles je suis personnellement plus sensible qu'un autre, je vous le répète pour des raisons de métier, je tiens à vous le dire justement dans le contexte de mon silence si je puis dire, puisque j'ai renoncé à jeter dans le débat des questions qui ne sont pas nécessairement des questions frivoles comme peut-être la poésie et le roman peuvent le paraître à certains mais par exemple comme je le disais tout à l'heure à mes camarades de la commission, des choses qui pour les scientifiques apparaîtront comme des questions sérieuses et qui se posent en ce moment-ci d'une façon très aiguë, très grave et demanderaient notre intervention qui sont les questions de la linguistique.»

14 décembre 2011

En 1992, Roger Garaudy rejette le traité de Maastricht


le 10 Septembre 1992

ROGER GARAUDY: TEXTES MORTELS

Lors du meeting qu'il a tenu vendredi dernier, à Nice, avec le général Gallois, le philosophe Roger Garaudy a nettement dénoncé celles et ceux qui, «partisans du «oui», nous parlent de tout, sauf du texte de Maastricht et des faits qui en illustrent la malfaisance». Au nombre de ces derniers, il a cité le cri du maire de Menton après la tentative de mainmise de la Mafia sur le casino de sa ville: «On a démasqué quelques-uns des mafieux, mais des centaines attendent à la frontière; et la première conséquence de Maastricht, c'est l'ouverture des frontières!»... Il a également condamné la soumission dont a fait preuve la Commission de Bruxelles face aux exigences américaines en matière d'agriculture; soumission dont il résulte qu'aujourd'hui «les Etats-Unis augmentent l'aide à leurs propres céréaliers pour faciliter leur invasion du marché européen»...
Après les faits, la lettre du traité et la menace directe dont elle est porteuse: «L'Europe de Maastricht, ne sera pas européenne (...); il s'agit d'une Europe américaine.» A preuve, le philosophe a produit le paragraphe B 4 de la déclaration sur l'UEO qui annonce ouvertement que «l'objectif est de développer l'Union européenne occidentale en tant que moyen de renforcer le pilier européen de l'Alliance atlantique». «Il ne s'agit donc pas, a lancé Roger Garaudy, de «faire le poids», mais de n'être qu'une composante de la politique étrangère américaine». Dans ce contexte, a-t-il souligné, «la France, comme toute l'Europe, ne peut fournir que des supplétifs à la gendarmerie universelle instituée par les Etats-Unis». «L'imposture fondamentale des publicitaires du «oui», a-t-il lancé, est de parler de l'Europe comme s'il s'agissait du rêve de toujours pour nous faire oublier la réalité de Maastricht», car, dans les faits, «Maastricht, c'est la destruction d'un vieux rêve européen». Le philosophe dénonce les articles du traité comme autant de «textes mortels» et invite l'électorat à ne pas signer sa propre condamnation.

 http://www.humanite.fr/node/267487

08 décembre 2011

Un homme libre, Yvon Le Corre

Yvon Le Corre, marin, peintre et aquarelliste, ivre de mer

Yvon Le Corre, marin, peintre et aquarelliste, ivre de mer
afp.com/Valery Hache

"Je suis un peu anar sur les bords"... Le regard bleu océan d'Yvon Le Corre se fait malicieux et un sourire enfantin éclaire le visage du peintre-aquarelliste-navigateur, indigné d'avant la lettre et, par-dessus tout, homme libre.

