28 septembre 2025

Divins massacres ?

 Dans la guerre désormais historique que l’état d’Israël mène contre la population palestinienne, bien des éléments peuvent et doivent retenir l’attention de toutes celles et ceux qui croient en la valeur et en l’efficience d’une spiritualité, qu’elle soit religieuse ou laÏque.
Parmi ces éléments, deux sont particulièrement sources de pièges voire (et on le voit!) de perversions : l’argument de l’Holocauste et l’argument historico-biblique.

L’argument de l’Holocauste permet d’exploiter sans vergogne la mauvaise conscience des européens à qui l’on fait croire, dans la plus pure tradition colonialiste, que l’on doit éternellement expier les crimes nazis aux dépens des arabes en général et des Palestiniens en particulier. Pourtant, dés 1982, Nahum Goldman, ancien dirigeant du mouvement sioniste et Président-fondateur du Congrès Juif Mondial, mettait Israël en garde : « Invoquer l’Holocauste pour excuser les bombardements sur le Liban, comme le fait Mr Begin, est une profanation du mot et une banalisation de la réalité de cet holocauste, qui ne saurait en aucun cas justifier des actions politiquement et moralement indéfendables ». Que dirait aujourd’hui Nahum Goldman devant les massacres de masse à Gaza, les agressions organisées en Cisjordanie, les attaques contre le Liban ou l’Iran ?

Deuxième argument, l’histoire biblique. Cet argument consiste à revendiquer un « droit divin » de propriété sur la Palestine, l’antique Judée-Samarie, au nom des thèmes bibliques de l’Alliance, de la Terre Promise à Abraham, et du Peuple élu. Moshe Dayan disait clairement en août 1967 : »Si l‘on possède le livre de la Bible et si l’on se considère comme étant le peuple de la Bible, on devrait également posséder les terres bibliques ». Dans cette perspective s’inscrivirent toutes les agressions et annexions qui se sont succédées depuis et qui trouvent aujourd’hui leur acmé.
Cette mythologie, ignorante des droits de l’homme, réduit ainsi la vision biblique du judaïsme à une religion tribale, nationaliste, chauvine, dont l’état d’Israël est le bras armé.
Cette mythologie ignore délibérément le grandiose prophétisme pacifique d’Amos, d’Ezechiel ou d’Isaïe, pour ne retenir que les seuls textes prônant la conquête de Canaan et l’extermination sacrée des populations qui l’habitent. Sont ainsi « justifiés » la spoliation et le massacre. Cette logique est implacable, elle justifie également le racisme car la « postérité d’Abraham » n’est plus alors celle de la communauté abrahamique de la foi mais celle du sacrifice par le sang de la conquête.
L’argumentation « biblique » est d’autant plus inacceptable que la plupart des israéliens qui en abusent ne sont pas des croyants. La « Terre de la promesse » n’est pas pour eux un acte de foi mais un slogan de propagande et d’endoctrinement.

Aux « croyants » et « non-croyants » de notre pays trompés par ces manipulations de l’histoire ancienne (le récit biblique) et de l’histoire récente (le génocide nazi), il faut dire, redire et souligner toujours : le problème de la Palestine n’est pas un problème théologique ou religieux, mais un problème politique. Il faut aussi dire, redire et souligner que la politique colonialiste et raciste menée par Israël se drape d’un travestissement culturel et religieux opposé en tout au message universaliste des grands prophètes juifs, chrétiens et musulmans. Nous savions depuis Hitler ce que coûtent les prétentions d’un « peuple élu », comment pouvons-nous aujourd’hui laisser faire ce qui se passe à Gaza et en Cisjordanie ?


A.R.