(Publication partielle des notes de Jean Kanapa)
20 octobre 1968,réunion du Bureau politique du Parti communiste français
Présidence : Raymond [Guyot]
Ordre du jour : La situation
politique
Rapporteur : Gaston [Plissonnier]
GASTON [PLISSONIER] - La déclaration du BP du 22 août [condamnant
l'intervention soviétique] découle de
toute son activité unanime en juillet. Toutes les informations nous
montraient qu'une seule solution politique était possible et une intervention,
devait être écartée. [Nous l'avons] encore
rappelé le 23 juillet. Puis [sont
venues] les prises de position [du PCF] sur l'accord de Moscou. Réaffirmation
fréquente de notre volonté d'unité, notamment avec le PCUS. Le BP a été
attentif à ce que les relations se poursuivent normalement. En plus, le 26
septembre, sur l'initiative de Waldeck Rochet, le BP a décidé de proposer une
rencontre. Démarche Marchais, puis lettre de Waldeck Rochet à Brejnev. Date
fixée au 4 novembre. Les informations données par le PCUS depuis le 21 août
n'infirment en rien notre position.
— la majorité du peuple est bien derrière
le PCT;
— il y avait certes [une] agitation oppositionnelle;
— mais la direction du PCT a appelé
au calme devant l'intervention [...]
Les démissions ne serviraient pas le Parti.
Premier « reproche » [de Jeannette]:
la position du Parti favoriserait
l'antisoviétisme.
— mais l'amitié avec l'URSS n'est le
monopole de personne. Nous avons tous et toujours lutté contre l'antisoviétisme.
— nous faisons tout pour éviter la polémique.
[…]
Deuxième « reproche » : le Parti s'éloignerait
de l'internationalisme.
La diversité des conditions peut entraîner
des divergences sans que le mouvement éclate. Dans les conditions actuelles, toute
autre vue serait irréelle. La seule voie, c'est la discussion. La dégradation
de l'unité du
mouvement date de 1958-1959; elle
n'est pas notre fait.
[Quant à] Roger [Garaudy] il contredit
la politique du Parti en mai-juin :
— déclaration à CTK: ingérence inadmissible,
— lettre à Waldeck Rochet
approfondissant ses désaccords,
— préface à son livre.
Donc, activité publique parallèle au
Parti, sans en informer le Parti,
contrairement au centralisme
démocratique. Roger doit s'engager ici à respecter le centralisme démocratique.
STIL - Nous sommes tous héritiers d'un
patrimoine indivisible.
ROGER [GARAUDY] - Une rencontre avec le PCUS ne peut se contenter
d'un paragraphe évoquant la
divergence.
Il faut le contexte, et il faut
évoquer leurs ingérences chez nous.
Affirmer notre solidarité prioritaire
avec le PCT.
Je prends l'engagement que me demandait
Plissonnier. Mais chacun doit prendre ses
responsabilités.
Y A N N VIENS -
Y A N N VIENS -
P. JUQUIN -
LAUPRÊTRE -
SOUQUIERE -
M A T H E Y -
COURTIEU1 -
JEANNETTE - On dit [de nous] : ce sont de vieux
camarades, des sentimentaux,
ils ont idéalisé. C'est leur faire
injure. Je ne suis pas déchirée entre mon coeur et ma raison. Je n'ai pas de
solidarité aveugle pour l'URSS.
Effectivement dramatique que cinq
pays socialistes en soient arrivés à faire pression sur un sixième.
La prise de position, précipitée, brutale
du BP le 21 faisait chorus apparemment avec la réaction.
Il fallait tout faire pour éviter l'intervention
— et tout ce que nous avons fait était bien, y compris l a proposition de
conférence.
Pas d'accord avec la résolution du
Val-de-Marne qui parle de la conférence pour le « soutien » du PCT dans la
défense du socialisme.
Félicitons-nous que les Partis d'Afrique
et d'Amérique latine se groupent autour de l'URSS.
ROUX -
E T I E N N E [FAJON] - Ce qui est condamnable chez Roger, ce n'est pas
seulement les méthodes, c'est le fond : car l a solidarité avec le PCUS est une
nécessité.
Réaffirmer la position du 22 août et
approuver l'action du BP qui a été unanime, à deux exceptions près.
Invitation pressante aux deux [Jeannette
et Garaudy] à respecter les principes du centralisme démocratique et s'incliner
devant la loi du Parti.
Faire part au cours de la rencontre [avec
les Soviétiques] de notre volonté de ne pas laisser sans riposte toute attaque,
même insidieuse.
HENRI MARTIN -
VICTOR JOANNES -
SÉGUY -
WALDECK ROCHET - Lit la lettre de démission de
Jeannette. « Je ne peux rester un membre formel du BP. » « M a décision est
irrévocable. »
Cette situation s'est créée malgré tous
nos efforts. J'ai eu de nombreux entretiens avec Jeannette. J'ai tout fait pour
la convaincre de rester même si elle se trouve en désaccord sur une question
importante. Hier encore, pendant qu'elle parlait, je lui ai adressé un appel. Sa
démission ne peut pas aider le Parti.
Adresser un blâme public à Roger, plus
un engagement de Roger d'appliquer les règles du Parti.
[…]
Session du Comité central du PCF 21
oct 1968
[…]. Dans la journée du 21 octobre,
Roger Garaudy a fait, à la tribune
du Comité Central, la déclaration
suivante :
Chers Camarades,
Ayant écouté attentivement toutes les
interventions faites au Comité
Central, j'ai constaté que, quelle
que soit l'appréciation portée sur les idées
que je défends, si personne ne m'a
demandé de renier ces idées, tous les
camarades, sans exception, ont condamné
les méthodes et les formes qui
ont été les miennes dans leur
expression publique, et qui constituent une
violation des principes de notre
discipline et du centralisme démocratique,
condition nécessaire à l'unité du
Parti.
J'accepte sans réticence cette
critique et la sanction qui en découle.
Par conséquent je m'engage, pour
l'avenir, sans renoncer à des idées que
je tiens pour vraies — comme les
Statuts du Parti m'y autorisent — à n'en
donner l'expression publique que dans
les formes prévues par les Statuts du
Parti auquel je suis fier
d'appartenir depuis trente-cinq ans, et de faire de
mon travail un élément de la
recherche collective, comme l'exigent les règles
d'organisation de notre Parti et
l'intérêt supérieur de son unité dans le
combat commun.
Kremlin PCF.Conversations
secrètes
Olivier Orban
© 1984,
Olivier Orban
Pages 131 à 235 choisies
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