Une belle lumière d'automne éclaire les roches des Héaux de Bréhat, au large de la côte bretonne, et Girl Joyce glisse sur une mer étonnamment calme, avec le lent et rassurant mouvement des bateaux lourds.
Girl Joyce, c'est un magnifique "hooker" (ligneur), né en 1855 à Plymouth, dans le sud-ouest de l'Angleterre, un voilier en bois qui porte fièrement ses lettres de pilotage, H11, dans la grand-voile à corne. Récupérée sur une vasière de la Rance en 2002, cette "fille de joie" est à l'image de son propriétaire: authentique et loin des modes.
Aujourd'hui âgé de 72 ans, Le Corre habite Tréguier (Côtes-d'Armor), dans une vieille et belle maison à colombages reconstruite de ses mains, non loin de celle d'Ernest Renan. C'est là qu'il a posé son sac en 1979 et travaille, dans l'atmosphère complice d'un atelier aussi chaleureux que le carré de Girl Joyce.
Un jardin de curé sépare sa maison de celle d'Azou, sa compagne et mère de leurs deux enfants, Youn et Marie.
Né à Saint-Brieuc (Côtes-d'Armor) de parents instituteurs, Le Corre a découvert la mer à 12 ans à bord d'un chalutier sur lequel son père l'avait expédié "pour (le) punir d'une n-ième connerie". Un père perdu de vue à 20 ans et dont il n'aura "connu que le ceinturon".
Un temps professeur de dessin -il a enseigné l'aquarelle à un autre navigateur, Titouan Lamazou-, auteur de nombreux livres ("Les outils de la passion", "Taïeb", "Carnet d'Irlande", etc.) et voyageur infatigable à la découverte de l'autre, de l'Ecosse aux îles du Cap-Vert et au Brésil en passant par le Maghreb, Yvon Le Corre possède de multiples facettes.
Sa vie n'est qu'une suite d'aventures, d'engagements politiques, de coups de coeur, de combats. Toujours rebelle, insoumis, inclassable.
A deux reprises, il refusera d'être nommé au poste prestigieux de peintre de la Marine, comme il déclinera la médaille de chevalier des Arts et des Lettres.
"J'ai toujours milité et je continue", lance-t-il, rappelant son appartenance au PCF ("j'ai déchiré ma carte quand ils ont viré Roger Garaudy") et son engagement contre la guerre en Irak, en 2003.
Lorsqu'il ne navigue pas, Le Corre travaille dans son repaire. C'est dans ce havre hors du temps qu'il a écrit, réalisé et publié à compte d'auteur son dernier ouvrage, "L'ivre de mer".
Une devise de Che Guevara -"Endurcis-toi sans jamais perdre la tendresse"- est peinte sur une poutre de l'atelier et la barre d'Iris -l'un de ses premiers bateaux- sert de rampe d'escalier. Celle d'Eliboubane -une chaloupe sardinière donnée à un pêcheur du Cap-Vert- est fixée au plafond.
Amoureux de Joshua Slocum ("sans doute le plus grand" navigateur solitaire), d'Alain Gerbault ("ce n'était pas un très grand marin mais je l'admire pour sa volonté") mais aussi de Steinbeck et de Jorge Amado, Le Corre ne cache pas un "immense respect" pour les peintres Mathurin Méheut et Marin Marie.
En 2005, il part une première fois, seul, à la barre de Girl Joyce vers Tristan da Cunha, une île perdue aux confins de l'Atlantique Sud. "Parce que ce sont des gens qui ont une belle histoire et vivent à la limite des 40e Rugissants."
Une avarie le contraint à faire demi-tour vers la Bretagne après avoir encaissé un coup de chien au large de la péninsule ibérique. Deux fois encore, il tentera l'aventure, sans succès, vaincu par des problèmes de santé.
Aujourd'hui, les médecins lui interdisent les navigations au long cours et il se contente d'échappées plus modestes. Et d'ailleurs, assure-t-il, rien ne vaut une descente de la rivière de Tréguier jusqu'à son embouchure, jusqu'à cette île d'Er qu'il chérit tant, par une belle journée d'automne.

 

27 novembre 2011

Les origines de la "crise"

La Crise: chambardement social et politique
par
Jean-PierreGRABER 

Conférence donnée lors des Rencontres de Lavigny (Suisse) le 18 janvier 1997

