La nouvelle communauté humaine est une
conception de la société globale dans
laquelle chaque individu devient un
centre d'initiative de création et de responsabilité
à tous les niveaux : celui de
l'économie, de la politique, de la culture, une conception
qui ne soit ni individualiste, ni
totalitaire, mais fondée, pour toutes les activités sociales, sur des
communautés de base.
A l'inverse du système parlementaire
émanant d'une poussière d'individus abstraits,
atomisés, la nouvelle communauté
humaine s'inspire de quatre principes fondamentaux:
1) Démocratie directe
:
c'est à dire non pas transfert du pouvoir au nom d'une prétendue délégation de
pouvoir ou procuration en blanc de la base, mais distribution effective du pouvoir à la base ;
2) Autogestion
économique :
c'est à dire constitutions d'organismes qui ne soient ni privés ni étatiques, mais gérés par
les usagers eux-mêmes groupés en communautés de base ;
3) Fédéralisme
politique :
tendant à substituer au gigantisme des Etats nationaux
centralisés des unités à l'échelle
humaine ;
4) Fédéralisme
régional :
respectant l'identité historique de chaque peuple.
Cette nouvelle communauté humaine
s'étend donc à tous les niveaux de l'activité sociale.
— au niveau de la
production, des
entreprises et des unités de travail de tous ordres, par les conseils de
travailleurs intellectuels et manuels, auxquels tous participent, sans déléguer
passivement leur pouvoir et aliéner leur pensée personnelle, pour
l'autodétermination des fins et l'autogestion des moyens.
— au niveau de la
consommation, par
la multiplication de communautés de base, c'est à dire d'organismes qui ne
soient ni étatiques, ni privés, mais gérés par les usagers eux-mêmes, qu'il s'agisse par
exemple de contrôle des prix sur un marché, d'organisation des transports en
commun,, de mutuelles pour la gestion des grands ensembles et la lutte contre la
spéculation immobilière ou de contrôle de tout autre domaine de la consommation ou des
services.
— au niveau de la
culture, en
encourageant la formation des centres d'initiatives et de création, qui ne soient là encore,
ni étatiques ni privés, mais crées et gérés par les usagers eux-mêmes dans tous les
domaines de l'animation : écoles et universités, sociétés sportives ou organisations de
vacances, ateliers d'art ou de danse, chorales ou orchestres, maisons de la jeunesse
ou de la culture sous toutes leurs formes.
QUELQUES SUGGESTIONS POUR UNE DEMOcRATIE
Afin d'éviter le caractère permanent
de la délégation de pouvoir et la professionnalisation de la politique, le
principe de la rotation doit être rigoureusement appliqué : nul ne pouvant être
rééligible deux fois consécutives dans les conseils de coordination des
assemblées locales, régionales, des communautés de base, de production et de
culture.
En outre, il est parfaitement concevable que le délégué de ces organismes ne soit pas toujours le même mais soit désigné, pour chaque session du congrès national des organismes de base, en fonction de la nature des problèmes inscrits à l'ordre du jour de cette session.
En outre, il est parfaitement concevable que le délégué de ces organismes ne soit pas toujours le même mais soit désigné, pour chaque session du congrès national des organismes de base, en fonction de la nature des problèmes inscrits à l'ordre du jour de cette session.
Les fonctions des membres représentant
les assemblées et communautés de bases
diverses doivent être essentiellement
:
1- de faire émerger et
de stimuler les initiatives et les propositions venues des entreprises et des
communautés sociales et culturelles:
2 - Le rôle esssentiel
mais transitoire, de ces membres est de parcourir tout le pays, d'aller recueuillir dans les
entreprises, dans les communautés de gestion sociale, dans les communautés
culturelles, les suggestions, de contrôler les projets retenus par le Congrès
National et d'en assurer la discussion critique (pluralité des projets et
informations complètes sur leur but, leur fonctionnement et leurs conséquences)
et publique (par tous les moyens de
masse).
Le congrès de coordination des
organismes de base a pour tâche :
— d'organiser la planification
économique à partir des propositions émanant des
organismes de base, en rendant
publiques et en soumettant à la discussion les diverses options possibles et
les raisons du choix. Un calendrier précis sera rendu public afin d'éviter la
lenteur dans la décision.
— d'élaborer les lois d'orientation
sociale (organisation du travail, santé, écologie, etc.)
Les assemblées générales ont pour
tâche de préciser les modalités concrètes de ces lois d'orientation et de les amender
en fonction des particularités économiques et sociales de leur région respective.
— de suggérer les grands projets
culturels, tels que, par exemple, l'établissement des principes de formation et
d'éducation.
— de définir les règles générales de
l'ordre public. Ici encore pour éviter l'étroitesse du professionnalisme et le secret des
bureaucraties, il conviendra par exemple, pour la magistrature, d'instituer une
profession juridique unique (avocats et juges), une élection des juges et une rotation
telle que les mêmes juristes soient tour à tour juges, avocats et enseignants
du droit.
