Dans la guerre
désormais historique que l’état d’Israël mène contre la
population palestinienne, bien des éléments peuvent et doivent
retenir l’attention de toutes celles et ceux qui croient en la
valeur et en l’efficience d’une spiritualité, qu’elle soit
religieuse ou laÏque.
Parmi ces éléments, deux sont
particulièrement sources de pièges voire (et on le voit!) de
perversions : l’argument de l’Holocauste et l’argument
historico-biblique.
L’argument de l’Holocauste permet
d’exploiter sans vergogne la mauvaise conscience des européens à
qui l’on fait croire, dans la plus pure tradition colonialiste, que
l’on doit éternellement expier les crimes nazis aux dépens des
arabes en général et des Palestiniens en particulier. Pourtant, dés
1982, Nahum Goldman, ancien dirigeant du mouvement sioniste et
Président-fondateur du Congrès Juif Mondial, mettait Israël en
garde : « Invoquer l’Holocauste pour excuser les
bombardements sur le Liban, comme le fait Mr Begin, est une
profanation du mot et une banalisation de la réalité de cet
holocauste, qui ne saurait en aucun cas justifier des actions
politiquement et moralement indéfendables ». Que dirait
aujourd’hui Nahum Goldman devant les massacres de masse à Gaza,
les agressions organisées en Cisjordanie, les attaques contre le
Liban ou l’Iran ?
Deuxième argument, l’histoire
biblique. Cet argument consiste à revendiquer un « droit
divin » de propriété sur la Palestine, l’antique
Judée-Samarie, au nom des thèmes bibliques de l’Alliance, de la
Terre Promise à Abraham, et du Peuple élu. Moshe Dayan disait
clairement en août 1967 : »Si l‘on possède le livre de
la Bible et si l’on se considère comme étant le peuple de la
Bible, on devrait également posséder les terres bibliques ».
Dans cette perspective s’inscrivirent toutes les agressions et
annexions qui se sont succédées depuis et qui trouvent aujourd’hui
leur acmé.
Cette mythologie, ignorante des droits de l’homme,
réduit ainsi la vision biblique du judaïsme à une religion
tribale, nationaliste, chauvine, dont l’état d’Israël est le
bras armé.
Cette mythologie ignore délibérément le grandiose
prophétisme pacifique d’Amos, d’Ezechiel ou d’Isaïe, pour ne
retenir que les seuls textes prônant la conquête de Canaan et
l’extermination sacrée des populations qui l’habitent. Sont
ainsi « justifiés » la spoliation et le massacre. Cette
logique est implacable, elle justifie également le racisme car la
« postérité d’Abraham » n’est plus alors celle de
la communauté abrahamique de la foi mais celle du sacrifice par le
sang de la conquête.
L’argumentation « biblique »
est d’autant plus inacceptable que la plupart des israéliens qui
en abusent ne sont pas des croyants. La « Terre de la
promesse » n’est pas pour eux un acte de foi mais un slogan
de propagande et d’endoctrinement.
Aux « croyants » et « non-croyants » de notre pays trompés par ces manipulations de l’histoire ancienne (le récit biblique) et de l’histoire récente (le génocide nazi), il faut dire, redire et souligner toujours : le problème de la Palestine n’est pas un problème théologique ou religieux, mais un problème politique. Il faut aussi dire, redire et souligner que la politique colonialiste et raciste menée par Israël se drape d’un travestissement culturel et religieux opposé en tout au message universaliste des grands prophètes juifs, chrétiens et musulmans. Nous savions depuis Hitler ce que coûtent les prétentions d’un « peuple élu », comment pouvons-nous aujourd’hui laisser faire ce qui se passe à Gaza et en Cisjordanie ?
A.R.