Dans le cadre de cette conférence, il n'est certes ni possible ni opportun d'analyser les causes de la crise actuelle d'une manière un tant soit peu exhaustive. Je me bornerai à dire qu'à mes yeux trois facteurs fondamentaux se joignent pour modeler et changer en profondeur nos sociétés: la logique économique, les avancées technologiques et les mentalités collectives.
Dennis Gabor a saisi cette dérive en énonçant sa première loi de la technologie: "tout ce qui peut être fait le sera". En réfléchissant à cette problématique, Roger Garaudy a écrit avec pertinence: "Tout ce qui est techniquement possible est nécessaire et souhaitable". C'est en ce sens que science et technologie peuvent devenir oppressantes pour l'homme. Le génie génétique présente pour le moins autant de virtualités négatives que d'aspects positifs pour l'humanité. La vente de sang contaminé et l'affouragement des bovins par des farines animales, contre les lois élémentaires de la nature et du bon sens, laissent mal augurer d'une utilisation sage du progrès scientifique.
Les mentalités collectives constituent vraisemblablement le déterminant le plus important du déclenchement, du degré de gravité et de la nature des crises. Les mentalités collectives de ce temps me semblent présenter les caractéristiques essentielles que voici:
-Un agnosticisme multiforme largement répandu, selon lequel Dieu, s'il existe, n'est en aucun cas le Dieu de l'Histoire révélé par l'Ancien et le Nouveau Testament, mais bien plutôt le Grand Psychologue qui nous comprend du haut de sa distante bienveillance.
-La conviction qu'il n'y a pas de vérité absolue dans l'ordre spirituel, religieux, éthique et social, mais bien plutôt des vérités partielles, contingentes et provisoires, issues de la culture d'une époque. C'est le relativisme.
-La volonté de s'abstraire de la condition humaine et de nier la nature humaine. Le dessein de s'abstraire de la condition humaine explique les tentatives de l'humanité de réaliser l'utopie d'un paradis terrestre dont seraient bannies la souffrance, les maladies, la peine du travail, les contradictions et limitations humaines, voire même la mort. Nier la nature humaine, c'est, entre autres, refuser de voir que l'origine du mal est en l'homme et non pas d'abord dans la société.
-La quête d'une spiritualité irrationnelle et irréelle qui se manifeste par le goût pour les religions orientales, le surnaturel sous toutes ses formes, les tarots, les horoscopes et autres pourvoyeurs de tranquillité psychique éphémère.
-La croyance que les êtres humains ne sont pas véritablement responsables de leurs comportements pathologiques, ces derniers étant imputables à l'environnement socio-culturel. Cette croyance détermine grandement l'attitude de nos tribunaux et de nos systèmes d'éducation.
-L'individualisme égoïste, avec ses corollaires logiques que sont l'indifférence à son prochain, l'absence de solidarité active et la régression de l'esprit de sacrifice.
-Le profond désir du plus grand nombre que l'Etat n'interdise plus, mais qu'il se borne à réparer les effets négatifs de nos comportements pathologiques.
-La consommation de sensations physiques et psychiques érigées en but ultime de la vie et en valeur absolue de la société.
-Le matérialisme pragmatique et les résultats à court terme reconnus comme critères premiers des décisions humaines. C'est le règne de l'utilitarisme.
-Le mépris, voire la haine d'une différence qui interpelle et brise des certitudes faciles, confortables et anesthésiantes.
-En dépit d'un certain retour à la nature et aux mythes passéistes de l'âge d'or, la croyance majoritaire que la science et la technique constituent les principaux instruments de la résolution de presque tous les fléaux qui assaillent l'humanité.

