S’il n’a pas de réels regrets quant à son action durant la guerre de libération, pense-t-il avoir pris la bonne voie en tant que président avec le choix du « socialisme arabe » ? « C’était un socialisme fondé sur l’autogestion », tient-il à préciser tout de suite, manifestement peu disposé à se livrer à une autocritique : « Et c’était ce qu’il fallait faire. » Il reste convaincu d’ailleurs que l’autogestion, qui n’est plus guère à la mode, est le meilleur système, car elle permet de ne pas imposer les décisions, « de discuter à la base, de permettre aux gens d’être engagés dans ce qu’ils font. […] Des gens qui décident à la place des autres, je suis contre, totalement ».
Il n’est donc guère étonnant qu’il se déclare ennemi des idées libérales en vogue depuis la fin du XXe siècle. Et qu’il soit très critique vis-à-vis des États-Unis. Il reconnaît, certes, leur puissance sans égale – « actuellement, Dieu, c’est le président américain » –, mais ajoute que ce sont « des tueurs ». Il ne leur pardonne surtout pas – et il insistera sur ce point en y revenant plusieurs fois – leur passé d’exterminateurs de « la race rouge ». Même si les Espagnols ont peut-être été encore plus expéditifs pour éliminer les Amérindiens, des peuples pour lesquels il avoue avoir toujours éprouvé une passion. Les Américains d’aujourd’hui devraient-ils signifier une repentance à ce sujet ? Lui qui ne se dit pas favorable à une telle déclaration de la part de la France à propos de la guerre d’Algérie le souhaiterait manifestement dans ce cas, pour réparer « une faute historique ». Mieux, dit-il en riant, « la terre appartient aux Indiens et il faudrait que les États-Unis déménagent, mais ça va être difficile ».
17 mars 1965 à Alger, Ben Bella, président de la République algérienne, avec Roger Garaudy