— L'armée pose un problème spécifique.
L'armée conventionnelle actuelle ne peut avoir qu'un rôle de répression. L'arme
nucléaire française n'est pas à l'échelle des confrontations éventuelles avec
les super-grands. En fait, la véritable «défense» d'un peuple et des valeurs de
civilisation qu'il a crées et qu'il incarne, ne dépend plus d'une "garde aux frontières" mais de la réalisation d'un véritable mouvement
populaire et de rapports radicalement nouveaux avec les autres peuples,
occidentaux et non occidentaux. La seule défense possible de l'indépendance est
celle d'un peuple suffisamment attaché à son système économique, social,
politique, spirituel, pour que tout occupant éventuel ne puisse en espérer
aucune collaboration.
La radio et la télévision, dans ce
nouveau choix de civilisation, joueront un rôle décisif. Les formidables avancées
technologiques tels que la télévision par cables et les réseaux automatisés
d'information alternative, branchant entre eux ordinateur, téléviseur, téléphone, peuvent aider
les êtres humains à devenir eux-mêmes des producteurs et des réalisateurs. Ils pourront
projeter de manière dramatique, vécue, les divers avenirs possibles,
défatiliser le futur à la fois par des scénations interrompus et des scénarios
classiques.
Lorsque grâce à l'émergence des
multiples projets d'organisations sociales nés dans les communautés de base, les
contradictions et les tensions sont mises au jour, les questions dont dépend l'existence de
tous, largement éprouvées et vécues par des millions de spectateurs, sont posés
sous la forme d'un scénario. Mais celui-ci peut être interrompu au moment où doit
surgir la prise de décision. Alors commence une nouvelle élaboration à la base,
non seulement par le dialogue, et l'action detous, mais par l'enregistrement des
scénarios-réponses de multiples vidéos mobiles qui après sélection et mise en forme
technique, peuvent projeter les drames et lesréponses possibles de tout un peuple à
l'angoisse et au vertige de ce peuple en facede ses avenirs possibles et de sa
liberté.
Jamais la tragédie, celle de la vie en
train de naître, en train de se créer, n'a eu
l'occasion historique de se réaliser à
l'échelle planétaire, si le dialogue devient celui
de tous les peuples.
La radio peut jouer un rôle analogue.
Ces techniques utilisées dans
l'ensemble des activités sociales et culturelles, peuvent aider à l'émergence
de I' «homme poétique». C'est à dire le contraire de l'homme esclave, qui sous
des noms divers, constitue l'immense majorité de la population de la planète
depuis des millénaires.
EDUQUER POUR INVENTER LE FUTUR
En ce qui concerne l'éducation, sa
fonction première ne peut plus-être d'adapter l'enfant à un ordre existant,
mais au contraire de l'aider à vivre dans un monde changeant à un rythme sans précédent historique, c'est
à dire à le rendre capable de créer le futur et d'inventer des possibles
inédits.
Une véritable mutation ne peut se
réaliser par un renouvellement réformiste des moyens: il ne suffit pas de céder à
l'illusion économique de la croissance quantitative de l'école: augmenter seulement le
budget de l'Education Nationale pour multiplierle nombre de bâtiments, des
équipements scolaires et des enseignants, ni à l'illusion pédagogique sur la vertu des moyens
nouveaux : tel qu'un usage plus généralisé de la télévision ou de l'ordinateur
dans les classes.
Une définition nouvelle des finalités
de l'éducation exige un changement radical du contenu, des programmes, des
structures et du fonctionnement de l'activité vitale de la culture.
Cela exige:
— que les cultures non occidentales y
aient autant de place que la culture occidentale.
— que les arts et l'esthétique (comme
réflexion sur l'acte créateur) y aient autant de
place que les sciences et les
techniques.
— que la prospective comme réflexion
sur les fins, les valeurs et le sens de l'avenir en train de naître et comme
prise de conscience de notre responsabilité dans cette création, y ait autant
de place que l'histoire.
La liaison entre l'étude théorique et
le travail créateur, permettra de surmonter l'opposition entre travail manuel
et travail intellectuel. Les dualismes et les hiérarchies qui en découlent,
doivent s'effacer progressivement, par paliers, les écoliers passant une partie
croissante de leur temps sur les lieux de travail, d'abord pour ne pas séparer
la réflexion théorique de la pratique, ensuite pour prendre contact et ne jamais
le perdre avec les relations qui s'instituent à l'intérieur de l'entreprise
autogérée.
Quelles que soient les méthodes mises
en oeuvre, et leur variété (stages, transferts d'activité, rotations, reconversions,
etc..) l'essentiel est de maintenir le cap: pas de professeurs ou d'étudiants à plein temps,
etc..afin que chacun ait la double expérience du travail manuel et
intellectuel, des rapports de commandement et des rapports de dialogue, des
fonctions d'exécution et de gestion et des fonctions de créations.