Répétons-le. Les mentalités collectives, les avancées technologiques et la logique économique constituent l'origine principale de la crise généralisée d'aujourd'hui .

26 novembre 2011

Los integrismos

Los integrismos, parte I y II

Desde la introducción el autor es tajante con su postura en referencia al tema en cuestión, asegura que “todos los integrismos –tecnocráticos, stalinistas, cristianos, judíos o islámicos- constituyen hoy el mayor peligro para el porvenir”, [1] sitúa pues, algunas de las más afamadas formas de integrismos que se presentan en la actualidad, arremetiendo contra ellas como una peste funesta que nos ha venido embargando y lo sigue haciendo con diferentes manifestaciones.
Define este concepto diciendo que “consiste en identificar una fe religiosa o política con la forma cultural o institucional que pudo revestir en una época anterior de su historia. Creer, pues, que se posee una verdad absoluta e imponerla”. [2] La gravedad de esta postura es que es radical y defiende su teoría como única e incambiable, llegando a extremos por defender lo que se profesa como verdadero.
Garaudy elenca toda una serie de integrismos que se dan en la actualidad, tales como el del cientificismo, la tecnocracia, la concepción positivista de la ciencia, del stalinismo, el romano, iraní, argelino, israelí y el musulmán. Criticando una a una cada una de las actitudes asumidas por dichas élites, que tanto daño han hecho.
Enuncia que el diálogo es lo contrario al integrismo; posibilita la apertura, la tolerancia entre grupos, evita la guerra en sus diferentes manifestaciones y logra que se instaure la paz. El problema radica precisamente en que los integristas no permiten el diálogo como opción; absolutizan su visión del mundo, encasillándose en una única posición.
Un problema que atañe al campo del integrismo y que mueve muchos intereses es el de la economía y la política; “es un cáncer espiritual que amenaza a toda la civilización” [3] llega a sentenciar Roger Garaudy, debido a que de maneras sutiles pero también arrasadoras ha invadido grandes espacios de la humanidad, donde la ideología, irrumpe todos los demás rubros que llevan a cerrarse en una cosmovisión exclusiva y elitista.
El autor denuncia que el problema del integrismo no es un hecho aislado del Islam, sino que tiene su génesis en la sociedad occidental que trata de imponer sus modelos de cultura y desarrollo, desde la época renacentista. Esto resulta clave para no encasillarla en el ámbito meramente religioso, pues también los intereses económicos, de poder o de orden social, llevan a irse a extremos.
Garaudy enmarca algunas características de esta postura, las cuales son, el inmovilismo, -no querer adaptarse y estar en contra del desarrollo-, el regreso al pasado, -estar apegados a la tradición y conservadurismo-, y la intolerancia –actitud dogmática e intransigente-. Notoriamente discrimina esta ideología como retrograda, carente de sentido, limitada por esquemas infundamentados, y que por ende, no llevan a ningún lugar esperanzador sino sólo al ensimismamiento del círculo que ve por sus propio interés, bienestar y progreso.
Posteriormente el autor enmarca y describe tres principales formas de integrismo que se han venido dando principalmente en nuestra época contemporánea, las describe minuciosamente haciendo un análisis y crítica para cada uno de ellos. Estos son los integrismos occidentales, a saber, el cientificista, el stalinista y el romano.
El integrismo cientificista tiene su origen en Francia, en la filosofía de las luces, donde se “crea pues una nueva religión transformando la ciencia en dogma: las opciones científicas transmitidas por la escuela deberán cobrar formas que las vuelvan sagradas”. [4] Aquí entra también el pensamiento de Augusto Comte con su postura positivista y su concepción de ciencia y política. El nuevo principio es la ciencia, con la comprobación de los datos y los hechos observables. La metafísica queda descartada y anquilosada en comparación con la sociología reinante que llega brillando con sus leyes que si explican empíricamente. Nace así la nueva religión de la humanidad, constituida por la era positiva.
La seria amonestación del autor en referencia al cientificismo entendido como integrismo es que “basado en una concepción retrógrada y obsoleta de la ciencia, el cientificismo se ha transformado en una especie de superstición o, mejor dicho, de integrismo totalitario, fundado sobre el postulado de que la ‘ciencia’ puede resolver todos los problemas. Lo que ella no puede mensurar, verificar ni predecir no existe. Este positivismo reduccionista excluye las dimensiones más elevadas de la vida: el amor, la creación artística, la fe. […] Es también uno de los indicios y uno de los agentes de la desintegración de la cultura occidental, pues alimenta una mentalidad tecnocrática”. [5] Ya el hombre no reflexiona sobre sus propios objetivos sino que está en función de actividades técnicas.
El integrismo stalinista no tiene que ver con el pensamiento marxista, sino es una deformación de los seguidores de Marx, que han hecho una desvirtuación del sistema. Tiene que ver con la Unión Soviética y su sistema social-económico de gobierno que degeneró en convertirse en “correas de transmisión de la maquinaria burocrática”, [6] con evidentes posturas positivistas de la realidad y la historia.
Severamente arremete Garaudy al respecto: “la exportación de este integrismo, de esta teología sin Dios, que consideraba el sistema soviético como modelo único e inmutable del socialismo, condujo a los partidos comunistas de Europa y del Tercer Mundo a un fracaso generalizado”. [6] En este sistema –asegura nuestro autor- “encontramos el rasgo fundamental de todo integrismo: reducir un método, una fe, una política, a la forma que pudo cobrar en una época anterior de la historia. Y la consecuencia ineluctable de este dogmatismo: la inquisición. Pues si yo estoy seguro de poseer la verdad absoluta, quien la rechaza es un enfermo a quien conviene recluir en una clínica psiquiátrica, o un recalcitrante conciente cuyo rechazo voluntario de la verdad merece la prisión o la muerte”. [39]
Por último está el integrismo romano, que atañe principalmente a la Iglesia católica, que no es cosa del pasado, que tiene como característica principal el retornar al pasado con la voluntad de imponer la voluntad de la Iglesia como ley autoritaria, por medio del conservadurismo, el centralismo autoritario y la concepción cerrada de la fe occidentalizada.
Finalmente el autor propone una lucha contra el integrismo diciendo que “no se puede llevar a cabo a partir de nuestro propio integrismo, es decir, a partir de esta ‘suficiencia’, de este encierro en nosotros mismos, de esta certeza sobre la superioridad de una cultura presuntamente excepcional y universal, a partir de la cual se medirán todas las demás. No puedo tildar a un hombre de ‘integrista’ porque no comparte mi cultura, mi fe o mi incredulidad”. [10] La solución está en la cultura, en no sentirse superiores a otros, en autocriticarse personalmente, tomando conciencia de los propios integrismos para no sentirnos amos del mundo. Hay que aprender a aprender de los otros.
Termino la presente aportación con una frase que resulta desafiante, pero enmarcándola en la realidad actual puede arrojar datos certeros: “el integrismo es una enfermedad que infesta todos los movimientos políticos y religiosos de nuestro siglo”. [40] Lo importante es no sólo saberlo, sino saber cómo responder a dicha realidad que nos aborda.
[1] Roger Garaudy, Los Integrismos, ed. Gedisa, Barcelona, 1995, p. 13.
[2] Ibíd., p. 13.
[3] Ibíd., p. 14.
[4] Ibíd., p. 19.
[5] Ibíd., p. 27.
[6] Ibíd., p. 36.
[8] Ibíd., p. 37.
[9] Ibíd., p. 39.
[10] Ibíd., p. 58.
[11] Ibíd., p. 40. 

Bibliografía:
Garaudy, Roger, Los Integrismos: ensayo sobre los fundamentalismos en el mundo, ed. Gedisa, Barcelona, 1995, 157 pp. [13-60 pp.]

24 novembre 2011

Le soufisme dans l'Islam

Le principe du soufisme est dans la "shahada", dans la profession de foi de l'Islam : « Il n'est de divin que Dieu. »
C'est-à-dire que seul l'Absolu est absolu, que tout le reste est relatif ! Dieu seul est réel.
Ici encore un contresens doit être évité : dire que Dieu est tout, ne signifie pas que tout est Dieu.
Aucun panthéisme dans la vision des soufis.
Tout au contraire : Dieu, c'est ce qui manque à toute chose pour être Tout. Chaque chose n'est réelle que par son rapport à Dieu.
Séparé de Lui, elle n'est qu'illusion, non être.
Cela ne signifie nullement que Dieu se réduit à n'être que la somme des êtres, même indéfiniment prolongée.
Ceci n'a donc rien à voir avec le panthéisme qui, lui, croit à une continuité entre le fini et l'infini.
Evoquant ces rapports entre ce qui est absolument réel et ce qui n'est que relativement réel, trois des "califes bien guidés", compagnons immédiats du Prophète, disaient:
- Abu Bakr : « Je n'ai jamais vu une chose sans avoir vu Dieu avant elle ».
- Omar : « Je n'ai jamais vu une chose sans avoir vu Dieu en même temps qu'elle ».
- Othman : Je n'ai jamais vu une chose sans avoir vu Dieu après elle ».
Dieu seul est réel. Toute chose n'existe que comme "signe" de Lui, et qui le "désigne".
Il est la cause et la fin de toute chose : « Tout vient de Dieu. » (IV, 78) « et tout retourne à Lui » (X, 56). « Il est le Premier et le Dernier, l'Extérieur et l’Intérieur. » (LVII, 3).
Le soufisme est un commentaire du Coran, une manière de le lire, et surtout une manière de le vivre.
Du fait qu'il n'y a aucune commune mesure entre l'homme et Dieu, du fait même de cette transcendance, Dieu, pour n'être pas conçu de façon anthropomorphique ne peut parler à l'homme que par para­bole, comme l'homme ne peut parler de Dieu que par métaphore.
C'est la condition première et la possibilité de la révélation, c'est à­ dire de la descente de l'éternité dans le temps.
De même que le monde ne s'arrête pas aux limites des choses qui ne sont, au-delà d'eux-mêmes, que des "signes" de Dieu.
Ce qui exclut lecture littérale et exige au contraire la recherche du sens intérieur, par delà les langues, qui ne sont qu'historiques, et les mots qui ne sont que symboliques.
Le soufisme est ce moment où l'homme prend conscience que Dieu a « insufflé en lui de Son esprit. » (XV, 29 ; XXXII, 9 ; XXXVIII, 72), qu'en Dieu seul il puise la force de vaincre :
« Tu ne lançais pas toi­ même les flèches quand tu les lançais, mais Dieu les lançait. » (VIII, 17).
Un Hadith du Prophète exprime admirablement cette essence du soufisme :
« Quand j'aime Dieu, je suis l'oreille par laquelle Il écoute, le regard par lequel Il voit, la main par laquelle Il forge, le pied par lequel Il marche. »
Et toujours ce moment fondamental que tout vient de Dieu et qu'à Lui tout retourne (II, 156), diastole et systole du coeur musulman.
De Dieu tout vient, et c'est la révélation.
A Dieu tout retourne, et c'est la prière.
Double et indivisible mouvement de Dieu vers l'homme et de l'homme vers Dieu.
La révélation nous apprend à voir Dieu en toute chose qui en est le signe : ce peut être une réalité de la nature, un événement de l'histoire, un être que nous aimons, un verset de l'Ecriture.
Tout est "signe" (ayat). L'Univers entier est un langage que Dieu nous parle.
La prière n'est pas une demande, mais une manière d'être : au-delà de toute "suffisance", reconnaître notre "dépendance" à l'égard de Dieu, sa transcendance : la présence de l'infini dans le fini, c'est-à-dire Ce qui est en moi sans être à moi.
Cette prière exige l'effacement du "moi" pour laisser en nous toute la place à Dieu.
Junayd disait : « Le soufisme c'est Dieu te faisant mourir à toi pour renaître en Lui », et Abu Yazid Al-Bistami : « Quand le "moi" s'efface, alors Dieu est son propre miroir en moi » ;
le grand soufi Abu Saïd, raconte qu'un de ses disciples lui disait : « Tu nous parles souvent d'Ibliss (« Satan »), qu'est-ce que c'est que Satan ? »
Et Abu Saïd répondait : « Je le connais bien, je l'ai rencontré et il m'a dit : "Si tu dis "moi" tu deviens semblable à moi ».
Retournant ainsi à la racine de son être, l'homme peut alors accomplir sa vocation active de "Calife de Dieu" sur la terre, à qui a été confiée par Dieu la sauvegarde divine du monde.
Le "Jihad", c'est l'effort permanent, sur soi et sur les autres, pour faire régner sur la terre les droits de Dieu et des hommes.
Le soufisme, par la conscience qu'il donne à l'homme, de cette présence de Dieu en lui, de sa responsabilité à l'égard de l'ordre divin sur la terre, est un appel permanent à la foi, un appel à se "souvenir de Dieu" en chaque action pour établir dans le monde l'harmonie divine de la justice et de la paix.
Le soufisme, c'est le moment de l'intériorité de l'action.


Roger Garaudy 
L'Islam Vivant.
Texte Proposé par Aron O’Raney

19 novembre 2011

"Pour les communistes, l'esthétique c'est l'éthique de l'avenir"

Dans Marxisme du 20e siècle (éditeur La Palatine, 1966), Roger Garaudy conclut le chapitre Le marxisme et la morale (pages 83 à114) par une réflexion sur la transcendance (pages 113-114) qui introduit en même temps le chapitre suivant Le marxisme et la religion (pages 115 à 178):


05 novembre 2011

La música arábigo-andaluza

La música arábigo-andaluza – Por Roger Garaudy



“Sin la música, ninguna disciplina puede ser perfecta, puesto que nada existe sin ella. Y puesto que en el universo todo está unido por la virtud armónica y rítmica de la música, el espíritu humano no debe negarse a seguir el ejemplo que le ofrece la naturaleza”.
Isidoro de Sevilla, Etimologías, Libro III, C. 15.
Como todas las otras formas de la cultura, la música en Al-Andalus nació de la fecundación recíproca del Oriente y el Occidente. Fenómeno que se dio desde la más remota antigüedad.
Cuando el Islam comienza a penetrar en la Península Ibérica a partir de la primera mitad del siglo VIII, existía ya, en Oriente, una rica literatura sobre teorías musicales. Con lo Omeyas de Damasco (660-750), y bajo la influencia de las tradiciones siriacas, la música árabe había cesado de ser la melopea rudimentaria de los camelleros.
Nacieron dos escuelas, una en La Meca y otra en Medina. En ellas, por encima de los poemas cantados preislámicos (los moallaqats) [3] habían desarrollado el verso medido (sobre todo el octosílabo), los cantos elegíacos, y una forma de arte en la que la melodía conquista su autonomía en relación al texto del poema.
Bajo los abasidas, a partir del año 750, el poder toma conciencia, sobre todo con el califa Harun al Rashid a finales del siglo VIII, de que la música es el símbolo de la cultura de la dinastía, por lo que desarrollan a la vez la teoría, la enseñanza y la práctica del arte musical, enriquecido en Bagdad por la gran tradición persa.
Hacia el año 785, Harun al Rashid confía a un gran músico, Ibrahim al Mawsili (747-810), formado en la escuela del más importante y reconocido maestro de Medina, Maaba, la tarea de crear en Bagdad un conservatorio de música, donde se enseñaba canto, dicción, poesía y a tocar el laúd.
Su hijo, Ishak al Mawsili (767-850), prosiguió su obra, encontrando la teoría de Euclides sobre la escala de los sonidos, y colaboró con el filósofo Al Kindi (796-874). Al Kindi escribió muchos tratados de música árabe y pudo utilizar las traducciones de los autores griegos, traducciones que se hicieron bajo el reinado de Al Mamun (818-833) [4] . En sus estudios integró las aportaciones del neoplatonismo de Alejandría, las de Aristóteles y el orfismo de Pitágoras. Al Kindi puso su interés en resaltar el papel de la música sobre el control de las emociones, gracias a su efecto de expansión espiritual, de concentración y de relajamiento.
Ishak al Mawsili y Al Kindi establecieron una clasificación de los “géneros” en función de las posibilidades del laúd, al cual añadieron dos cuerdas.
Todos los grandes filósofos árabes escribieron sobre la música, la máxima expresión de la concepción islámica del mundo y de las dimensiones divinas de la vida. La obra más importante de las que se escribieron sobre este tema fue la de Al Farabi (872-950), Kitabu al musiq al Kabir (“El gran libro sobre la música”). También él analizaba el poder emocional de la música y su papel como elemento de comunicación con el otro. El punto del que arranca es casi biológico: “El hombre y el animal, bajo la impulsión de sus instintos, emiten sonidos que expresan sus emociones, como pueden ser la de alegría y miedo. La voz humana expresa mayor variedad (tristeza, ternura, cólera). Estos sonidos, en la diversidad de sus notas, provocan en la persona que los escucha los mismos matices de sentimientos o de pasiones, exaltándole, controlándole o tranquilizándole. [5] ”
El primer volumen del tratado de Al Farabi trata de la composición musical y ofrece un análisis del ritmo, de los intervalos, con sus definiciones, tanto aritméticas como geométricas, y de las formas de consonancia y de modulación. Tras esto estudia los diversos instrumentos y sus funciones en un conjunto polifónico.
En Al Farabi se inspiró Ibn Sina (Avicena) (980-1037), que desarrolló la teoría matemática de la música en su libro Al Sifa, cap. XII [6] . El gran sufí Al Ghazali (1059-1111) consagró el octavo libro de su obra Ihya ulum al din (“Reconstrucción del pensamiento religioso”), al buen uso de la música y del canto en la vida espiritual: Kitab adab al sama wa al wajd. Esta obra, escrita a comienzos del siglo XII, es una de las más importantes aportaciones para el conocimiento de la percepción espiritual de la música (sama). En este trabajo prolonga las tesis del libro de Al Muhasibi (781-857), Kitab al ri’aya li huquq Allah wa-l-qiyam biha . En realidad, se trata de un método de los sufíes para provocar el éxtasis (wajd , según la expresión de Ghazali) por medio de la poesía cantada.
Ghazali distingue la música espiritual de aquélla que tiene como objetivo únicamente el placer de los sentidos. La primera es la única, según él, moralmente justificable. Puede tratarse de una simple salmodia del Corán; el que escucha debe hacerlo con un corazón puro para ser totalmente receptivo.

El éxtasis (wajd) no es, entonces, una emoción indefinida y confusa, sino el sentimiento del amor de Dios (mahabba) [7] . La audición espiritual (samaa ) esta compuesta de cuatro elementos:
1.- El poema.
2.- El ritmo que posee y conlleva dicho poema.
3.- La melodía, con su poder, independiente de la expresión.
4.- El acompañamiento rítmico, con el tamboril, y melódico, con la flauta y el laúd.
La belleza de la música es un “signo” de la presencia de Dios, y el hecho de que los fuqahas (alfaquíes, doctores de la ley) hayan quemado en Al-Andalus las obras y los trabajos de Ghazali en el año 1064, muestra el miedo que tenían a la influencia del sufismo en la Península Ibérica.
La música en Al-Andalus
Tras este breve análisis de las fuentes, vamos a poder exponer con claridad el papel de Al-Andalus durante el periodo musulmán, en la historia de la música. No pretendemos hacer un estudio técnico de esta época; tratamos simplemente de señalar lo que la música andaluza musulmana ha ofrecido para el enriquecimiento del pensamiento y la sensibilidad humana.
El estudio técnico de este periodo de la historia musical en Al-Andalus sería, de todas maneras, hipotético. Y esto, por tres razones:
1.- Por la ausencia de la anotación musical escrita, debido principalmente al papel fundamental de la improvisación, que es infinitamente más importante que dentro de la tradición occidental.
2.- La destrucción, durante esa larga guerra civil denominada “reconquista”, de las obras teóricas andaluzas, como fueron las de Al Abashi, Al Agani al andalusiyya , y el trabajo de Al Asís, Agani Ziryab, de las cuales no se ha conservado nada salvo alusiones posteriores de historiadores que hacen referencia a ellas.
3.- Tras la caída de los grandes centros musicales de Al-Andalus –Sevilla, Córdoba y Granada–, la única fuente concreta que permanece es la tradición oral de los nubas que se han perpetuado, hasta nuestros días, en África del norte.

En el desarrollo de la música arábigo-andaluza pueden distinguirse, esquemáticamente, tres periodos:
1.- El comprendido hasta el final del reinado de Hakam I, en el año 822, que se caracteriza por la imitación de las corrientes orientales y, principalmente, de las de Bagdad. No haremos hincapié en este periodo.
2.- Bajo el reinado de Ader Rahman II (822-852) se produce un giro decisivo con la llegada a Córdoba de un alumno y rival de Ishak Al Mawsili de Bagdad: Abu el Hassan Ali Ibn Nafeh, conocido con el nombre de Ziryab [8] (el pájaro negro), del cual Ibn Jaldún dijo que “ha dejado en herencia, a España, el conocimiento de la música.” [9]
Ziryab Ziryab no trajo solamente la rica experiencia de Oriente, de Bagdad en el apogeos de los abasidas. Él dio, sobre todo, nueva vida y nuevos impulsos e ilusiones al arte de Al-Andalus. Sería un error muy grande pensar que sus aportaciones se centran básicamente en el terreno de las invenciones técnicas. Es cierto que él introdujo el uso de la púa en forma de pluma de águila para acompasar, mejor que los dedos, el acompañamiento del laúd. También añadió al laúd una quinta cuerda, pero no para extender su diapasón, sino para hacer más matizada y más humana la sonoridad del instrumento, colocando, además, esa quinta cuerda en medio de las cuatro primeras. Y, a imitación de lo que su padre hizo en Bagdad, creó en Córdoba el primer “conservatorio de música” en Occidente. Pero su aportación destaca, principalmente, al haber entregado a Al-Andalus las herencias de Persia y Bizancio, en la imposición de un nuevo estilo de vida junto a su forma de concebir el arte.
Mientras que en Occidente triunfaba la música gregoriana, adaptada a la liturgia católica y calcada sobre los ritmos de la lengua latina, Ziryab se había convertido, en Occidente, en el pionero de una música profana. Consiguió unir, con igual éxito, la música aristocrática de las cortes principescas, sujetas a unas normas estrictas que despreciaban la espontaneidad popular, y la música del pueblo, popular, con sus estribillos cantados a coro por el auditorio.
Este arte musical nuevo se afirmaba a la vez contra el clasicismo del Oriente musulmán y contra el canto gregoriano que triunfaba en la Iglesia católica de Occidente. El canto gregoriano y la música musulmana clásica persiguen el mismo objetivo y tienen el mismo origen: una meditación sobre los textos sagrados, a base de una lectura rítmica. La riqueza de la ornamentación y de sus contrapuntos están, en ambos casos, subordinados a la expresión de la vida espiritual. En ambos casos, esta grandiosa música desempeñaba un papel político. En el Imperio de Occidente, heredero del Imperio Romano y de sus jerarquías, constituía uno de los elementos aglutinantes y autoritarios del poder gracias a la unificación religiosa alrededor de un clero dominador y absolutista; y en el Califato, del cual Harun al Rashid fue la ilustración más llamativa y menos devota, era un elemento decorativo y prestigioso del poder.

En Al-Andalus, el arte musical gozaba de una autonomía muy grande y se humaniza, distanciándose a la vez del canto gregoriano y de la música árabe. Menos atada a las exigencias didácticas y a las presiones del poder, la música sigue una trayectoria en donde la melodía va tomando la delantera al texto, portador, sin equívocos, del mensaje. La expresión de sentimientos personales la arrastra por encima de la transcendencia de formas abstractas ajenas al pueblo.
El muwashahas, fenómeno literario y musical, es la primera tentativa hecha para unir la poesía árabe clásica al folklore romance de Al-Andalus. El zéjel representa un grado superior de integración y el nacimiento de un arte original después de los tanteos de yuxtaposición y de los ensayos de síntesis.
En la época de los reinos de taifas, Ibn Bajja (Avempace, 1090-1139) crea en Zaragoza un primer conservatorio. No está ya vuelto hacia el futuro y la creación, sino dominado por la evocación placentera de un pasado glorioso. En el siglo XIII, con Juhyi al Din Ibn Arabi, en su libro Kitab al Ajwiba (“El libro de las respuestas”), la teoría musical andalusí brillará con su último fulgurar, alimentada una vez más en el sufismo.
La caída de Córdoba en el año 1031 señala la parada de la creación musical en Al-Andalus. La caída de Granada en el año 1492 dará la hora de la dispersión de la nuba en África del norte, de Kairouan a Argel y a Fez. A pesar de todo, la influencia de este maravilloso florecimiento del Islam andaluz se manifiesta en toda Europa: Alfonso X el Sabio, rey de Castilla de 1252 a 1284, no desprecia el uso de las muwashahas ni del zéjel para la composición de las Cantigas de Santa María, en dialecto galaico. En Italia, Jacopone de Todi, discípulo de San Francisco de Asís, en el corazón de la Umbría, compone himnos cantados a coro por el pueblo, tomando la forma del zéjel (en cincuenta y dos himnos sobre ciento dos). En Francia, el primero de los trovadores, el duque de Aquitania, Guillermo IX (1071-1127), ha sido educado en la Corte de su padre en el clima artístico de Al-Andalus. Guillermo VIII había llevado a su tierra, tras las luchas en España, un gran número de prisioneros de lengua árabe, entre los cuales Guillermo IX pasó su juventud. Sobre las once canciones llegadas hasta nosotros, cinco derivan del zéjel.
De este modo pueden diferenciarse dos “renacimientos” que ha conocido Europa: el que tuvo lugar en el siglo XIII, tomando de España y Córdoba su fuente de inspiración y que, con Ibn Arabi, se funda sobre la fe, y el que tuvo lugar en el siglo XVI en Italia, sobre todo en Florencia, y con el cual va a comenzar el anquilosamiento de la dimensión transcendental del hombre.

Extraído de Roger Garaudy, El Islam en Occidente, Editorial Breogán, Madrid, 1987, pag. 209-218. Para más información sobre la música andalusí, véase VV.AA, Música y poesía del sur de al-Andalus (con CD) , Legado Andalusí, Granada, 1995; Manuela Cortés García, Pasado y presente de la música andalusí , Fundación El Monte, Sevilla, 1996; Christian Poche, La música arábigo andaluza (con CD) , Editorial Akal, Madrid, 1997; Julián Ribera y Tarragó, La música árabe y su influencia en la española, Editorial Pre-Textos, Valencia, 2000; Cristina Cruces Roldán, El flamenco y la música andalusí , Editorial Carena, Sevilla, 2003 (Nota de la Redacción).

Roger Garaudy (Marsella, 1913)  escritor, filósofo y político. 

Notas .-
[3] Para saber más sobre poesía árabe preislámica, véase F. Corriente / J.P. Montferrer, Las diez mu’allaqât . Poesía y panorama de Arabia en vísperas del Islam , Hiperión, Madrid, 2005; Redacción Alif Nûn, “ Literatura árabe preislámica ”, en revista Alif Nûn nº 29, julio de 2005. (Nota de la Redacción).
[4] Para más información sobre la relación entre Al Farabi y los autores griegos, véase Muhsin S. Mahdi, Alfarabi y la fundación de la filosofíapolítica islámica , Herder Editorial, Barcelona, 2003. (Nota de la Redacción).
[5] Rodolphe Erlanger La musique arabe , Ed. Geuthner, Paris, 1930-1935., vol. I, p. 14.
[6] Traducción francesa en Rodolphe Erlanger, ob. cit.
[7] El amor posee un complejo simbolismo dentro del pensamiento sufí. La expresión mahabba , empleada por el autor, sólo es uno de los muchos términos empleados por los sufíes para referirse al sentimiento amoroso, cada uno de los cuales posee distintos matices. Para más información sobre el simbolismo amoroso en el sufismo, véase Dr. Javad Nurbakhsh, En la taberna. Paraíso del sufí , Editorial Nur, Madrid, 2001; Dr. Javad Nurbakhsh, Simbolismo sufí 1 , Editorial Nur, Madrid, 2003. (Nota de la Editorial).
[8] Véase Jesús Greus, Ziryab y el despertar de al-Andalus , EntreLibros, Barcelona, 2006. (Nota de Redacción).
[9] Ibn Khaldun, Discour sur l´histoire universelle, cap. V, T. II, p. 870.
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